La Mère Extatique

De Wiccapedia

La Mère Extatique, Portrait de Maxine Sanders, Reine Sorcière

R. Deutsch

Traduction Tof & Nephilim


Airline

Assise près de la cheminée, l’enfant aux cheveux roux regardait la flamme et voyait de petits êtres. Parfois, en jouant et sans vouloir leur faire du mal, elle plantait le tisonnier dans les charbons et ils grimpaient dessus et essayaient d’aller vers elle. Elle pouvait les voir et eux aussi sans doute car toujours ils la saluaient. Elle pensait donc que tout le monde pouvait les apercevoir. Avec l'innocence rusée d’un enfant, elle pensait que les petits êtres étaient un fait accepté mais dont on ne parlait tout simplement pas. Tout le monde savait qu’ils étaient là, c'était un peu comme si on savait que les dames allaient uriner quand elle s'excusaient d'aller se « repoudrer le nez ». Ainsi ces petits êtres avaient le droit d’exister sans qu’on ne les remarque. C’était peut être quelque chose d’embarrassant pour les adultes qu’elle voyait autour d’elle.

Ça aurait été certainement le cas si un des adultes avait entrevu ces élémentaux - des salamandres - qui habitent l’élément alchimique du feu. Mais jamais personne ne les entrevoyait. Et si cet enfant en parlait, ceux à qui elle s’adressait souriaient et répondait avec condescendance rassurante afin de rejeter cet univers des « contes de fées ».

« Quelle imagination! » disaient-ils en secouant la tête et étouffant de rage impuissante. Les salamandres étaient bien là, Arline Maxine Morris le savait déjà. Ils sont une véritable force surnaturelle et un élément puissant, parfois dangereux et ils peuvent causer des gros dommages s’ils s’opposent aux adultes « normaux, rationnels ». Pour l’enfant aux cheveux roux, ils étaient bienfaisants, ou tout aussi bienfaisants que les salamandres pouvaient l’être.

Presque trente ans plus tard, j’allais pénétré dans son appartement de Notting Hill Gate et j’allais voir un tapis en très mauvais état. Les petits êtres l’avaient attaqué, mais il n’y avait pas de feu, sauf celui de la plaque électrique, « physiquement, normalement » présent. L’élément de Maxine Sanders est le feu.

Au milieu d’une nuit, Arline s’est réveillée au son d’une bagarre dans la cuisine au-dessous de sa chambre. Elle s’est glissée dans l’escalier et a vu son père, Victor, qu’elle avait appris à craindre et redoutait sa violence (un trait de caractère qu’elle n’a toujours pas perdu encore aujourd’hui). Il était en train d' agressé un homme qui avait tenté de tricher aux cartes. L’homme reculait comme le fait un tricheur, la vaisselle volait dans tous les sens et la lutte n’a cessé qu’à l’aube quand son père, épuisé, en est sorti vainqueur. « Bon Dieu… » a proféré l’inconnu malgré une lèvre fendue, « bon dieu quelle bagarre, Vic. Je ne tricherai plus jamais ». Maxine Sanders avait vu beaucoup de violence. Elle détestait la violence, mais ce qu'elle détestait encore, c'était les tricheurs. A l’âge de dix ans, déjà grande pour son âge, rousse et arrogante, elle avait gagné une centaine de livres en participant aux parties de poker de son père qui était un joueur professionnel. La vie de la famille d’Arline (Victor, Dorsi, Arline et sa sœur cadette) alternait entre richesse et extrême pauvreté . Dès son plus jeune âge, elle avait appris à s’attendre à l’inattendu. Lorsque son père avait une fois de plus tout perdu, Arline décidait que trop c'était trop: elle avait pris les cent livres et avait acheté un chalet à sa famille. Ainsi la propriétaire de dix ans avait amené triomphalement sa famille dans leur nouvelle maison.

L’élément de hasard a toujours joué un rôle important dans la vie d’Arline, une des motivations de Maxine à devenir une sorcière a été le désir de contrôler son propre destin. C’est probablement vrai pour la plupart des personnes qui deviennent Sorcières, croyant qu’ils apprendront à voir l’avenir et contrôler les gens et les événements de façons mystérieuses. Ils le peuvent, bien sûr mais le chemin n’est pas facile.

J’ai entendu Maxine décrire la sorcellerie comme une religion de prospection. Il y a d’une part le fait qu’après des centaines d’années de persécutions, les Wicca ont dû reconstruire leurs traditions en partant d’éléments fragmentés. D’autre part, il y a aussi le fait que traditionnellement la sorcière représente l'oppression. Jeanne d’Arc et Robin des Bois, qui étaient vraisemblablement des sorciers, auraient bien compris l’Evangile d’Aradia :


Vous qui êtes pauvres et affamés,

Et souffrez dans la misère et subissez

Souvent l’emprisonnement, et pourtant avec tout cela

Vous avez une âme ...


Chaque fois que vous aurez besoin de quoi que ce soit,

Une fois dans le mois, et mieux encore

Lorsque la lune est pleine,

Vous vous réunirez quelque part dans une forêt,

Pour adorer l’esprit puissant de votre reine...

Et vous serez tous libérés de l’esclavage,

Et alors vous serez libre en tout.


La jeune fille rousse assise près de la cheminée considérait l’imprévisibilité presque comme une amie. Parfois, elle disparaissait de la maison pendant plusieurs jours; elle volait un cheval et dormait dans une grange. Grâce à ses gains gagnés au poker, elle étaient peut-être la seule fille dans le couvent à avoir payer ses propre frais de scolarité.

Aujourd'hui, quand vous voyez Maxine battre un jeu de cartes de Tarot vous savez que vous êtes en présence d’une joueuse ou plutôt d’une ancienne joueuse qui est fatiguée de prendre des risques et de ne jouer que pour gagner. La plupart de ceux qui tirent les Tarots traitent leurs cartes avec une piété exagérée, ce qui est très différent du véritable respect que l’on doit montrer envers le Divin. En n’utilisant que les Arcanes Majeurs, Maxine prend son Tarot de Waite en main et le mélange d’une façon qui ferait la fierté d’un joueur sur les bateaux à l'aube du Mississippi. Vous vous demandez si elle ne va pas étaler les cartes puis de suite les retourner !

A dix ans, elle perdait rarement une main. Lorsqu’elle vous dit votre avenir, elle est généralement voire étonnamment précise.

L’enfance erratique de Maxine a donc révélé une partie de ses indéniables pouvoirs psychiques. Même si Arline ignorait qu’elle était quelque part « différente », elle avait des capacités psychiques depuis sa plus tendre enfance. Beaucoup d’enfants en ont en fait. (Au cours de ma propre enfance à la campagne, j’avais l’habitude de rentrer des forêts environnantes en parlant d’une de mes amies à ma mère amusée: un gnome ou un esprit de terre, dont le nom était Aggie).

Arline avait la chance d’avoir une sorcière naturelle, Dorsi, comme mère. Bien que son père était furieusement sceptique quand il s’agissait de problèmes religieux, l’influence de Dorsi formée par Subud a prévalu dans l’éducation d’Arline. Arline a conservé ses pouvoirs psychiques en partie parce que personne n’a jamais eu l’occasion de la convaincre qu’elle n’en avait pas. Ajouté à ça, l’instabilité de son enfance - dont une grande partie s’est déroulée suite à des séries de « circonstances extraordinaires » - a laissé son talent naturel psychique intact.

