La Passion de l’Ecriture

De Wiccapedia

Seasaidh, peux-tu dresser à nos

lecteurs un rapide portrait de toi ?

Née il y a un quart de siècle, je suis

une fleur fragile et étrange qui s’épanouit

au coeur de la nuit, sous les

rayons de la lune. J’ai souvent été

piétinée, mais jamais écrasée. Quelques-

uns de mes pétales se sont fanés,

mais mes épines sont mordantes.

Je suis celle qui tombe mais qui

se relèvera toujours.

Il me semble que tu as fait partie

pendant un temps d’un groupe de

musique Underground, comment

as-tu vécu cette expérience ?

Oui, j’ai été choriste pendant un an pour

un groupe underground français, dont

la réputation est aujourd’hui européenne.

Cette expérience a été très belle et

enrichissante sur le plan personnel.

J’ai retrouvé confiance en moi grâce

à la scène. J’ai appris beaucoup de

choses. Je me suis aussi remise

en question sur certains points. Le

chant et la musique sont des clefs

qui ouvrent des portes tant sur le

plan psychologique que spirituel.

De quelle tradition ou dans

quelles directions orientes-tu ta

spiritualité ?

Je suis fille de la Terre-Mère. Je célèbre

les saisons lors des solstices et

des équinoxes, les anciennes fêtes

celtiques du feu et les lunaisons. Je

suis la voie de la Déesse sans pour

autant renier le Dieu. Je m’intéresse

à chaque branche spirituelle honorant

le divin dans la nature sacrée.

Quel est le sens de la recherche

spirituelle que tu mènes ?

Ce n’est pas tant la destination que

le voyage en lui-même qui compte.

Et quelque soit le chemin emprunté,

on finit toujours, tôt ou tard, par

rentrer chez soi. Je veux avant tout

retrouver mes racines. Déterrer ce

qui a été enfoui sous terre et oublié.

La route sera longue et fastidieuse

mais c’est cela qui est intéressant.

Se battre pour être soi, parvenir à

briser les masques imposés qui défigurent

ceux qui les portent. Comment

savoir où je vais si je ne sais

pas d’où je viens ? Je désire plus

que tout faire la paix avec la petite

Jessie. Poursuivre la Déesse, c’est

me traquer moi-même et rattraper la

petite fille sauvage.

Que t’apporte-t-elle dans ta vie ?

Plein de bonnes choses : l’espoir,

la joie, l’amour, la patience, la force,

la sagesse, l’inspiration… Elle me

permet d’être meilleure au quotidien

avec l’autre et envers moi-même.

Elle m’offre un soutien réconfortant

et m’a permis de vaincre mes plus

anciennes peurs.

Parle-nous un peu de tes activités

littéraires ?

J’ai écris trois nouvelles à ce jour.

Deux d’entre elles ont été publiées

dans un fanzine de littérature gothique,

La Salamandre. J’écris sous

mon vrai nom, Jessica Radigue.

Ta troisième nouvelle devrait

paraître à la rentrée, quel en est

le thème ?

Pour cette nouvelle, je me suis inspirée

d’un rêve. Il a été mon point de

départ, plantant une ambiance et une

esthétique visuelle. Puis j’ai incorporé

des éléments du mythe osirien,

arrangés à ma façon dans cette atmosphère

fantastique pour constituer

l’histoire. Enfin, j’ai essayé de retranscrire

ma propre interprétation de

ce mythe, en donnant mon point de

vue quant au concept de l’éternité, ce

qui rend éternel, plus précisément.

Est-ce que ta spiritualité est une

source d’inspiration dans ton

activité d’auteure ?

Oui, à travers les mythes des civilisations

anciennes que j’étudie avec grande

curiosité et soif d’apprendre. Je passe

beaucoup de temps à me délecter

de mythologie et de folklore. Les dieux

ont de si jolies histoires à nous conter.

Cette envie d’écrire vient-t-elle

de loin ? On dit que l’écriture

permet de faire sortir «ce que

l’on a de plus profond en soi»,

est-ce que tes nouvelles puisent

dans ton vécu ?

J’ai toujours préféré m’exprimer par

écrit. Je parle très mal en public. Je

me trompe souvent dans le choix

de mes mots, parle trop vite et on

a parfois du mal à comprendre ce

que je dis. Par écrit, j’ai le temps

de me poser, de revenir en arrière

si nécessaire, les mots me viennent

plus facilement, je suis plus à l’aise

pour faire passer ce que je ressens

ou pense. Je puise dans mes rêves,

mes réflexions personnelles et

ma spiritualité pour écrire. Je traîne

aussi mes fantômes derrière moi, et

ils ont plein de choses à dire.

Comment vois-tu l’avenir ? Astu

des projets pour le futur ?

Pour l’instant je vis le moment présent.

Je ne me projette pas, j’ai du

mal avec ça. J’espère juste être

comme le vin et m’améliorer, de manière

générale, avec le temps.

As-tu quelque chose à ajouter ?

«Carpe Diem, Carpe Noctem !»

Aujourd’hui nous voulons vous présenter une jeune artiste talentueuse, une jeune femme qui unit la spiritualité, la

musique et l’écriture dans une même quête de l’artistique et du spirituel. Nous espérons par l’intermédiaire de cet

interview pouvoir vous faire découvrir son oeuvre naissante.

inuit sonna à l’horloge de l’église. Les portes

du cimetière claquèrent sous le passage du

vent. Et une ombre apparut subitement, là,

tout contre le mur de pierre qui encerclait

l’espace sacré. Une silhouette enfantine. Elle resta

un moment à genoux, paressant perdue. Le ciel était

dépourvu de lune et d’étoiles. La brume s’était levée.

