Dahut

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Mythologie bretonne.

Connue sous les graphies Dahut, Dahud, et également sous le nom d'Ahès.

Dahut est une magicienne et princesse de Cornouaille bretonne, et une figure majeure du légendaire breton. Les récits qui la concernent semblent liés au passage de la Bretagne païenne à la Bretagne chrétienne.


Etymologie

Le nom de « Dahut » viendrait du celtique "dago soitis", qui signifie « bonne magie », indiquant le caractère surnaturel du personnage.


Liens de parenté

Dahut est la fille du Roi de Cornouaille bretonne, Gradlon, et d'une femme de l'autre monde, Malgven, qui s'est unie à celui-ci après avoir été l'épouse du roi du Nord de la Bretagne.


Circonstances de la naissance de Dahut

Le roi de Cornouaille avait beaucoup de bateaux qu'il utilisait pour faire la guerre dans les lointaines contrées du Nord. Fin stratège, il gagna la plupart des batailles qu'il livra, et pilla les vaincus, amassant un énorme butin. Un jour, il entendit parler d'un royaume très riche dans le Nord, arma une grande flotte et prit la mer. Au terme d’une longue navigation, il arrive à destination et découvre une immense forteresse au fond d’un fjord. Dès le débarquement, les Bretons passent à l’attaque mais ils ne parviennent pas à vaincre. Ils assiègent la forteresse sans plus de succès. À l’approche de l’hiver, les Bretons rentrent en Armorique, à l’exception du roi. Resté seul, il rencontra alors la femme aux cheveux rouges, Malgven, la Reine du Nord, qui se tenait face à lui. Elle lui dit : "Je te connais ; tu es courageux et habile au combat. Mon mari est vieux, son épée est rouillée. Nous allons le tuer, toi et moi. Puis nous retournerons dans ton pays, en Cornouaille." Ils tuèrent le Roi du Nord, Gradlon s'empara du trésor convoité, et ils  chevauchèrent sur le cheval magique de Malgven, Morvar'ch ("cheval de mer" en breton). Le cheval était noir, du feu sortait de ses narines, et il pouvait galoper sur les flots de la mer. Ils rattrapèrent la flotte de Gradlon, mais l'approche de Morvar'ch fit fuir les navires. Gradlon et Malgven restèrent un an en mer, et Malgven donna naissance à une fille, Dahut. Selon certaines versions de l'histoire, la reine mourut durant l'accouchement. Selon d'autres versions plus anciennes, elle ne mourut pas, mais quelques temps après la naissance de Dahut, elle demanda à Gradlon ce qu'il pensait de sa fille. Il répondit "Je la chéris déjà autant que je te chéris." Malgven lui annonça alors que le visage de Dahut garderait l'apparence du sien, pour qu'il ne l'oublie pas, parce qu'il était temps pour elle de retourner dans son monde. Elle ajouta qu'ils verraient prochainement une île, et que Gradlon devrait la laisser y débarquer ; autrement, ils ne reverraient jamais la terre. Peu après, ils virent une île et Malgven y fut laissée seule. Gradlon arriva ensuite en Cornouaille avec Dahut, mais sans Malgven.

Autre version : le Roi offense la créature mystérieuse en se convertissant au christianisme et en cherchant les conseils de saint Guénolé, un personnage religieux qui aurait vécu au Ve siècle en Bretagne. La fée quitte Gradlon en franchissant un fleuve torrentiel et en l’avertissant de ne pas la suivre. Le Breton courageux la poursuit, plongeant dans les eaux tourbillonnantes. La fée, forcée de sauver la vie de son ancien amant, ne l’a pas moins détesté pour autant car ce sauvetage était la preuve que son amour n’était pas mort. Le premier amour féerique du roi est revenu bien des années plus tard posséder l’esprit de la fille de Gradlon, Dahut, qui fut à l’origine de la disparition de la ville d’Ys.