Les pouvoirs qualifiés de surnaturels ou magiques ne sont souvent ... pas sélectionnés par le système nerveux ... le cas échéant pour entrer dans la gamme de nos facultés. Ils peuvent être cultivés par la discipline qui permet de surmonter le processus normal d’élimination. Ils peuvent aussi apparaître sous la contrainte comme dans le cas d’un garçon de dix ans dont le frère a été coincé sous un arbre qui était tombé. Terrifié, il a soulevé l’arbre pour libérer son frère avant d’aller chercher de l’aide. On a ensuite constaté qu’une douzaine d’hommes ont été nécessaires pour déplacer le tronc que le garçon avait soulevé ... seul. Il y a de nombreuses histoires de ce genre. Les pouvoirs qu’elles décrivent sont libérés dans des circonstances extraordinaires.

(Jean Liedloff, « The Continuum Concept », Duckworth, 1975, p.38.)

Des années plus tard, Maxine s’est retrouvée orpheline, expulsée, affamée et de façon surprenante, des juifs lui jetaient des pierres car ils n'appréciaient pas la présence de quelqu'un dont les opinions religieuses différaient de la leurs. La presse, qui l’avait prise en photo nue lors d’un rituel sans qu’elle ne le sache ou ne donne son consentement, s’était moquée de tout ce à quoi elle croyait. Ses amis se sont éloignés d’elle. Elle pensait qu’elle était devenue une trainée, mais ne l’aurions-nous pas tous pensé ? Puis, dans des « circonstances extraordinaires », elle a découvert sa capacité incroyable à détacher sa conscience de son corps et ouvrir des portes verrouillées simplement en le désirant. Cela lui a donné accès au bureau d’un homme qui lui enseignait les « disciplines qui permettent de surmonter le processus normal d’élimination ». Il s’agissait d’Alex Sanders et il n’était pas du tout amusé par la disparition de pain et d’ haricots en conserve dérobés par son élève un peu trop précoce. A cette époque, il ne savait même pas qu’il était amoureux d’elle, il la formait pour qu’elle soit la partenaire d’une sorcière prénommé Paul. Mais il en sera question plus tard. Le fait est que les capacités psychiques de Maxine ont certainement été renforcées par les inquiétudes de son enfance. La faim, dont elle a souffert pendant de longues périodes, peut provoquer des hallucinations qui permettent de s’évader de la dure réalité, elle peut aussi produire l’inverse de l’illusion, la clairvoyance.

Il est intéressant ... que des personnes dont la faculté de rédaction a été quelque peu endommagée, temporairement ou définitivement, sont devenus clairvoyants ... Si les limites normales de la perception humaine sont brisées, c’est généralement lorsque les émotions sont tirées jusqu’à leurs limites. (Ibid.)

De nombreux clairvoyants, ou des personnes qui ont d’autres pouvoirs psychiques, ne sont pas religieuses. Uri Geller, qui selon moi est à moitié authentique et à moitié fourbe en est un exemple. Mais le passé d’Arline, aussi divers qu’il ait été, n’a pas laissé d’autre choix de développer sa personnalité. Elle a grandi dans la stricte tradition catholique et ça aussi, ça a été crucial. « L'importance de la religion - ou au moins la conviction qu’une grande importance y est attachée – m’a été imposée. Quand j’avais dix ans, j’ai fait ma confirmation catholique. Ce fut un tournant dans ma vie. Le jour où ça c’est passé, je devais probablement faire quelque chose de tout à fait normal pour une enfant de dix ans, comme arracher les pattes et les ailes d’une mouche pour satisfaire ma curiosité biologique. Quand tout à coup, j’ai été emmenée à l’église pour être giflée par un évêque. »

La description par Maxine de cette expérience et le choix des détails qu’elle en a donné sont des plus éclairants. Elle a déclaré publiquement que si un jour elle renonçait à la Sorcellerie, elle retournerait à l'Église catholique. La Sorcellerie, en tout cas la Tradition Alexandrienne, autorise ses membres à aller et venir plus ou moins comme ils l’entendent. Autrefois les mesures de la sorcière initiée et une mèche de ses cheveux ou une goutte de sang étaient pris pour faire en sorte que, une fois le serment donné, il ou elle ne pouvait jamais partir. La magie sympathique y veillait. A l’époque où l’Inquisition a méthodiquement massacré neuf millions d’hérétiques et de soi-disant sorcières dont beaucoup n’étaient ni hérétiques ni sorcières, mais avaient avoué sous la torture, le serment d’allégeance était bien plus qu’une plaisanterie subtile pour impressionner l’initié. C’était une question de nécessité, si les fidèles de l’Ancienne Religion voulaient survivre. Toute personne quittant la Sorcellerie, quelle qu’en soit la raison, pouvait être tentée de parler, il y avait une récompense pour la tête d’une sorcière. L’attitude de l'Église Catholique envers ses « enfants » vient peut être de ce qu’elle a elle-même subi à ses débuts. J’ai moi aussi été baptisé, j’ai fais mes communions et je suis même resté brièvement dans un séminaire des Oblats, et je puis assurer au lecteur que, une fois que vous êtes pris dans leur serres, il vous est presque impossible de vous en échapper. Les pressions psychologiques pour vous forcer à rester dans l'Église sont suffisantes pour imposer aux hommes à se « repentir ». L’institution qui autrefois a eu le pouvoir d’obliger l’empereur Henri IV à se rendre pieds nus à Canossa, ne restitue pas son pouvoir avec le sourire. Lorsqu’on a demandé à Federico Fellini s’il était catholique, il a répondu : « Je suis né en Italie. Si vous êtes né dans l’eau, êtes-vous un poisson ? » Arline est née dans l’eau bénite (l’expression est « née à nouveau »). Son instinct de conservation a toujours été considérable, elle a vite appris à nager.

« Avant cette époque, [sa Confirmation] pour moi la religion c’était tout le monde qui va en trottinant à la messe le dimanche matin, souffrant d’une grosse gueule de bois et d’un complexe de culpabilité encore plus grand en confessant un comportement des plus choquants et obtenant l’absolution grâce à de fausses repentances. Ce rituel culminait normalement par des chœurs d’anges célestes chantant « Jésus veut de moi comme rayon de soleil » en mettant furtivement une ou deux pièce de monnaie dans le panier d’offrandes comme contribution au pèlerinage de 14 jours à Lourdes du Père Mary O'Callaghan - en passant par Nice, Cannes et Monte-Carlo – au cours du mois de juillet. » La rédemption totale des péchés était une bonne aubaine spirituelle que l’on payait d’une heure de son temps le dimanche matin. Puis, soudain, je me souviens, le mâle fou piétinait à la porte de l'église et « Marie Mère du Christ! Pat, les bistros vont ouvrir dans un quart d’heure ». Et le Père O’Callaghan criant ce qui pouvait aussi bien être un pardon : « J’espère vous voir la semaine … prochaine ... mon fils ... »

L’enfant précoce aux cheveux roux qui allait devenir la Reine des Sorcières de un mètre quatre-vingt, une superbe blonde dont la notoriété deviendra internationale, est décrite comme une énigme totale par quelqu’un qui, pourtant connaissait toute sa vie mais est mieux comprise à la lumière de son éducation catholique.

Les plaisirs de la chair assurent que ce rituel, qu’on qualifie de Messe, soit un automatisme hebdomadaire et c’est un événement bien hypocrite. Tout le monde aime tout le monde et pas nécessairement de façon platonique. J’ai vite appris que ce n’est pas la chair qui est faible : c’est l’homme qui l’est.

Sa confirmation fut pour Maxine son « premier souvenir spirituel », « le sentiment de sécurité spirituelle, d’être un soldat de l’armée du Christ, était suffisant pour m’aider à lutter contre les puissances des ténèbres ». En tout cas elle le pensait.

