Magie des Cartes

De Wiccapedia

Magie des Cartes

Doreen Valiente

Traduction Tof


De nombreux ouvrages savants ont été écrits sur l’origine des cartes à jouer, pourtant cela reste un des mystères de ce monde.

Nous pouvons être à peu près certains que nos cartes actuelles viennent du jeu, bien plus élaboré, de Tarot. Mais dans leur forme actuelle, notre suite simple de cœurs, carreaux, trèfles et piques est très ancienne.

Il semble qu’elles viennent de France et datent du quinzième siècle lorsque les anciennes figures de Tarots ont été remaniées pour former un jeu plus simple à utiliser pour le divertissement. Dans son livre « Playing Cards : The History and Secret of the Pack” (Spring Books, Londres), W. Gurney Benham explique comment les cartes que nous connaissons aujourd’hui viennent du modèle des cartes produites à Rouen en France vers 1567.

Un jeu complet de Tarot consiste en 78 cartes, avec en plus des quatre suites habituelles une suite d’atouts, c’est à dire une série d’images symboliques ainsi qu’une carte supplémentaire dans chaque suite, le Chevalier. Avec le regain d’intérêt pour les matières occultes, les jeux de Tarots sont devenus accessibles aujourd’hui. Ces cartes ont été pendant longtemps utilisées en Europe continentale pour dire l’avenir, surtout pas les gitans. En Angleterre, pourtant, le jeu de cartes ordinaires était plus utilisé, car les cartes de Tarots étaient difficiles à se procurer. En conséquence, tout un savoir occulte s’est développé autour du jeu de carte à jouer.

Il est vraiment curieux que bien que le paquet de 52 cartes ne fut produit que pour jouer, il contient tout un symbolisme numérique lié à l’année et à la nature.

Les quatre suites correspondent aux quatre saisons : printemps, été, automne et hiver. Elles nous rappellent également les quatre éléments et les quatre vents. Les deux couleurs, rouge et noir représentent le jour et la nuit. Les 52 cartes représentent les 52 semaines de l’année. Les quatre suites de treize cartes chacune correspondent aux quatre saisons ayant chacune treize semaines. Les douze cartes représentant la cour sont comme les douze mois de l’année et les douze heures entre midi et minuit.

La somme des valeurs des cartes de l’as au dix est de 55. Si nous attribuons le 11 au Valet, le 12 à la reine et le 13 au roi alors le total de chaque suite sera de 91. Si l’on multiplie 91 par 4, cela donne un total de 364 pour l’ensemble du paquet – plus 1 le joker ce qui nous fait un total de 365, le nombre de jours dans une année !

De même, les quatre suites de treize cartes nous rappellent les quatre phases de la lune, la nouvelle lune, le premier quartier, la pleine lune et le dernier quartier. Ces quatre phases forment un mois lunaire et treize mois lunaires font une année.

Il y a de nombreux livres traitant de cartomancie ou divination par les cartes. La plupart de ces livres donnent différentes significations aux cartes, ce qui donne un résultat des plus embrouillés. Ainsi, dans ce texte je reviendrai sur ce qui est, aussi loin que je sache, le plus ancien texte imprimé sur la signification des cartes à jouer utilisées pour la divination. Dans un livre anglais en tout cas.

Ces significations et la méthode pour tirer les cartes sont données par Robert Chambers dans son livre en deux volumes, « The Book of Days : A Miscellany of Popular Antiquities ». Le premier tome, dans lequel on trouve l’article traitant des cartes, fut publié en 1869 par W. & R. Chambers à Londres et Edimbourg.

Robert Chambers est né en 18O2 et selon lui il a appris l’art de la divination par les cartes de la femme d’un militaire qui s’est occupée de lui alors qu’il était enfant. Cela a du se passer vers l’époque des guerres napoléoniennes. Si nous présumons que la femme du militaire a appris cette méthode lorsqu’elle était plus jeune, on peut raisonnablement penser que cela fait remonter l’origine de cette méthode au moins au dix-huitième siècle. En effet, les significations données pour les cartes elles-mêmes contiennent des preuves de leur ancienneté. Elles se réfèrent au danger d’un « duel », ou de « la mort sur un échafaud ». Les gens n’étaient confrontés à de tels risques qu’avant que le duel et l’échafaud ne soient bannis de notre système juridique actuel. De telles significations pour les cartes ne devraient être interprétées que de manière figurative.