La légende d'Ys

Le Roi Gradlon était incapable de se consoler de la perte de sa compagne Malgven, et reporta toute son affection sur sa fille. Il dut également composer avec l'influence toujours croissantes des catholiques, en particulier Guénolé de Landévennec. (Saint Guénolé). Dahut devient une très belle jeune femme qui ressemblait beaucoup à sa mère, physiquement comme mentalement. La culture païenne du Nord survivait dans sa personne. C'était une fidèle de la religion des Celtes, qui se mettait ouvertement en conflit avec les moines. La jeune Dahut, fidèle au culte des anciennes déesses, accusait Corentin, évêque de Quimper, d’avoir rendu la ville triste et ennuyeuse. Elle demanda à son père de lui bâtir une ville, nommée Ys ou Ker-Is, afin qu'elle puisse y vivre à la manière des anciens, une ville dénuée de toute église. La ville d'Ys célèbrait les plaisirs de la nature et du corps, et les anciennes traditions. Saint Guénolé en prit ombrage, courroucé de constater la prospérité de cette ville qu'il considérait comme luxurieuse. Les citoyens étaient très riches, et très cosmopolite, on y trouvait des gens et des cultes de toutes sortes. Ys était une immense ville, la plus resplendissante des cités, dans la baie de Douarnenez, en Cornouaille bretonne. On dit que la ville d’Ys etait la plus belle capitale du monde, et que Lutece fut baptisée Paris car "Par Ys" en breton signifie "pareille a Ys". Elle y régnait en maîtresse absolue, gardienne de l’ancienne religion des Celtes. On dit qu'elle se rendait souvent dans les bois autour de la ville pour rendre hommage à la Déesse de la Terre. Il y avait des rumeurs : Ys n'aurait pas toléré la présence de gens pauvres et les aurait chassés ; non mariée, Dahut aurait pratiqué l'amour libre ; pire encore, la légende rapportée par les chrétiens prétend qu’elle organisait des orgies chaque soir, faisait venir de nouveaux amants au palais pour la nuit et les obligeait à porter un masque de soie enchanté, qui au matin se changeait en griffes de métal et tuait les malheureux hommes, dont les corps étaient jetés du haut d'une falaise dans l'océan. Le très pieux Saint Guénolé la mettait sans cesses en garde par ses sermons. Il prit finalement à parti le roi Gradlon et exigea qu'il bâtisse une église dans la ville, tout en menaçant Dahut de la colère divine.

Dahut avait demandé aux druidesses de l’île de Sein, les Gallisenae, de rehausser les tours de son palais et d’ériger des écluses pour protéger la ville de l'océan. La légende dit qu'un jour Dahut prit sans le savoir le diable en personne pour amant, et qu'il la convainquit, pour lui prouver son attachement, de s'emparer de la clé des écluses que son père le roi gardait autour du cou. L'amant diabolique ouvrit les portes et provoqua la submersion de la cité sous les flots. Fuyant l’inondation, Dahut s’accroche à son père qui chevauchait Morvarc’h, le cheval magique de Malgven, mais Guénolé la précipita dans l’océan. Dahut fut engloutie dans les flots.

  "Elevée plus bas que la mer, Ys en était protégée par une puissante digue. Une écluse fermait le port et seul Gradlon pouvait décider de son ouverture ou fermeture, permettant ainsi aux habitants d’aller pêcher.
  Un beau matin, un prince, tout de rouge vêtu, arriva dans la cité. Après avoir longuement dansé, Dahut tomba amoureuse de l’étranger. Or c’était le diable que Dieu envoyait pour châtier la ville pécheresse.
  Par amour pour lui, elle lui donna la clé de l’écluse qu’elle déroba à son-père pendant son sommeil. Le prince ouvrit l’écluse et l’océan en furie envahit la ville en déferlant dans les rues et étouffant ainsi les cris d’horreur des habitants. En une nuit, Dieu la punit en engloutissant la ville sous les flots. La ville est submergée et s’enfonce au fond de la mer. Dahut et Gradlon s’enfuirent sur les flots, sur le destrier magique Morvach (cheval de la mer), la mythique monture de Malgven, mère de Dahut. Mais Saint Guénolé, acharné et hystérique, ordonna au père de jeter à la mer "le démon assis derrière lui".
  Ce qu’il fit ! 
  - "Gradlon, jette à l’eau la sale bête qui s’accroche à toi"
  – "Mais c’est ma fille Guénolé. Je ne saurais la laisser"
  – "Toi seul seras sauvé, toi seul !""


La sirène Marie-Morgane

La légende dit que Dahut ne serait pas morte, et continuerait de hanter la baie de Douarnenez sous la forme d’une sirène que les marins appellent Marie-Morgane. Le nom de « Marie Morgane » (mor-gan en breton), signifie « Marie née de la mer ». Les marins prétendent parfois apercevoir Marie-Morgane, et que cette vision annoncerait qu'un orage violent se prépare.