Cinq ans plus tard, elle a rencontré un homme qui était censé avoir menacé de détruire l'Église Catholique si elle n’était pas plus aimable avec lui. Ce n’était qu’une blague, un autre exemple de son merveilleux sens de l’humour diabolique, mais il a reçu un certain nombre de lettres d’Irlande du Nord lui demandant d’arrêter.

Les « puissances des ténèbres » doivent être combattues par les supposés « pouvoirs de lumière », « l’armée du Christ ». On dit que c’est St Ignace de Loyola, le fondateur de la Compagnie de Jésus, qui a inventé l’expression « armée du Christ ». Ancien soldat lui-même, c’est fort possible. Personnellement, je trouve cette idée répugnante et vraiment effrayante. C’est cette « armée du Christ » qui a conspiré pour assassiner Elisabeth Ière, avec du poison semble-t-il. Il n’a fallu que quelques brigades de « l’armée du Christ » pour détruire ces millions de « Sorcières et d’hérétiques » avec la plus terrible cruauté et ce n’est pas une invention. Des sentiments comme ceux-ci ont été inculqués dans le cerveau de la petite Airline lorsqu’elle avait dix ans :

Ma prière fera que j’aurai honte de moi en pensant que j’ai souvent mérité la damnation éternelle à cause de mes nombreux péchés, alors que beaucoup ont été perdus par un seul péché. Par un effort de ma mémoire, je me souviendrai du premier péché, celui des anges, ensuite, j’utiliserai ma raison pour réfléchir à tout cela afin de développer en moi un sentiment de honte absolue. Laissez-moi regarder la saleté et la laideur de mon corps. Laissez-moi de me voir comme un exécutant ulcéreux utilisant chaque poison horrible et dégoûtant.

(in « Les Exercices Spirituels St Ignace de Loyola »).

Des choses adorables pour une magnifique enfant de dix ans, qui avait envie de se promener dans les bois avec un chien de compagnie, ou « d’emprunter » un cheval, ou encore de rester seule dans sa chambre à apprendre l’extase de son propre sexe. Maxine Sanders n’a jamais perdu un reste étonnant de pudibonderie provenant de ce conditionnement précoce : on a fait remarquer ailleurs que « dégénérés » est son insulte la plus cinglante. Elle a aussi un zeste de cruauté, à la Ignace de Loyola, qui semble souvent impossible à concilier avec la femme épuisée qui a passé une semaine sans beaucoup dormir et à s’occuper d’un parfait inconnu qui était en train de mourir à l’hôpital: ce dernier ne s’est jamais réveiller pour la remercier.

Voila pour moi, l’auto-contradiction du christianisme organisé : son premier précepte c’est: fais le bien ou je te tuerai. Si tu n’es pas parmi les fidèles, un membre de l’armée du Christ, un adepte des forces de la lumière, éloignant avec une torche les forces des ténèbres, alors tu es damné.

Techniquement, Arline n’a pas été baptisée avant l’âge de sept ans, mais sa mère était catholique, elle était aussi membre d’autres groupes religieux. Le passé catholique de Maxine s’affiche parfois de façon incongrue, son autel de sorcière est souvent orné d’une statue de Saint François. Mais dans la plupart du temps l’éducation catholique insuffle à l’enfant, pratiquement dès sa naissance, des sentiments tels que ceux que j’ai cités plus haut.

Si tu n’es pas ce que la sainte Mère l'Église dit, alors tu as tort.

Si tu n’es pas catholique, tu es une sorcière.

« Il suffit de dire qu’à un moment je savais que la terre était plate, que le Père Noël existait vraiment et que plus tard j’étais certaine que l’on pouvait tomber enceinte en s’asseyant sur une chaise que venait de quitter un jeune homme. »

Cinq ans après sa confirmation : à l’époque où elle savait qu’elle pouvait tomber enceinte et désigner comme père un fauteuil, alors qu’elle écoutait avec sérieux les religieuses qui lui disaient d’avoir avec elle trois journaux si elle voulait s’asseoir sur les genoux de son jeune époux lorsque les mêmes religieuses lui ont assurée qu’il était dangereux de marcher dans une flaque d’eau boueuse, car un homme pouvait voir sa culotte dans le reflet, à cette époque elle allait rencontrer un homme qui allait modeler toute sa vie.Pourquoi précisément trois et non pas deux ou quatre journaux? Comme s'ils pouvaient arrêter un homme se transformer en animal, elle ne pouvait que l’imaginer. Ses dix premières années avaient été chaotiques, mais pas vraiment malheureuses et elle avait déjà développé un gout de l’aventure qui ne l’a jamais quitté. Il est vrai que ces années avaient été remplies de bouleversements, déménageant sans cesse, vivant dans un cadre somptueux un jour et dans un taudis le suivant, jouant au poker toute la nuit et assistant à des séances de spiritisme à la demande insistante de sa mère à un âge où la plupart des filles rêvaient d’Elvis Presley. Elle affirme aujourd'hui qu’elle a des difficultés à relier les évènements de son enfance avec des lieux.

A quinze ans, elle a été présentée à Alex Sanders ou re-présentée, puisqu’il l’avait connue quand elle n’était encore qu’un bébé. Il n’est pas le Père Noël, mais c’est un sorcier et un magicien. Et il est tout à fait réel, bien réel.

Dorsi

Lors d’une après-midi ensoleillée mais fraîche à Manchester, une femme dont le nom était Doris mais dont le surnom était Dorsi - probablement que la combinaison de son prénom et de son nom, Doris Morris, était un peu trop sonore – marchait au centre de la ville et se rendait dans un petit café populaire auprès de l’intelligentsia de Manchester. C’était près de l’université. Elle se déplaçait, comme d’habitude, avec autorité, sa taille, ses traits forts et ses cheveux blonds lui donnaient un air de royauté. (On dit que Maxine est une descendante directe de l’un des plus « chauds » rois d’Angleterre. Ses photos, lorsqu’on les compare à celles du monarque en question, ont tendance à faire réfléchir. Le titre de Reine Sorcière peut lui convenir à plus d’un titre.)

Dorsi, de sang royal, mais épouse d’un joueur professionnel, était maintenant en route pour une réunion secrète. Elle aimait les après midis à prendre le thé, jouer au bridge à 4, les aspidistra plantées dans des pots de chambre victoriens, les stars de cinéma et les échecs cinématographiques, la Vénus de Botticelli, le catholicisme romain, les putains des deux sexes, les bons à rien de toute nature, le Spiritualisme et le mysticisme oriental. C’était une femme difficile à ignorer, mais selon toutes les descriptions qui sont faites d’elle c’était une femme belle et gracieuse. Elle a été l’unique grande influence sur Maxime avant qu’Alex arrive dans la vie de sa fille. Dorsi est entrée dans le Seven Circles Café, elle s’est assise, à une petite table au fond et a commandé un thé. Elle a aussi fait un signe de la main au garçon qui ne pouvait pas ne pas comprendre. Le café était la façade de Subud, un culte dont Dorsi était une initiée suite à l’une de ses réunions œcuméniques devant un thé. Le symbole du culte était devenu le nom du café. Le bâtiment appartenait et était géré par un homme qui avait joué un rôle important dans la fondation du mouvement britannique. Prendre le thé était une bonne couverture, parce qu’elle pouvait passer sans se faire remarquer par le reste de la clientèle. Comme les réunions de Subud pouvaient durer plusieurs heures, la nourriture était bonne.

Elle s’est levée, a payé, puis est passée à travers un rideau de perles à sa gauche. Elle avançait avec la fraîcheur d’une secrétaire au milieu d’une odeur composée d’un mélange d’urine, de savon et de désinfectant et au bout du couloir elle est arrivée à une porte :


STRICTEMENT PRIVE

DIRECTION ET PERSONNEL UNIQUEMENT


Cette porte était le seul moyen d’accéder à toutes les autres parties du bâtiment. Le café lui-même était au rez-de-chaussée. Le Temple Subud était au troisième étage, mais seuls les adeptes formés y avaient accès. Dorsi se dirigeait vers le cinquième étage, celui destiné aux nouveaux initiés. Mais la porte ne voulait pas s’ouvrir.

