Au sujet de Gerald Gardner

De Wiccapedia

Frederic Lamond

Traduction Tof


Gerald Gardner passait les étés à son Musée de Sorcellerie sur l’Ile de Man, mais il a passé l’hiver 1957-58 dans son appartement de Holland Parc et a ritualisé avec notre coven à Bricket Wood. Après la petite fête, il avait l'habitude de nous raconter des histoires parlant de ce qui se passait avant la « période des bûchers ».

A cette époque, j'étais plutôt cynique au sujet de ces histoires et je me disais : « Le bon papy ! Il fait de gros efforts pour nous persuader qu'il y a une tradition remontant au Moyen-âge, voir même à l’Age de Pierre, alors que nous savons tous que c'est tout à fait impossible à prouver et que les traditions familiales actuelles ne doivent pas remonter bien plus loin que le revival occultiste des années 1890 ».[1]




Gerald Gardner n'a pas inventé une néo-sorcellerie, même si lui et Doreen Valiente ont regroupé les rituels du BoS en empruntant à la Franc-maçonnerie la Clef de Salomon au « Book of Law » et à la « Gnostic Mass » d’Aleister Crowley.

Ronald Hutton et Philip Heselton ont fait de nombreuses recherches et ont trouvé que le New Forest coven, où Gerald Gardner a été initié en décembre 1939 (ou peut être septembre), existait avant lui.

Ce n'était pas non plus l’unique coven néo-sorcier à cette époque. Quant à dire si le New Forest coven ou d’autres coven néo-sorciers existaient avant les années 1920, ou au maximum dans les années 1890, est une question que je laisse aux historiens.

Il n’y avait certainement que très peu, sinon aucun lien avec la sorcellerie de village traditionnelle, puisque Gerald Gardner n’y connaissait rien en matière de simples, de magie météorologique ou de la technique des chuchoteurs, qui étaient depuis toujours des techniques des sorcières de village en Angleterre et dans les autres pays d’Europe.[2]




Certains ont écrit que Gérald Gardner n'aimait pas la structure informelle du New Forest coven/groupe/ ou ce que vous voulez. Ce n'est pas vrai. Gérald Gardner n'était en aucune manière obnubilé par le rituel, il considérait le rituel que comme un outil dont les gens se servaient pour obtenir un état modifié de conscience. Son rituel d'initiation, tout improvisé qu’il puisse avoir été, lui a fait certainement une grande impression, puisqu’il a déclaré : « j’ai trouvé là tout ce que j'avais cherché toute ma vie ». Cela peut avoir été le rituel lui-même ou, peut être, c'était parce qu'il a été initié par une femme représentant la Déesse. Quand j'ai été initié, le but des travaux de Pleine Lune du coven était de lever de la puissance pour des guérisons et des guérisons à distance et parfois pour dépasser les ego. C'est tellement en opposition avec l'idéologie matérialiste Occidentale que Gérald Gardner a estimé que les gens issus de cette culture avaient besoin de rituels assez forts pour parvenir à un état modifié de conscience et ramollir leur incrédulité face à l'efficacité de la magie : d’où les rituels écrits dans le BoS. Mais, il a aussi écrit dans le BoS : « Lorsque vous aurez de l’expérience » (pour lever de la puissance et de l’envoyer) « vous pourrez graduellement vous détacher du rituel et finalement vous en passer totalement. Mais les nouveaux doivent pratiquer le rituel en entier ».[3]




J’ai lu une interview de Janet Farrar et Gavin Bone par Lilitu Babalon et je voudrais corriger quelques inexactitudes historiques dans les propos de Janet Farrar au sujet de Gerald Gardner.

1. Gerald Gardner n'a pas quitté la Malaisie pour retourner en Angleterre « juste après la Première Guerre Mondiale » mais en 1936.