Je pense qu’il est historiquement intéressant de donner les explications de Chambers avec ses propres mots. Il se réfère à cette méthode de lire les cartes sous l’appellation de « système anglais » et nous dit qu’on s’en sert : « sur la terre entière dans toutes les colonies britanniques, et fut sans doute emporté là-bas par les femmes de soldats, qui comme il est bien connu, sont des adeptes des plus habiles de cet art. De plus, c’est à la femme d’un soldat que nous devons attribuer les explications concernant cette méthode. Il y a de nombreuses années les exigences de la vie militaire, et les ravages dus aux épidémies de peste, ont fait que l’auteur, alors un enfant chétif mais plus très jeune, fut laissé de nombreux mois aux soins d’une femme de militaire affecté dans un pays éloigné. La pauvre femme, bien que sans enfant, a prouvé que la confiance qu’on avait placée en elle était justifiée. Elle était trop ignorante pour m’enseigner la lecture ainsi elle m’enseigna la seule chose qu’elle savait, l’art de « tirer les cartes » comme elle l’appelait. Elle n’avait probablement jamais entendu le mot cartomancie. Et même si je n’ai jamais pratiqué cet art de façon professionnelle, je n’ai pas oublié comme le montre l’interprétation des cartes qui suit.


L’Alphabet de l’Art

Carreaux

Roi : Un homme aux cheveux très clairs, prompt à se mettre en colère mais se calmant facilement.

Reine : Une femme aux cheveux très clairs, pleine de gaieté ainsi qu’une élégante.

Valet : Un parent égoïste et déloyal, beau et faux.

Dix : Argent. Succès dans une affaire prestigieuse.

Neuf : Une errance combinée avec une aventure prestigieuse et couronnée de succès dans un pays étranger.

Huit : Un mariage prudent et heureux mais plutôt tardif.

Sept : Attaque. Scandale. Des affaires désagréables.

Six : Mariage précoce suivi d’un veuvage.

Cinq : Nouvelle inattendue, généralement heureuse.

Quatre : Un ami sur lequel on ne peut pas compter.

Trois : Problèmes privés, querelles et chagrins.

Deux : Fiançailles dissimulées. Une carte d’avertissement.

As : Une bague de mariage. Une proposition de mariage.


Cœurs

Roi : Un homme aux cheveux clairs mais pas trop, un homme bon, une bonne nature, mais plutôt obstiné. Pas facile à calmer lorsqu’il est énervé.

Reine : Une femme aux cheveux clairs mais pas trop, loyale, prudente et affectueuse.

Valet : Un parent généreux. Un ami sincère.

Dix : Santé et bonheur avec de nombreux enfants.

Neuf : Richesse. Bonne position dans la société. La carte du vœu.

Huit : Beaux vêtements. Plaisir. Alliance dans la bonne société.

Sept : De nombreux bons amis.

Six : Courtiser chastement.

Cinq : Un cadeau.

Quatre : Problèmes privés causés par jalousie.

Trois : Pauvreté, honte et chagrin, causés par l’imprudence. Une carte d’avertissement.

Deux : Succès dans la vie, bonne place dans la société et un mariage heureux obtenu grâce à une discrétion vertueuse.

As : La maison de la personne pour qui on tire les cartes.


Piques

Roi : Un homme aux cheveux sombres, ambitieux et sans scrupule.

Reine : Une femme aux cheveux sombres, malveillante. Une veuve.

Valet : Un juriste. Une personne à éviter.

Dix : Honte, crime, emprisonnement. Mort sur l’échafaud. Une carte d’avertissement.

Neuf : Chagrin, ruine, maladie, mort.

Huit : Grand danger lié à l’imprudence. Une carte d’avertissement.

Sept : Pauvreté inattendue causée par la mort d’un proche. Un petit chagrin.