Derrière elle il y avait Alex Sanders qui était aussi un nouvel initié. Il est resté une minute à la regarder avec amusement essayer d’ouvrir la porte. Il était arrivé derrière elle comme un chat, furtif comme lui seul pouvait l’être. Voir Dorsi énervée par quoi que ce soit valait la peine d’être contemplé pendant une minute.

« Permettez-moi d’essayer. » Il a ouvert la porte en donnant un mouvement rapide à la poignée.

« Oh, mon Dieu! Pas vous. » Elle regardait la porte. « J’espère que la pourriture ne s’est pas installée ici. » Ils savaient tous les deux qu’elle ne pensait pas à la porte.

« Je me souviens de la dernière fois que je vous ai vu. C’était à cette séance spirite à Urmston quand cette pauvre fille est tombée en transe. Cette médium a eu une grosse crise. J’ai décidé de partir quand elle a mordu le pied de cette table magnifique. Vraiment, j’espère qu’il n’y a pas eu trop de dégâts. Je veux dire à la table régence.»

Alex a souri. La séance avait bien été une réussite et la jeune fille était parvenue à entrer en contact avec le monde astral. Mais comme elle était épileptique et qu’elle n’aurait pas dû servir de médium, elle est entrée en transe et peut-être qu’une entité spirituelle, pas vraiment favorable si on en juge par ce qui s’est passé, a immédiatement pris possession d’elle. La demoiselle a commencé à se déplacer en pleurant dans la pièce en brisant tout sur son passage, en rongeant les meubles et en poussant des grognements comme ceux d’un loup-garou dans un film d’horreur. Brusquement, même l’impitoyable Dorsi a quitté les lieux complètement terrorisée. S’agissait-il d’une véritable possession ou d’une simple crise d’épilepsie ou les deux il est impossible de le dire. Seul Alex et la sœur de la jeune fille sont restés pour tenter de la freiner jusqu’à ce que, finalement, elle se jette à terre et commence à respirer à nouveau normalement.

Alex et Dorsi ont emprunté l’escalier délabré.

« Eh bien » a dit Dorsi, qui avait rejeté l’incident de la jeune fille au rang d’un vague souvenir d’indigestion. « J’ai lu quelque chose à votre sujet et de votre magie noire. J’espère que vous n’allez pas en faire ici. Ou est-ce votre intention ?

« Oh, ici et là. » La conversation avait pris un tour courant chez Dorsi. Maintenant il allait être bon pour lui dire « Non, Lady Bracknell (un personnage de la pièce « L'Importance d'Etre Constant » d’Oscar Wilde), j’ai laissé ma Magie Noire dans un sac à main à Victoria Station - la ligne de Brighton. » « La ligne, M. Sanders, est sans importance. » Alors qu’ils montaient l’escalier, l’air devenait de plus en plus lourd, les grosses taches décolorées des deux côtés montraient comme l’immeuble était humide. Le café lui-même avait été décoré pour convenir au goût des Bohêmes des années 50, mais le bâtiment en lui-même était en mauvais état. En arrivant au troisième étage, on y voyait un peu plus clair. Il y avait une seule ampoule et le papier peint bon marché était orné de croissants.

Ils se sont arrêtés à un vestiaire au quatrième étage.

« Hello » a dit une voix derrière eux. Un bruit d’eau indiquait que la personne se lavait les mains. Il est venu, il avait les cheveux teints en châtain et un soupçon de maquillage. « Je suis à vous dans une minute. » Il est retourné dans la pièce.

« Si j’avais su que nous allions danser, j’aurais emporté mon tutu », a murmuré Alex dans un souffle – enfin c’est ce qu’il pensait.

« Fripons ! Fripons ! Prenez vos chaussures les filles. Aux réunions tout le monde porte des sandales ». Alex et Dorsi ont chacun reçu une paire de sandales argentées sans bride arrière. Ils ont franchi une porte où été noté :


STRICTEMENT PRIVE.

NUL N’EST ADMIS SANS AUTORISATION.


Au-delà il y avait un escalier étroit.

La religion Subud, qui prétend être compatible avec toute autre religion est en réalité surtout un culte musulman. Subub a été fondé dans la première moitié du XXe siècle. Pak Subuth, un musulman, a connu une révélation extatique qui semble avoir été liée à l’élément du feu. Il a formé le mouvement Subud en 1933.

De nombreuses autres histoires ... lui sont arrivées ... et le contentement euphorique qui a commencé à emplir sa vie l’a convaincu qu’il avait un grand don spirituel qui, s’il se propageait, pourrait bénéficier à toute l’humanité. Il a constaté qu’il pouvait être transmis et que quand deux ou trois personnes sont réunies, ce don était particulièrement contagieux.

(in « Angels and Ministers of Grace » de M.J. Field, Longman, 1971.)

Les réunions d’adeptes et d’initiés Subud sont appelées « latibans ». En théorie, les adeptes de Subud se réunissent deux fois par semaine, mais ce n’est pas toujours possible et, comme dans la Wicca, ce n’est pas indispensable. Les sorcières peuvent ignorer les dates prévues de culte sans craindre les flammes de l’enfer et le soufre alors que les catholiques, jusqu’à récemment, ne le pouvaient pas. Bien que les sorcières savent que d’excellentes sources d’énergie psychique et même d’illumination sont à leur disposition lors des grands festivals, dans le cercle Alexandrien en tout cas, il n’y a pas de participation obligatoire.

A Subud, le premier travail de l’initié est de briser sa personnalité extérieure, sa résistance à l’expérience personnelle du divin et de prendre conscience que le royaume de Dieu est bien en lui. Pour le dire de façon aussi simple que possible, l’initié doit réaliser que ce qu’il a toujours considéré comme une force « extérieure » est aussi en lui et qu’il n’y a aucune différence entre les forces « externes » et les forces « internes » : tout dans la création est intégré. Ce n’est pas sans rappeler la Charge Wiccane de la Déesse Mère Extatique où elle dit que si ses adeptes ne la trouvent pas en eux « vous ne me trouverez sûrement pas. Car j’ai été avec vous depuis le début. »

La deuxième tâche de l’initié Subud est de prêter sa concentration, en travaillant en groupe, aux agissements du Cercle Intérieur. Mais le groupe n’est pas autorisé à être présent dans Cercle Intérieur.

Une observation intéressante sur les résultats de l’entraînement Subud a été faite par le professeur Mottram dans « The Physical Basis of Personality » Penguin, 1952. Il écrit : « Il y une libération des tensions physiques et psychologiques ... Plus tard, ce peut être une véritable évaluation, souvent humiliante, de la personne dans sa vie de tous les jours, ce qui à son tour produit une disparition de la volonté et de la vanité. »

Subud pratique aussi de ce que les magiciens occidentaux appellent l’Hermétisme – c’est-à-dire la modification d’événements dans le monde « réel » par la seule utilisation de l’énergie mentale, sans avoir recours aux pratiques de la magie rituelle. (Les hermétistes ne considèrent pas ces « pratiques » à la légère ou sans beaucoup de respect, ils préfèrent tout simplement prendre un raccourci.) La Science Chrétienne n’est pas très éloignée de Subud ou de l’Hermétisme, ni, même si cela doit faire que Mary Baker Eddy se retourne dans sa tombe, de l’enseignement d’Aleister Crowley. Ce que l’esprit modifie peut devenir réalité, une fois que la volonté et l’imagination ont été mises en œuvre. Comme l’a dit Crowley dans « Magick in Theory and Practice » : « Toutes les forces de l’Univers sont capables de se transformer de façons appropriées en un autre type de forces. L’utilisation de la magie dépend de l’acceptation de l’idée que la « réalité » est un terme relatif. Tout le monde est naturellement clairvoyant, mais développer sa propre clairvoyance dépend en grande partie de l’apprentissage de comment penser en fonction de nouvelles perspectives du temps, de l’espace et de la perception.