  "Lorsque la mer fut apaisée, le saint homme Guénolé, servi par le vieux Gradlon, voulut dire une messe pour le salut de la ville engloutie. Alors qu’il élevait le calice, surgit des eaux scintillantes, le torse blanc d’une fille aux cheveux de cuivre, un bras levé au ciel. Une lourde queue d’écailles bleues terminait son corps. C’était Ahès-Dahut, devenue Marie-Morgane. La main de Guénolé trembla si fort, que le précieux calice lui échappa et vint se briser sur les rochers. La messe ne fut point consommée, Ys demeure maudite et Marie-Morgane sirène. Chaque fois que se montre Ahès, un orage terrible est bien près de crever."


Le retour de la ville d'Ys

  "Ys, quant à elle, est toujours en vie sous les flots, les citoyens étant restés immortels. On raconte qu’un jour, celui qui verra la ville sous les eaux et s’y rendra permettra de lever la protection de Cernunnos, et que la ville resurgira, plus radieuse que jamais, et que ce jour les héros des Bretagnes reviendront tous de l’Autre Monde (le royaume celte des morts). On dit aussi que les fortifications de la cité sont visibles sous les flots par certains rayons de soleil, et que les cloches de ses tours résonnent encore durant les journées magiques comme le 1er Mai."
  Pa vo beuzet Paris, Ec’h adsavo Ker Is : "Quand Paris sera englouti, Resurgira la ville d’Ys".


Autres légendes mentionnant Dahut

Une autre légende bretonne fait du roi Marc de Cornouaille britannique le roi de la Cornouaille bretonne également, et dit qu'un jour, en chassant, il poursuivit une biche qu'il découvrit être la princesse Dahut transformée. Reprenant son apparence humaine, Dahut le condamna à arborer les oreilles et la crinière et de son cheval Morvar'ch. Le Roi Marc semble une figure mythique souvent liée à des transformations de ce genre ; selon d'autres légendes, l'homme aurait eu des oreilles de cheval. On peut peut-être rapprocher ce personnage du Roi Midas, affublé d'oreilles d'âne.


Villes et lieux en rapport avec Ahès

Selon la légende, Dahut fonda la cité bretonne de Carhaix, d'après une étymologie bretonne supposée : "Ker Ahes", "la ville d'Ahès". Ce personnage aurait aussi créé des routes dont on trouve des traces dans la toponymie des « chemins d’Ahès ». Le nom Ahès aurait aussi donné leur nom aux monts d’Arrée.


Liens avec le dahud, animal fictif

Un très lointain rapport, peut-être articifiel, est évoqué par certains. Certains prétendent que Dahut fut punie par Dieu et transformée en l'étrange animal fictif nommé comme elle.


  • Parallèle avec le personnage d'Azshara dans l'univers fictif de World of Warcraft









  • Hypothèse du Mouvement Matricien : "Il s’agit là probablement de vestiges de l’ancien matriarcat primordial : une société sans père ni mari, mais pas sans oncle maternel. Le matriarcat permettant une totale liberté sexuelle (sauf l’inceste), il est probable que la reine Dahut changeait souvent d’amant, et que selon la tradition, ces derniers quittaient la couche dès les premiers rayons du soleil, comme chez les Moso du Sichuan contemporains… ce qui aurait mal été interprété par les mauvaises langues puritaines."
  • Version présentée par le Mouvement Matricien (http://matricien.org/patriarcat/mythologie/dahut-ys/) : "Mais un jour des émissaires de l’Eglise catholique romaine arrivent, menaçant Gradlon d’attaquer la ville s’il n’y fait pas construire une église (l’église catholique s’étant alliée à Rome pour étendre et renforcer leurs pouvoirs mutuels). Ou Gradlon obéit, ou Is sera rasée par Rome. Ahès, révoltée, fuit la ville, se rend dans les monts d’Arrée et demande l’aide du dieu Cernunnos, dieu celte cornu de la fertilité. On peut supposer que c’est lui à cause de sa description, l’église en a plus tard fait le diable en assimilant ses cornes de cerf à celles du diable. Celui-ci dit alors à Ahès de rentrer à Is, et que la nuit venue il sauvera la ville."


Le roi Gradlon et la ville d'Ys “Quand à la grande marée de Mars, la mer de Douarnenez déchale si loin, elle met au jour les décombres d'une ville immense et les restes des chaussées de pierre. Cette ville engloutie avait nom Is. Elle s'étendait sur neuf lieues, ceinturée d'épais remparts. Peut-être était-elle déjà une île quand elle fut édifiée et donna son nom à Douarnenez qui veut dire, en Breton, le Terre de l'Ile ....