Six : Un enfant. Pour celui qui n’est pas marié une carte d’avertissement.

Cinq : Un grand danger parce qu’on se laisse aller à un mauvais penchant.

Quatre : Maladie.

Trois : Un voyage par la route. Larmes.

Deux : Un déménagement.

As : Mort, méchanceté, un duel, un malheur généralisé.


Trèfles

Roi : Un homme aux cheveux sombres mais pas aussi sombres que le roi de pique. Droit, sincère et affectueux.

Reine : Une femme aux cheveux sombres mais pas aussi sombres que la reine de pique. Agréable, élégante et spirituelle.

Valet : Un ami sincère mais plutôt emporté.

Dix : Richesse inattendue causée par la mort d’un proche. Un gros chagrin.

Neuf : Danger causé par l'éthylisme. Une carte d’avertissement.

Huit : Danger causé par l’avarice. Une carte d’avertissement.

Sept : Une prison. Danger venant de l’autre sexe. Une carte d’avertissement.

Six : Compétence dans l’industrie lourde.

Cinq : Un mariage heureux mais pas riche.

Quatre : Risque de malchance causée par la déloyauté ou un tempérament capricieux. Une carte d’avertissement.

Trois : Querelles. Ce peut aussi désigner trois ans, trois mois, trois semaines ou trois jours. Cette carte signifie aussi que la personne sera mariée plus d’une fois.

Deux : Humiliation, déception.

As : Une lettre.


Explications Supplémentaires

« Ce qui précède » dit Robert Chambers, « est essentiellement l’alphabet de l’art, les lettres des phrases formées par les différentes combinaisons de cartes. » Il continue ensuite avec les instructions sur la manière de tirer les cartes et comment les interpréter. La personne pour qui on tire les cartes est représentée par le roi s’il s’agit d’un homme ou une reine s’il s’agit d’une femme de la couleur représentant son apparence. Si c’est une femme mariée pour qui on lit les cartes, alors le roi de la même couleur représentera son époux et si c’est un homme marié pour qui on lit les cartes, alors la reine de la même couleur représentera son épouse. Dans le cas d’une personne célibataire, un amoureux actuel ou futur sera représenté par la carte de sa propre couleur.

Toutes les cartes représentant une personne perdent alors leurs significations. Ainsi par exemple le Valet de Pique peut représenter soit « un juriste » soit « Une personne à éviter » ou ce que pense le Roi ou la Reine de Pique. Tous les valets représentent les pensées de leur roi ou reine respectifs et donc les pensées des personnes représentées par ces rois et reines, selon leur physionomie. Il y a deux exceptions à ces règles. Un homme quelle que soit sa physionomie, s’il porte un uniforme militaire, sera représenté par le Roi de Carreaux. Une veuve quelle que soit la couleur de ses cheveux sera représentée par la Reine de Piques. « L’as de cœur représente toujours la maison de la personne pour qui on tire les carte, certaines règles générales s’y appliquent. Ainsi l’As de trèfle indique une lettre, sa position avant ou après l’As de cœur nous dit si la lettre arrive à la maison ou en vient. L’As de carreau s’il est proche de l’As de cœur annonce un mariage dans la maison mais l’As de pique annoncera maladie et mort. »

Le paquet de cartes devra être bien mélangé puis le paquet sera coupé en trois paquets par la personne qui souhaite connaître son avenir. La personne qui lit les cartes rassemble le paquet puis le pose sur la table par paquets de neuf cartes, face visible. Comme un paquet de 52 cartes n’est pas divisible par neuf, nous aurons cinq paquets de neuf cartes et un dernier paquet de sept cartes.

« Neuf est le nombre mystique. Chaque groupe de neuf cartes consécutives forme une combinaison séparée, qui est complète en elle-même, un peu comme un mot dans une phrase, un peu comme une fraction du grand mouvement du destin, de la même façon chaque carte, plus ou moins comme les octaves en musique, est liée avec la neuvième carte et ces neuvièmes cartes forment entre elles d’autres combinaisons de neuf. Chacune étant une partie du grand tout. »

C’est ce que disait Robert Chambers, dans un langage compliqué et suranné.