Dorsi ne doutait pas de la véracité de cela, sauf dans certains cas : Arline le savait à chaque fois qu’elle voyait les petits bonhommes et Maxine le sait à chaque fois qu’elle lit les cartes.

Alex et Dorsi ont monté les marches.

Avec leur arrivée, la réunion a été ouverte par le président de séance, un Oriental. Chaque « aide », comme sont appelés les initiés, a pris sa place assignée. Alex et Dorsi étaient en probation pour six mois comme c’était demandé à toutes les nouvelles recrues. Alex était placé à la gauche de Dorsi, il y avait trois personnes entre eux deux. Autour de Dorsi il y avait une asiatique et un noir. Il y avait en tout treize aides.

La nature de la réunion du jour a été expliquée par le maître. Il n’y a pas eu de conférence, chaque assistant devait concentrer toutes ses énergies positives sur la magie qui se pratiquait deux étages plus bas. Le but du travail n’a pas été expliqué. Le travail peut prendre quinze minutes mais il peut aussi durer jusqu’à la nuit. Les travaux ont commencé.

Alors que la réunion de Subud continuait avec les treize aides concentrant toute leur attention sur le centre du cercle magique plus bas, Alex a soudain pris conscience d’une présence derrière lui.

La réalité des pouvoirs de clairvoyance d’Alex Sanders a été démontrée à de nombreuses reprises. Il avait commencé à développer son don de double vue à l’âge de sept ans, quand il avait été initié par une sorcière, sa grand-mère de soixante-six ans. Il a rapidement appris que la voyance peut vous causer des ennuis si vous n’êtes pas discret sur la façon dont vous l’utilisez. Une fois, sur un terrain de jeu, il eut une vision où l’un de ses camarades semblait avoir une drôle de jambe supplémentaire. Il a réalisé que la jambe était en plâtre. « Tu vas te casser la jambe », a-t-il dit à l’enfant. Il s’est fait frapper en guise de remerciement. Deux semaines plus tard, le garçon est tombé d’une balançoire et s’est cassé la jambe.

Lors de la réunion de Subud la vision clairvoyante d’Alex semblait avoir des ailes. Il n’a rien dit lorsque la présence s’est placée à quatre places à sa droite et s’est mise à flotter derrière Dorsi. Astralement, pour l’œil intérieur d’Alex, l’ange a pris l’alliance de la main gauche de Dorsi pour la placer à sa main droite, puis a disparu aussi mystérieusement qu’il était arrivé. Alex savait ce que cela signifiait.

Après la réunion, Alex et Dorsi ont rendu leurs sandales, repris leur manteau et tous les deux épuisés ont décidé de descendre prendre un petit rafraîchissement.

« Un ange m'est apparu au cours de la réunion », a dit Alex.

« N’importe quoi ».

« Ca avait un rapport avec vous » a continué Alex en se frottant les yeux. « Voulez-vous que je vous en parle ? »

« N’importe quoi » a déclaré Dorsi, puis elle a dit : « Dites-moi. »

« Eh bien dans la vision, votre bague de mariage a été déplacée de votre main gauche à votre main droite. Cela augure le décès d’un être cher. »

« N’importe quoi Alex Sanders ». Dorsi fulminait maintenant. « Encore un de vos tours bon marché de sorcière, n’importe quoi » Elle s’est levée, a mis un peu de monnaie sur la table et est partie.

Alex n’a pas été surpris, mais il fut triste, quand Dorsi lui a téléphoné le même mois pour lui dire que Victor Morris était mort.


La Vie après la Mort

Notes d’après un discours de Maxine Sanders, Reine Sorcière, à son coven en 1974

Dans le Domaine des Esprits

Il serait trop long de vous dire tout ce qui concerne la vie dans le monde astral, mais je vais vous donner quelques conseils qui peuvent être intéressants.

Certains d’entre vous ont expérimenté la promenade mentale et astrale lorsque votre corps mental a été séparé de votre corps physique. Mais dans l’astral les idées du temps et de l’espace n’existent pas pour vous. Ainsi, en quelques secondes, vous êtes en mesure de vous rendre à n’importe quelle distance. Et lors de votre voyage il n’y a aucun obstacle matériel que vous ne serez pas en mesure de franchir avec votre corps mental et astral. Chaque être humain aura la même expérience après sa mort physique. Vous, puisque vous êtes initiés, aurez l’avantage de vous familiariser avec cela au cours de votre vie. Et déjà dans ce monde, vous êtes libéré d’une douleur : la terreur de la mort. Vous devez savoir dans quelle sphère astrale vous allez vivre après votre mort. Et pour vous, la séparation de votre corps physique n’est qu’une transition entre le monde physique et un autre plus subtil, un peu comme si vous changiez de lieu de résidence.

Vous allez expérimenter une autre chose, ici, sur terre. Ce qui est intéressant c’est qu’une personne non développée, non-initiée, disparaît sur le plan astral. Etonnamment ce n’est pas le cas d’une Sorcière ou d’un Mage Véritable qui sont tout autant familiers avec les conditions d’ici et de celles d’après – en fait, pour une personne qui connait les mondes physique et astral, le monde physique perd de son intérêt, car il ne le considére pas comme un moyen de se développer personnellement. Il a déjà appris sur terre que la gloire, l’honneur, les richesses et tous les autres avantages du monde ne peuvent pas être emmenés de ce monde jusqu’au monde astral, ils sont donc inutiles. Vous ne devriez jamais pleurer des choses mortelles. Vous devriez constamment utiliser le temps dont vous disposez dans cette sphère physique à vous développer personnellement du mieux que vous pouvez.

Il devrait être clair pour vous que toutes les obligations telles que l’amour, la fidélité, etc, qui pourraient maintenir un être humain dans le monde physique n’ont plus de sens dans l’autre monde. Les personnes qui se sont aimées ici, mais qui n’ont pas évolué de la même façon sur les plans psychique et mental ne peuvent pas, après leur mort, vivre dans la même sphère. Et ils n’auront plus la même affection qu’ils avaient ici l’un pour l’autre. Mais, si un homme et une femme atteignent le même niveau dans le monde astral, après la mort, ils seront reliés entre eux par un lien interne de sympathie. En dépit de cela, ils ne connaîtront pas le même genre d’amour que sur le plan physique. Dans le monde astral il n’existe rien qui ressemble à l’instinct de conservation. Il n’y a pas d’instinct du désir sexuel ou de l’amour. Cela a disparu. Dans les sphères supérieures, les amants sont reliés par un lien subtil de vibrations : l’amour relie deux êtres également développés. Dans le monde « visible », deux êtres liés l’un à l’autre par une affection mutuelle sont généralement attirés par des stimuli externes et la relation est maintenue par les mêmes facteurs. Il n’en est pas de même dans le monde astral. Naturellement, l’idée de beauté existe toujours dans le monde astral, mais elle est très différente de la beauté physique, parce que le corps astral d'une personne décédée n’est plus soumis ni au temps ni à l’espace. Ainsi, en entrant dans ce monde, on perd sa vision habituelle de la perfection. Dans un premier temps, il aspire à revenir sur terre. Cela vient du fait que l’âme du défunt doit maintenant regarder en face les erreurs commises au cours de sa vie. En outre, l’esprit a un besoin naturel de revenir pour réparer les torts dont il s’est rendu responsable durant sa vie physique – pour avoir une autre chance de se développer dans le monde physique et d’accumuler davantage d’expérience de l’esprit humain, pour être en mesure d’utiliser cette expérience dans les Sphères Elevées du monde astral.