En ce temps là, le roi Gradlon régnait sur la Cornouaille, il avait établi en maître, dans sa capitale Kemper, le saint homme Corentin, et s'était retiré dans Is, près de sa fille unique Ahès-Dahut. On ne sait si la ville d'Is était le précieux cadeau que le roi voulut faire à sa fille ou si Ahès-Dahut la fit surgir en une nuit par l'opération des mauvais esprits, car les sept péchés capitaux menaient sa cour dissolue. Tous les soirs, la princesse prenait un nouvel amant, dont le corps au matin, était jeté dans l'enfer de Plogoff.

Un soir, un prince étrange tout vêtu d'écarlate et venu on ne sait d'où, se rendit maître de la princesse. "Belle, si vous m'aimez, donnez moi de votre amour d'assurés témoignages." - "Quels témoignages, mon cher seigneur, vous donnerais-je ? - "La clé des écluses" - "C'est la clé confiée à Gradlon seul par les esprits de la mer. Elle ne quitte pas le col de mon père." - "Votre père est vieux. Il dort. Et vous avez la main si douce."

Voilà Dahut qui dérobe la clé, et le prince largue les écluses. Voilà la mer qui tombe sur Is comme une bête. Elle déferle au galop dans les rue, abat les maisons, étouffe les cris d'horreur. Sur son cheval marin, le vieux Gradlon chevauche durement dans les vagues, aux côtés de saint Guénolé, pour regagner la Grande Terre. Mais le cheval peine dans la tourmente. - "Gradlon, jette à l'eau la sale bête qui s'accroche à toi" - "Mais c'est ma fille Guénolé. Je ne saurais la laisser" - "Toi seul seras sauvé, toi seul !"

Gradlon en larmes, se libère des bras de sa fille. Le cheval allégé gagne sur la vague et prend pied en terre ferme. La mer s'apaise. Elle n'est plus qu'un lac étincelant où meurent des sons de cloches.”

(Auteur à identifier)

http://i56.servimg.com/u/f56/18/68/61/25/800px-13.jpg La Fuite de Roi Gradlon - Évariste Vital Luminais


Musique :

Claude Debussy (1862 - 1918) : La Cathédrale Engloutie (Préludes pour piano, 1er livre) www.youtube.com/embed/JAVyKDDsM3s


Paul Le Flem (1881 - 1984) : La Magicienne de la mer (opéra) www.youtube.com/embed/vVy_UyyZjgk


Edouard Lalo : Le Roi d'Ys (opéra) www.youtube.com/embed/MxuKA4sXNkY (Ce morceau me semble être un [i]paraclausithuron [/i]typique, à creuser)


Heol Telwen : Dahut (black metal) www.youtube.com/embed/x2c392HL4k4


Nolwenn Leroy (2012) : Ahes www.youtube.com/embed/sBg-SR2lPSI


[i](Postérité dans la légende d'Azshara de World of Warcraft)[/i] Reine d'une extrême beauté, qui manoeuvre tout le monde à sa guise et vit dans les plaisirs du corps et de la nature, fait de sa cité de Zin-Asharaï le haut lieu des plaisirs et de la magie, pactise avec les démons et cause l'immersion de la moitié du monde suite à la destruction du Puits d'Eternité. Donnée pour morte, elle a survécu à ce cataclysme en se changeant en Naga, créature mi-femme, mi-poisson/serpent. Elle vivrait désormais dans la cité engloutie de Nazjatar. http://bestgamewallpapers.com/files/world-of-warcraft/azshara.jpg http://www.gameguyz.com/sites/default/files/pictures_images/02.05.2013/1367479586_1.jpg http://images.wikia.com/wowwiki/images/1/1d/Azshara_Nazjatar.jpg


Sources à étudier :

Charles Guyot, La Légende de la ville d’Ys, Coop Breizh, Spézet, 1998, (ISBN 2-84346-101-4) Théodore Hersart de La Villemarqué, Le Barzhaz Breizh, Coop Breizh, Spézet, 1999, (ISBN 2-909924-85-8) Thierry Jigourel, Merlin, Tristan, Is et autres contes brittoniques, Jean Picollec éditeur, Paris, 2005, (ISBN 2-86477-213-2) Anatole Le Braz, Magies de la Bretagne (tome 1), éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », Paris, 1994, (ISBN 2-221-07792-X) Françoise Le Roux et Christian-J. Guyonvarc'h, La Légende de la ville d’Is, éditions Ouest-France, coll. « De mémoire d’homme : l’histoire », Rennes, 2000, (ISBN 2-7373-1413-5) Emmanuel Salmon-Legagneur, Les noms qui ont fait l’Histoire de Bretagne, Coop Breizh/Institut Culturel de Bretagne, 1997, (ISBN 2-84346-032-8) et (ISBN 2-86822-071-1)