En pratique vous disposez votre paquet de cartes comme expliqué plus haut puis vous comptez les cartes à partir de celle représentant la personne pour qui vous lisez les cartes. Comptez la carte par laquelle vous commencez comme « un » et continuez à compter de la sorte de un à neuf. La neuvième carte étant la première du prochain comptage et ainsi de suite. Comptez de la gauche vers la droite un peu comme si vous lisiez les lignes d’un livre puis recommencez sur le dessus du paquet lorsque vous parvenez à la fin du paquet. Il arrivera un moment où vous retomberez sur la carte par laquelle vous avez débuté et cela conclura cette partie de la lecture.

Notez aussi quelle sorte de carte est à côté des cartes significatives et si ce sont des cartes de bon ou de mauvais présage. Cela peut modifier ce que vous aurez à dire sur leurs significations. Cherchez aussi les Valets qui représentent ce que pensent les gens ainsi que l’As de cœur qui est la carte « maison ». Ces cartes sont aussi liées avec la carte qui est à neuf cartes d’eux que l’on peut donc compter et déchiffrer.

Le Neuf de cœur est la « carte à souhait » selon qu’elle soit proche ou non de la carte de base, vous pourrez en déduire si un souhait particulier se réalisera ou non. Après qu’on ai lu l’avenir en général, on pourra faire une seconde lecture si celui pour qui on tire les cartes le souhaite et a une question particulière à poser et la réponse découlera de la position du Neuf de cœur comme cela a été décrit plus haut.

Comme dans tous les systèmes de divination, la pratique et l’expérience apporteront l’aisance à celui qui lit les cartes. Des questions frivoles ne recevront que des réponses frivoles. Bien sûr, une personne qui aura des facultés psychiques sera un très bon devin mais en même temps, la pratique de la divination si on la pratique consciencieusement aura tendance à développer les dons psychiques.

En décrivant la pratique de la cartomancie aux gens les plus pauvres de son époque, Robert Chambers affirmait qu’il croyait qu’en gros ceux qui s’y adonnent faisaient le bien. Elle apportait complicité et soulagement aux personnes en détresse et donnait souvent de bons conseils moraux. Plus encore, ils ne présentaient pas leur lecture comme une fatalité : « Ils prennent toujours soin de mettre en avant ce qu’ils appelaient « la carte d’avertissement » et incitaient leurs clients à se prémunir des dangers esquissés par les cartes sans être effectivement annoncés, car les dangers pouvaient être écartés en étant prudent et circonspect.

C’est une attitude sage à adopter par celui qui lit les cartes de nos jours. Prendre plaisir à faire peur aux gens en annonçant des deuils et des désastres imparables est totalement irresponsable. La divination est censée aider, sans cela elle n’a aucun sens.

Le système de cartomancie dont il a été question plus haut est certainement une relique du passé et en même temps il est éminemment pratique. Les sorcières de village s’en sont servies et probablement les gitans anglais aussi puisque ces derniers semblent moins habiles avec les Tarots que les gitans de Continent.

Il serait bon pour achever ce chapitre de décrire la bonne manière de pratiquer l’ancienne coutume de « croiser d’argent la main du gitan ». On en parle souvent mais on connaît peu sa véritable signification. C’est un vrai petit rituel pour se prémunir de la malchance que ce soit pour celui qui lit les cartes ou pour celui pour qui on les lit. Les gitans croient que l’argent est un métal sacré et magique qui protège du mauvais œil. De nos jours, malheureusement, l’époque des pièces en argent est révolue et les pièces dont nous nous servons ne sont qu’une imitation d’argent, mais c’est mieux que rien.

La personne pour qui on lit les cartes doit tenir la pièce entre le pouce et les doigts et tracer un X au-dessus de la main ouverte du gitan. Ils doivent ensuite placer la pièce au centre de la croix imaginaire et la laisser non pas simplement comme un paiement mais comme une offrande aux esprits qui, croit on, apportent leur aide lors de la divination. Un vrai devin gitan, approché de la sorte, même si le demandeur ne peut donner qu’une pièce d’argent de peu de valeur, essayera sincèrement de lui donner un message psychique.