Si la sorcière ou le magicien a réellement expérimenté sa mort physique, il n’y a aucune raison pour qu’il retourne dans le monde physique, il n’est plus désireux de rétablir le lien entre l’astral et le monde matériel. Bien sûr, il y a aussi des Sorcières et sorciers de degré inférieur qui, consciemment, essayent, à partir du monde astral, de bâtir à nouveau le lien entre leur corps astral et le corps physique. Mais comme ils ne disposent pas de la perfection nécessaire leur permettant de condenser suffisamment la lumière, leur succès n’est donc que partiel. Généralement ces entités accrochées à leur forme tentent d’échapper à la perte de leur corps physique et en arrivent à vampiriser le fluide électromagnétique – l’énergie vitale - des corps vivants, afin de les accumuler dans leur propre corps physique, en supposant qu’avec le temps ils seront capables de le faire revivre. Le corps physique enterré dans ces conditions peut être préservé de la décomposition pendant des siècles. L’histoire nous donne de nombreux exemples de personnes décédées dont le corps est préservé et la science ne peut pas encore donner une explication satisfaisante à ce phénomène.


Si vous voulez faire l’expérience de la vie, ne faites pas attention à celui qui fixe des limites. Il n’y a pas de limite dans l’univers. Ce n’est qu’à l’homme, dans son état actuel que s’appliquent des limites, et en faisant un travail sur lui-même, il peut repousser constamment ces limites.

Richard Gardner

Selon nous, ces vampires sont à plaindre et les croyances religieuses d’autrefois avaient raison de pousser à détruire ces corps quand on découvrait qu’ils ne se décomposaient pas. Généralement, ce n’est que par de telles destructions (le corps était généralement transpercé par un pieu en bois, ou décapité, après quoi il était brûlé) que l’esprit est libéré de la dépendance. La légende du loup-garou peut s’expliquer en partant de ce point de vue. Le processus est le même sauf qu’au moment de la vampirisation le corps astral a pris la forme d’un animal, un animal spécifique, afin d’être certain d’être reconnu par la victime impuissante, il peut s’agir d’un être sensible, dont la force de vie lui est soutirée progressivement.

Pour résumer : dans le monde physique, le corps physique et le corps astral sont liés ensemble par la aliments et la santé, et les trois parties, le corps, l’esprit et l’âme sont fortifiées par des matériaux plus subtils émanant des Hautes Sphères. Cela se produit généralement pendant le sommeil. Dans le monde astral, en revanche, le corps astral est vivifié non pas par des pressions venant du monde physique, mais par les vibrations du monde astral. Si un être humain dans l’astral est en chemin pour retourner vers le monde physique, le lien entre le corps astral et le corps mental se séparent, afin que l’entité meure en astral pour renaître dans le monde physique. L’acte de mourir est similaire à la mort physique. Le corps astral n’est plus nourri par le corps mental avec les impressions du monde astral.


Foutues Pommes de Terre

Dorsi s’étant occupé de tout, les funérailles de Victor furent presque aussi bizarres que celles de Dorsi quelques années plus tard. Dorsi avait des amis adeptes de toutes sortes de religions et autour du cercueil de Victor il y avait des catholiques, des juifs, des protestants, un bouddhiste, la bande habituelle de spirites et des prêtres et prêtresses de toutes sortes de cultes. Victor Morris, s’il regardait du plan astral, devait pousser un soupir de soulagement d’avoir échappé à tout cela. Il avait été un homme d’action, un bon joueur et un bon buveur et jusqu’à tout récemment il était très « terre à terre ». Il méprisait toutes les formes de religion, en particulier celles pour lesquelles Dorsi manifestait de l’intérêt. La cérémonie funèbre fut conduite par un adepte de Subud, qui plus tard a juré sur le phallus sacré d’Osiris avoir vu Horus, le Dieu Egyptien de la Lumière, attirer l’âme du corps de Victor par le haut de son crâne pendant qu’il conduisait la cérémonie. C’était probablement une bonne chose pour lui que le vieil homme n’était pas là en chair et en os pour se plaindre.

Dorsi n’a pas revu Alex pendant quelques semaines. Quand elle l’a rencontré par hasard chez Marks and Spencer, il lui a renouvelé ses condoléances mais pour elle il ne s’agissait que de la volonté des dieux. Apparemment, elle lui avait pardonné à sa prédiction car, devant un café, elle lui a demandé de l’aider. Victor était mort et elle avait besoin chaque sou sur lequel elle pouvait mettre la main. Il avait laissé des papiers liés à la guerre mais elle ne savait pas où. Ces documents étaient essentiels si elle voulait que l’armée lui verse une pension de veuve. Est-ce qu’Alex pourrait éventuellement l’aider ?

Oui, il pouvait. Dans le café, en utilisant la numérologie, il a déterminé que les documents étaient dans une commode qui n'était pas dans la maison, mais pas très loin. Cette sorte de clairvoyance était plus au goût de Dorsi. Elle avait oublié le meuble dont Victor se servait comme armoire à outils et qui était placée dans le hangar au fond du jardin. Elle l’a remercié vivement et s’en est allée pendant qu’il se demandait si sa relation avec Dorsi Morris était de celles qu’on laisse en plan dans un café.

Dorsi s’est précipité chez elle et a jeté son manteau par terre dans l’entrée. Elle a crié quelque chose en passant à côté de sa fille aînée et s’est précipité dans le jardin puis dans la cabane à outils. Les documents étaient là. En sortant du hangar poussiéreux, hors d’haleine, mais triomphante, elle agitait les documents devant Arline et lorsqu’elle a retrouvé son sang-froid elle lui a raconté ce qui s’était passé au café. N’était-ce pas merveilleux ? Cet homme n’était-il pas un génie ? Elle l'avait mal jugé.

Arline n’était pas impressionnée. A quinze ans, elle avait développé une certaine pruderie religieuse. Même le fait que sa mère connaisse une sorcière était aussi choquant, au propre comme au figuré, que l’enfer - elle ne prononçait même jamais le mot « enfer ».

« Arline, nous devons l’inviter à prendre le thé. Il faut vraiment qu’il vienne ... »

« Cet homme ne viendra pas dans cette maison ! » Celui qui a déjà entendu Maxine (elle prononce son prénom avec un léger accent du Lancashire, Max-ine) une fois adulte, parler avec colère, peut imaginer la scène. « Si tu oses le faire venir ici, j’irais tout droit chez le prêtre pour lui dire quel genre de personne tu autorises ta fille à fréquenter. »

« Je sais bien, ma chère » a dit Dorsi redevenant elle-même « que tu n’approuves pas mes amis. Mais c’est ma maison et j’ai déjà invité Alex à prendre le thé dimanche. Tu apprécieras peut être d’apprendre qu’il y a plus de pratiquant de la Magie Noire chez les prêtres que partout ailleurs ! Le neveu d’un pape était très réputé chez certains magiciens noirs et il pratique maintenant dans une université de ce pays. (Cette anecdote est exacte, on se demande comment Dorsi pouvait le savoir). Alex va venir prendre le thé dimanche et c’est tout. »

La discussion était close. Arline fut contrainte d’accepter le fait que sa mère allait laisser venir les forces des ténèbres dans leur maison, pire, en fait elle les avait invitées. La joueuse de cartes élevée dans un couvent avait appris à s’opposer au diable incarné - elle n’allait pas s’approcher d’un fauteuil où il était assis. Pourtant, elle était intriguée. La grande adolescente osseuse bouillait à l’idée d’être confrontée à Alex Sanders, une Sorcière Noire. Elle devra se mesurer à lui. Elle se placera face à lui et murmurera le nom de Jésus et il s’enfuira hors de la maison. La femme qui, plus tard, prendra délibérément une dose importante de poison de Sorcière pour prouver qu’elle pouvait le faire et survivre était déjà embryonnaire dans la jeune chrétienne qui a toujours apprécié un léger danger, elle sera vertueuse même si elle devait en crever.

