La Sorcière et le Crapaud
La Sorcière et le Crapaud
Tof, d’après Robert Hunt (1865)
Il était une fois en Angleterre une vieille femme appelée Alsey – mais tout le monde l’appelait Tante Alsey. Elle habitait une petite maison qui appartenait à un marchand qui résidait à Devonport.
Tante Alsey avait un très mauvais caractère et tous la craignaient surtout qu’elle avait, entre autre, la réputation d’être une sorcière. Son propriétaire venait régulièrement chercher le montant des loyers qui lui étaient dus, mais souvent le marchand ne recevait rien d’autre que du mépris.
N’en pouvant plus de cette situation il décida un jour que tout cela avait assez duré et qu’il était grand temps que cela change. Son but était de non seulement récupérer ses loyers en retard mais aussi d’expulser la vieille Alsey et de reprendre possession de sa maison.
Tout ne s’est pas passé exactement comme il le souhaitait. La vieille femme s’est emportée et il s’en suivit une scène des plus violentes et finalement Alsey s’est placé sur le seuil de sa maison, a fait fuir le marchand et a jeté un sort sur la femme de son propriétaire, sur l’enfant qu’elle portait et sur tous ses biens. Elle avait l’air si sûre de son fait et son apparence et sa réputation était si diabolique que le propriétaire s’est enfuit totalement terrorisé.
En arrivant chez lui il a tout de suite raconté toute l’histoire à son épouse en n’omettant aucun détail. Cette scène ne fut interrompue que par l’arrivée d’une cliente dans le magasin situé sous leur appartement. L’épouse a dit à son mari de s’asseoir tranquillement et qu’elle allait s’occuper de la cliente.
La marchande n’a pas du tout pris au sérieux les menaces de la vieille femme et conversait joyeusement, comme à son habitude, avec sa cliente car pour elle il était important de bien s’occuper de ses clients, de s’intéresser à eux pour mieux les servir.
La marchande était en train de peser une des articles lorsque quelque chose est tombé lourdement au dessus de sa tête. Les deux femmes ont poussé un grand cri, et tout de suite la marchande a appelé son époux à son secours.
Le marchand, s’est précipité dans l’échoppe et là il a vu le crapaud le plus gros et le plus affreux qu’il lui ait été donné de voir. Le commerçant s’est alors saisi d’un tisonnier et s’en est servi pour attraper l’animal. Entre les pinces du tisonnier, le crapaud se mis à gonfler et à cracher en direction du marchand. Le commerçant conservant tout son sang froid prit la bête et le jeta au feu.
Bien que le crapaud fut hors de sa vue, la femme d’habitude si maîtresse d’elle-même a perdu connaissance.
Comme elle était enceinte, le mari fort inquiet se précipita vers sa femme, abandonnant ainsi le crapaud.
Le choc fut sévère pour la marchande et elle se rétablit rapidement mais elle demeura faible.
Le marchand a fait appel à un médecin qui dès son arrivée a ordonné à sa patiente de s’aliter immédiatement et prenant le mari à part il l’avertit qu’il y avait de grandes chances que la grossesse se termine avant terme.
L'inquiétude provoquée par toute cette histoire et la crainte pour la santé de sa femme et de leur futur enfant et le souhait d’épargner au maximum son épouse ont poussé l’époux à oublier pour un temps la cause de tout ce désordre.
De toute façon il était fort probable que le crapaud avait péri dans les flammes. En plus le commerçant n’était pas très curieux et n’avait finalement que faire de ce qui était advenu du crapaud.
Quelques heures plus tard il fut tout de même pris de curiosité et il reprit le tisonnier et fouilla les cendres à la recherche des restes du crapaud pour les placer en dehors de sa maison.
Alors qu’il fouillait toujours dans les cendres, un homme s’est précipité dans le magasin pour lui dire que sa locataire la fameuse Tante Alsey était tombée dans le feu et qu'elle a été presque brûlée à mort. Cet homme avait été envoyé avec deux missions – la première étant d’aller quérir un médecin et la seconde de prévenir le propriétaire car il ne restait plus grand chose de la maison, tant le feu s’est montré violent.
Rapidement le médecin et le commerçant sont allés au chevet de la vieille femme. Les brûlures étaient sérieuses mais pas aussi graves qu’on ne l’avait pensé dans un premier temps et si la femme n’avait pas été aussi âgée elle aurait eu toutes les chances de s’en sortir. Mais voila Tante Alsey était très âgée et ses chances de s’en sortir restaient faibles.
Le médecin et le commerçant se sont chargés d’emmener la vieille femme dans un dispensaire où elle a reçu tous les soins possibles, mais elle n'a jamais repris conscience et est morte au cours de la nuit.
Le crapaud, lui était resté dans le foyer et lorsque la fille des commerçants a trouvé l’animal elle s’en saisit avec un grand dégoût et l’a jeté dans le jardin.
Le lendemain matin le commerçant vit l’animal et constata après examen que l’animal avait les mêmes brûlures que la vieille femme.
La marchande se remise peu à peu et donna naissance à un robuste garçon qui plus tard fit une brillante carrière dans la marine.