Puis, comme si elle répondait à un appel qu’elle seule

pouvait entendre, l’apparition se releva, s’avançant

doucement vers l’entrée du dortoir des morts, ses traits

devenant de plus en plus distincts. C’était une fillette. Elle

portait une chemise de nuit de coton blanc. Ses cheveux

noirs s’envolèrent derrière elle, pris dans un ballet aérien.

La brise glaciale giffla ses joues pâles et la neige qui

recouvrait la terre de son fin manteau mordit ses pieds

nus. Mais elle poursuivit tout de même son chemin. Elle

parvint aux portes forgées du cimetière et s’immobilisa,

hésitant une seconde avant de fixer ses mains sur la

clenche pour la presser et entrer. Elle ne distingua tout

d’abord que les croix qui s’élevaient au-dessus de la

brume. Elle se fia à son instinct pour éviter les tombes,

marchant tantôt sur une herbe craquante, tantôt sur du

gravier. Elle se sentait de plus en plus engourdie au fur et

à mesure de sa lente avancée, prise de vertiges, luttant

contre l’évanouissement qui semblait vouloir l’emporter.

Sa respiration intense rythmait ses pas. Un croassement

de corbeau la fit tressaillir, son coeur s’emballa, elle ne

devait plus être très loin, désormais. Bientôt elle allait

savoir. Elle tendit ses bras devant elle et s’agenouilla.

Elle remarqua que la brume s’était épaissie autour d’elle,

l’aveuglant. Elle ne vit pas que la brume s’échappait

de sa propre bouche, à chaque nouvelle expiration. De

ses mains, elle chercha et trouva une pierre tombale.

Elle suivit son contour du bout des doigts et reconnut un

croissant de lune.

Extrait de «Cruelle innocence» parue dans La Salamandre

numéro 3.

n cette nuit hivernale, le ciel paraissait déchiré

sous la lumière tonitruante. L’océan rageait en

choeur avec lui, ses soubresauts comme des

échos à sa furie. Et son corps gisait là, sur le

sable. Elle semblait reposer entre les bras de Morphée.

Le vent s’était levé, violent, et balayait ses longs cheveux

noirs. Son étreinte glaciale avait gelé les gouttes d’eau

salées qui perlaient sur tout son être figé, pareil à une

statue. Ses yeux bleus étaient cernés de noir dont les

coulures évoquaient de minces branches d’arbres. Ses

lèvres étaient peintes d’un rouge obscur qui contrastait

avec son teint diaphane. Sa peau, d’ailleurs, rappelait le

marbre tant elle laissait transparaître ses veines bleuies.

Les eaux avaient rendu sa robe blanche vaporeuse qui,

à présent, masquait en vain sa nudité.

A portée de sa main gauche, un ours en peluche

blanc, tâché par le sang qui s’était échappé de la plaie

qui logeait dans sa paume. Elle avait le charme d’une

antique poupée de porcelaine. Le feu du ciel miroitait sur

son visage mais on aurait dit que c’était ce dernier qui se

reflétait dans les cieux brisés. Elle s’appelait Narcisse…

Extrait de «Narcisse» (renommée «Reflet d’une fleur

noyée») parue dans la Salamandre numéro 5.

e ne prendrai pas ce bus. J’ai décidé de rester

ici, à Londres. Je ne retournerai pas en enfer.

J’ai trop souffert là-bas à cause de lui. Je fuis ma

douleur. Il m’a abandonnée. Il ne reviendra pas.

Il était un dieu pour moi. Un dieu cruel qui a rejeté avec

rage la plus belle des offrandes que j’aurais jamais pu lui

faire. Je n’ai plus rien. Je veux oublier qui je suis et d’où

je viens. Ce qui est certain, c’est que ce pays ne m’a pas

vue naître. Je serai chez moi n’importe où dorénavant.

Alors, pourquoi ne pas faire de cette terre, que j’ai su

apprivoiser, mon asile ? Il est tard, je devrais rentrer mais

quelque chose me retient à l’extérieur. J’ignore de quoi il

s’agit. Je sais seulement que je dois poursuivre encore

un temps mon errance dans les rues noires et pluvieuses

de cette cité. Je me rappelle ce qui s’est passé la veille à

l’hôtel. Mon sommeil trop léger m’a rendue dépendante

des somnifères. Ce soir là, je les ai pris trop tôt, juste avant

mon bain. J’avais fini de me laver et j’étais en train de me

laisser aller à la rêverie lorsque ma tête est soudainement

devenue lourde. J’ai tenté de lutter contre ces yeux qui

se fermaient d’eux-mêmes mais le marchand de sable a

été le plus fort de nous deux. Je pouvais sentir ses mains

enfoncer ma tête sous l’eau. Jusqu’à ce que, comme

par magie, j’émerge, crachant ce mélange aqueux de

crasse et de savon, m’accrochant de toutes mes forces

au rebord afin de me sortir de là, peinant misérablement

à reprendre cette putain de respiration. J’ai bien failli

crever dans cette saleté de baignoire aussi étroite qu’un

cercueil.

Extrait de «Le souffle d’éternité» parue dans la Salamandre

numéro 9.


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