Elle a fait des cauchemars horribles pendant le reste de la semaine, elle rêvait d’orgies dans des cimetières, de sacrifices, de se promener avec un manche à balai entre les jambes. Mais une fois réveillée Maxine n’était plus que pureté, affligée et attristée parce que sa mère allait trahir Jésus-Christ, c’est-à-dire le Père O'Callaghan, de façon choquante. Sa mère, s’est elle dit, n’aurait jamais osé faire cela à l’époque où son père était encore vivant. Dimanche est arrivé et il était l’heure de prendre le thé. Arline avait assisté à la messe, elle avait reçu la communion et elle avait demandé la bénédiction sur sa maison. Maintenant elle allait et venait sur le tapis du salon. Dorsi était en haut en train de se poudrer le nez.

A Manchester la maison était une grande demeure victorienne. C’était une de ces bâtisses qui vous faisait penser au travail d’un copain saoul qui aurait posé des briques et en aurait fait une sorte de maison bancale tenant vaguement debout. Le jardin derrière la maison était très grand et laissé à l’abandon alors que le jardin de devant la maison était petit mais propre, bien entretenu avec une allée bordée de rosiers. Quand Maxine a regardé par la fenêtre, elle a vu un homme ouvrir la grille.

Il n’était pas du tout comme elle l’imaginait. A son grand soulagement et à sa grande déception, il n’avait rien de Méphistophélès. Il avait l’air tout à fait ordinaire. Bien plus petit que la moyenne, il perdait ses cheveux et était vêtu d’un minable imperméable bleu. Il a sonné.

« Mère, ton invité est arrivé. »

Dorsi d’en haut, n’a rien répondu, sa surdité feinte devait être interprétée par « Tu lui ouvres ». Il a resonné et Maxine s’est enfin dirigée vers la porte. Elle s’est retrouvée face à un homme mince et inoffensif qui lui avait donné cauchemars pendant une semaine. Il a souri timidement, elle laissait voir son embarras. Comme toujours Alex a rapidement appréhendé la situation et l’a tournée à son avantage.

« Bonjour, c’est gentil de m’avoir invité. »

« Je ne vous ai pas invité – euh, bonjour. »

« Je vous ai déjà vu toute nue, vous savez. » Il a fait une pause, juste assez longue. « Sur une carpette en fourrure. Bien sûr, vous aviez dix mois. »

Arline a rougi, comme les filles le faisaient encore en 1961. Elle a émit un léger « Oh ».

« Vos cheveux ont changé. »

Après le décès de Victor - il ne l’aurait jamais autorisé – les cheveux d’Arline étaient passés du roux au blond platine, comme ceux de Dorsi.

Dorsi est descendue et a salué Alex, lui présentant Arline Maxine Morris comme « la seule vierge de quinze ans à Manchester ». Arline s’est dit : « aujourd’hui c’est vraiment mon jour ».

A sa grande surprise l’après-midi s’est écoulée paisiblement, agréablement même. Alex et Dorsi ont discuté de vieux amis pendant qu’Arline, plus que soulagée malgré ses projets d’exorciser Alex, écoutait vaguement leur conversation, se contentant de répondre aux questions qui lui étaient directement destinées. Cet homme, pensait-elle, peut dire qu’il est une sorcière. Je peux aussi dire que je suis une mégère mais ce n’est pas forcement vrai. Il est bien élevé et il ne fait pas de Sorcellerie abominable ici. A peine avait-elle décidé que, même si elle n’appréciait pas l’homme, elle ne pouvait rien lui reprocher de précis, Dorsi a dit comme si c’était tout à fait normal :

« Alex, je veux que vous jetiez un sort pour moi. »

La demande a pris Alex et Arline complètement de court, il lui a lancé un regard interrogateur pour voir si elle approuvait. Elle savait que toute objection de sa part ne ferait que conduire à une dispute, et – c’est comme ça que ça ce passait chez eux – c’est elle qui risquait probablement d’avoir le dessous. Elle s’est contentée de hausser les épaules. Dorsi observait l’échange en silence.

« Bien, alors c’est réglé. » Puis se tournant vers Alex, elle a dit : « J’avais désespérément besoin d’argent. Avec le décès de Victor notre avenir est des plus incertains. »

L’expression « notre avenir est des plus incertains » amusa Arline. Lorsque son père était encore là, s’est elle dit, ils étaient tout sauf certain de leur avenir, mais elle a gardé le silence.

Dorsi a continué. « Il est parti en laissant quelques factures, et je n’ai aucun moyen de les payer immédiatement. Mais si j’avais, oh ... trois mille cinq cent livres, cela nous dépannerait bien. » Elle dit trois mille cinq cent livres comme si elle demandait cinquante centimes pour un coup de téléphone.

Alex a réfléchi une minute et a dit : « Il va falloir qu’une vierge me procure une très grosse pomme de terre ». Il a à nouveau eu ce regard malicieux. Il a regardé Arline et a souri. La seule vierge dans la pièce s’est levée et est sorti avec indignation. Elle est revenue avec une pomme de terre qu’elle a posée, sans regarder Alex, sur la table à côté de lui.

Alex a dit à Dorsi d’écrire le montant dont elle avait besoin sur une feuille de papier blanche, pendant que lui taillait une fente dans la pomme de terre, en chantant doucement, presque comme pour lui-même, une incantation. Dorsi a noté la somme, quand elle eut fini Alex lui a remis la pomme de terre et lui a dit de plier la feuille de papier et de l’insérer dans la fente. Elle l’a fait avec une grande solennité. Pendant ce temps toutes la terreur d’Arline vis-à-vis de la sorcellerie avait disparu et qu’elle se retenait de rire avec difficulté.

Alex a expliqué à Dorsi que cette nuit-là elle devait enterrer la pomme de terre dans un trou profond de soixante centimètres et attendre les résultats du sortilège. Le reste de l’après-midi s’est déroulé sans incident, personne n’a plus parlé du sortilège, Dorsi considérait sa demande comme un fait accompli. Vers le soir, Alex a remercié Dorsi et Arline chaleureusement et en sortant, il fait un petit clin d’œil.

Dorsi attendait l’obscurité avec impatience. Vers neuf heures, elle et Arline, réticente mais amusée, ont commencé à rôder dans le jardin armées de lampes-tempête, de pelles, d’une pioche et d’une petite truelle à main. Le jardin arrière était une grande prairie en pente d’environ cents mètres de long. Avec leurs outils, Dorsi et Arline sont parties à la recherche de l’endroit où la pomme de terre enchantée allait être enterrée, définitivement, pensaient-elles.

Elles ont atteint ce qu’elles considéraient être le milieu du jardin et elles se sont misent à creuser le trou. Les soixante centimètres préconisés par Alex en étaient devenus plus de 3M50. Plus elles creusaient profond, pensait Dorsi, moins un animal risquait de retrouver la pomme de terre. Non content d’avoir multiplié la taille du trou par six, elle a donné un coup de pelle à la malheureuse pomme de terre la transformant en purée méconnaissable. Le trou a été soigneusement rebouché et la terre tassée avec la truelle à main. Puis l’endroit a été camouflé avec des mauvaises herbes. Epuisées, et ressemblant à des cantonnières, les deux femmes ont repris le chemin de la maison. Plus personne n’a parlé de la pomme de terre ou du travail de la soirée pendant quelques jours.