2. Il n'a pas imaginé qu’un groupe de théosophes était composé de sorcières. Il a rejoint le New Rosicrucian Theatre de Christchurch dans le Hampshire. Parmi ses nombreux membres il y en avait trois - Edith Woodford-Grimes et les Mason - qui étaient aussi membres de ce qu'ils appelaient le New Forest coven. Edith (qu'il appelait Dafo), qui pensait qu'elle avait déjà connu Gerald Gardner, dans une vie antérieure l'avait invité à se joindre au coven, dont la GPs était une femme nommée Rosamund Sabine. Edith alias Dafo est devenue sa partenaire magique et l’est restée jusqu’en 1953, quand elle s'est retirée parce qu'elle avait très peur de la publicité suite à la publication de Witchcraft Today.

3. Le New Forest coven était un coven de sorcellerie reconstructiviste basé sur les théories de Margaret Murray. Qui en a eu l’initiative et à quelle époque nous ne le savons pas : cela a pu se passer n'importe quand entre les années 1890 et le début des années 1930.

Là où Gerald Gardner laisse courir son imagination c’est lorsqu’il parle d’une lignée intacte d’initiations issue de la sorcellerie des villages du Moyen-Age (ou même de l'Age de pierre) jusqu’au New Forest coven. Alors qu’en fait le New Forest coven et la Wicca contemporaine descendent de la franc-maçonnerie et donc en fin de compte de la magie babylonienne d'il y a 3000 ans. Il n'y a aucun lien avec la sorcellerie anglaise.

4. Dire que Clutterbuck|Dorothy Fordham née Clutterbuck était la GPs du New Forest coven était en réalité une plaisanterie de Gerald Gardner: Il essayait d’éloigner l'attention des gens vis à vis de Dafo qui était terrifiée par la publicité et peut-être aussi de Rosamund Sabine. Mais même si Dorothy Fordham était une bonne chrétienne, elle avait aussi un sentiment religieux vis à vis de la Nature (elle en parle dans son journal en 1943) et le New Forest coven lui était suffisamment sympathique pour qu’elle leur prête une de ses propriétés pour l'initiation de Gerald Gardner. La piété chrétienne et les techniques sorcières pour jeter des sorts ne sont pas nécessairement incompatibles.[4]




Le New Forest coven, dans lequel Gerald Gardner a été initié en 1939, n'était pas un culte mourant. C'était un coven de reconstruction sorcière basée sur les idées de Margaret Murray, qui a été fondé par les membres d'une loge magique quelque part entre 1890 et le début des années 1930.

Deux de ses membres, les Mason, étaient membres d'une « famille de tradition sorcière ». Cela signifie qu'ils ont appris des techniques magiques de leurs parents, mais cela ne veut pas nécessairement dire que ces parents les ont apprises de leurs propres parents. Les parents pourraient être entrés dans loge magique ou un coven de reconstruction sorcière un peu comme nous l’avons fait. Mais Gerald était convaincu et a essayé de convaincre ses lecteurs que les Mason étaient un lien initiatique avec la sorcellerie médiévale.

Selon Gerald Gardner, les autres membres du coven lui ont, pendant longtemps, refusé l’autorisation d'écrire au sujet de leurs pratiques. Quand enfin ils lui ont permis d'écrire le roman « High Magic's Aid » et plus tard « Witchcraft Today », ils l’ont fait à la condition que Gerald Gardner ne révèle ni leurs rituels ni leurs identités. Lorsque j'ai demandé à Gerald Gardner à quoi ressemblaient les rituels du New Forest coven, il a répondu : « ils étaient peu détaillés ! ». Cela signifiait probablement que, comme les éclectiques aujourd'hui, ils composaient des rituels selon leur inspiration et évaluaient leur efficacité pour créer de la puissance.

Mais Gerald pensait que ses futurs initiés ne seraient pas issus de cercles magiques et qu’ils auraient besoin de rituels plus élaborés pour être propulsés dans une réalité différente : c’est pour cela qu’il s’est inspiré de rituels de magie cérémonielle plus anciens pour son Livre des Ombres, rituels qu’il a ensuite proposé à ses initiés.[5]




Durant les huit années où j’ai fréquenté Gerald Gardner avant qu’il ne décède en 1964 jamais il n’a mentionné le nom de George Pickingill. Comme Gerald Gardner essayait toujours de nous convaincre qu'il y avait une lignée ininterrompue d'initiations du New Forest coven jusqu’au Moyen âge, il n'aurait pas hésité à mentionner un célèbre rebouteux de l'Essex s'il avait fait partie de cette lignée.

Le défunt Cecil Williamson (qui possédait le Musée des Sorcières à Boscastle, Cornouailles) m'a dit qu'après la publication d’« Aradia, Gospel of the Witches » par Godfrey Leland en 1898 et encore plus après la publication de « The Witch Cult in Western Europe » par Margaret Murray en 1920, de nombreuses loges magiques ont essayé de se renseigner au sujet de la sorcellerie des campagnes et ont envoyé certains d’entre eux rencontrer et interviewer tous les rebouteux dont ils entendaient parler.

Ces rebouteux racontaient à leurs « visiteurs magiques » ce qu'ils voulaient entendre mais ne livraient généralement aucun secret personnel. Comme George Pickingill était un rebouteux très connu, de nombreuses loges magiques ont dû aller le rencontrer et il a dû lui aussi raconter ce genre de choses. Cela les a incités à créer des groupes de sorcellerie reconstructiviste. Ce doit être là l’origine de l’histoire des neuf covens, car il est inconcevable qu'un simple fermier de l'Essex ait pu « contrôler » neuf coven de sorcellerie reconstructiviste dispersés un peu partout dans le sud de l’Angleterre et composés de magiciens instruits et distingués. Le New Forest coven dans lequel Gerald Gardner a été initié en 1939 était un groupe de sorcellerie reconstructiviste dont les membres étaient des magiciens de classe moyenne ainsi que fonctionnaires qui venaient des anciennes colonies. Ses fondateurs peuvent avoir rencontré George Pickingill (qui est mort en 1910) ou un de ses descendants, ou peut-être que pas.[6]




Selon diverses biographies de Gérald Gardner, il fut franc-maçon et membre de la Sphinx Lodge No. 113 IC de Ceylan et l’on dit qu’une partie des rituels Wica en sont issus. On retrouve des traces de cette adhésion sur les sites web de différentes loges maçonniques.

Cette Sphinx Lodge No. 113 IC de Ceylan existe toujours, mais son secrétaire actuel n’a pas retrouvé de détail concernant Gérald Gardner.

Selon ce secrétaire, il est fort possible que Gérald Gardner ait été membre d’une des deux autres loges maçonniques de la région, la Leinster Lodge 115 IC (qui tout comme la Sphinx Lodge se réunissait à Colombo) et la Dimbula Lodge 298 IC (qui se réunissait à Galle).

Selon la Sphinx Lodge, il est fort possible que Gérald Gardner ait été membre d’une de ces deux loges, mais qu’il ait reçu son grade le plus élevé dans la Sphinx Lodge.

Intéressons-nous donc à cette Sphinx Lodge.

Elle a été fondée le 16 février 1861 par les frères Arthur Hansnrow, Henry Thompson et Charles Henry Newton, Maître Maçon et Membre de la Queen's Own lodge No. 58, du 1er bataillon du 50e régiment royal de West Kent.

Cette loge était une émanation de la Grande Loge d’Irlande.

Le nom de Sphinx vient d’un des symboles liés à ce régiment.

Lors de sa création, cette loge comprenait aussi C. Tatham, W. P. Charsley, J. J. Marcel, W. Horn, W. Handcock, C. H. Stewart, R. Waddy et Whatley Venn.

La Sphinx Lodge No. 113 IC avait (et a toujours) ses quartiers sur l’Ile aux Esclaves depuis septembre 1901.

La construction du bâtiment actuel avait été prévue en 1897 pour commémorer le jubilée de diamant de la reine et aussi, et surtout, car le bâtiment où se réunissait les deux loges était situé sur un terrain militaire et le gouverneur avait demandé au Ministère de la Guerre de faire cesser cela. Il y a toutefois eu quelques retards liés à l’achat du terrain et au financement de l’opération.

Le terrain ne changea de main qu’en 1898 et la première pierre a été posée le 27 novembre 1900 à 19H15 par John Norman Campbell et le Victoria Masonic Hall fut inauguré le 5 septembre 1901.[7]


Sources

http://lapierresorciere.free.fr/

<references>