Lorsque la sonnette a retenti un matin quelques jours après l’enterrement de la pomme de terre, Dorsi pensait que c’était l’Ange de Lumière, avec son argent. « Bonjour, Madame. Je suis venu vous parler de votre sécurité financière. »

« Bien » a dit Dorsi, « je vous attendais. »

L’homme avait l’air perplexe, mais il a continué son argumentaire de vente.

« Vous voyez, je vends des assurances, des assurances vie. Et j’ai ici une assurance toute nouvelle et remarquable grâce à laquelle, pour un investissement minime, vous pouvez assurer l’avenir de vos proches pour une somme de trois mille cinq cent livres… »

L’homme n’a jamais achevé sa phrase, Dorsi a blanchi et elle l’a regardé bouche bée. Elle l’a regardé comme si elle avait vu un fantôme – son propre fantôme. Elle lui a claqué la porte au nez.

Affolée, elle a téléphoné à Loreburn College, où Arline suivait un cours de secrétariat et a demandé à sa fille de rentrer à la maison et l’aider à déterrer la pomme de terre qui semblait aujourd’hui menacer sa vie.

Arline est rentrée immédiatement. Mais il y a eu un petit problème. Lorsque deux femmes avaient enterré une pomme de terre dans un jardin de trois milles mètres carrés, envahi par les ronces, les mauvaises herbes et les buissons, c’était au milieu de la nuit. Elles ne parvenaient plus à se souvenir de l’emplacement exact. Cela risquait de poser un problème si elles devaient creuser 3M50 pour la déterrer. Après les inévitables discutions pour savoir où creuser, Dorsi et Arline ont laissé le jardin dans l’état d’un champ de mines abandonné et sont reparties sans avoir trouvé la pomme de terre, ressemblant comme l’a dit Maxine à « un couple d’ouvriers tentant d’émigrer à la dure vers l’Australie ». Pour se protéger des conséquences Alex a été invité à venir prendre le thé le dimanche suivant.

Lorsque Dorsi lui a raconté ce qui s’était passé, il n’a pas pu ou pas voulu cacher son amusement. Quand il a cessé de rire, il a expliqué à Dorsi que sa motivation était la cupidité et non le besoin, et que, parfois la cupidité peut se retourner contre vous. Elle l’a supplié de trouver la pomme de terre par magie. Il a essayé mais il a échoué et aucune des deux femmes n’avaient la moindre idée de l’endroit où elles l’avaient enterrée. Ainsi, tard dans la nuit dans le jardin à l'arrière de la maison, une autre approche a été tentée. Un petit homme perdant ses cheveux en vêtement de Sorcières se promenait en marmonnant des incantations au sujet d’une pomme de terre suivi par une femme hystérique plus âgées tenant un chapelet et implorant la Vierge Marie de l’aider, talonnée à quelque distance par une jeune fille vierge qui calculait combien de temps il faudrait aux petits hommes en blouse blanche pour arriver du Springfield Hôpital. Ils n’ont jamais trouvé la pomme de terre, mais Alex a inventé un rite d’exorcisme pour réduire à néant toute la puissance de l’objet qui était enterré dans le jardin. Dorsi n’a plus jamais demandé de faveur - du moins pas pour elle – à Alex.

Alex Sanders avait vingt ans de plus que Maxine et quand ils se sont retrouvés, il vivait plus ou moins seul. Toutefois, son Tarot et la lecture du cristal lui avaient révélé qu’une partenaire magique allait entrer dans sa vie. Arline Morris devait être la dernière personne à laquelle il aurait pensé.

L’histoire de l’initiation d’Alex à la sorcellerie est déjà bien connue. Au moment où j’écris, un documentaire pour la télévision sur Alex est en cours de préparation. Je dois aussi ajouter que les détails de l’initiation doivent toujours être légèrement voilés.

En bref : Treize ans avant la naissance de Maxine, Alex a interrompu sa grand-mère, Mme Bibby, nue, dans un cercle magique. Il était allé à sa maison de Wilton Road à Manchester, pour le gouter et pensait lui faire une surprise en arrivant par la porte arrière au lieu de sonner, comme d’habitude à la porte de devant. C’est lui qui a eu une surprise. Sa grand-mère, pas plus grande que le petit Alex, dont les cheveux gris-roux descendaient librement sous son derrière ridé se tenait debout à l’intérieur d’un cercle de tissu avec des dessins magiques, tenant une épée incrustée de joyaux factices. Elle était au milieu d’une cérémonie et était furieuse d’être interrompue. « Qui t’a dit de venir ici ? »

« Maman m’a envoyé prendre le gouter. »

« Tu auras ton gouter, mais tu auras d’abord autre chose ! »

Elle a ordonné à Alex de se déshabiller et de se pencher. En utilisant l’un de ses couteaux rituels elle lui a entaillé le scrotum jusqu’au sang, en prononçant quelques paroles qu’Alex n’avait jamais entendues prononcées avant. Le petit garçon de sept ans qui était venu pour le gouter de l’après midi était maintenant une sorcière pour la vie.

Il avait aussi une peur bleue. Pour lui « la Sorcière » correspondait à la définition que le folklore populaire et la persécution chrétienne avaient créée - une Sorcière était comme celle de Blanche Neige avec des verrues sur le nez et une tendance à empoisonner les pommes. Il ne pouvait pas savoir qu’en anglais le mot venait du mot Wicca un terme anglo-saxon signifiant « sage » ou « celui qui a le savoir ». Il a passé les années qui ont suivies à apprendre - quoi qu’on ait pu dire d’Alex, personne n’a jamais mis en doute le fait qu’il est un érudit naturel - plus que la plupart des sorcières en apprennent au cours de leur vie sur la Sorcellerie : A trois ans, il était un lecteur vorace. Vers huit ans, il était expert en divination.

La sorcellerie a été qualifiée de religion indigène de l’Angleterre. Personne ne peut le prouver, mais les indices sont convaincants. Le poète Catulle et bien d’autres ont dit que les Britanniques étaient « tot divisos ab orbe » (« totalement coupé du monde civilisé »), ou parmi les derniers à être touché par l’amour assassin des disciples du Christ. Selon ce que nous savons des invasions successives, à l’exclusion des Romains, la Grande-Bretagne a balancé entre le paganisme et le christianisme pendant des siècles. Les païens grâce aux guildes et aux conseils de « celui qui avait le savoir » ont réussi à survivre. Quelques un de leurs descendants directs sont encore là aujourd'hui.

Les Britons indigènes, ou Prytani, comme on les appelait alors, étaient un peuple étrange qui enterraient ses morts dans de grandes levées de terre funéraires, ou tumuli, dont le bronze était le seul métal et dont les armes étaient surtout des flèches avec de délicates pointes de silex en forme de feuille de sureau. Leur religion, qui était liée d’une façon ou d’une autre à la lune et aux étoiles, se pratiquait au milieu de cercles de pierres, entourés par une levée de terre et un fossé (le cercle originel des Sorcières en fait).

Paul Huson, « Mastering Witchcraft » (Corgi, 1970) p. 13.

Le Daily Mirror a estimé qu’environ 40000 sorcières pratiquent aujourd’hui en Grande-Bretagne - les enfants cachés de la Wicca, les adorateurs de la Déesse Mère. En fait, le nombre doit être deux fois plus élevé que ça. Il y a chaque semaine au moins une nouvelle sorcière initiée quelque part en Grande-Bretagne. La Grande-Bretagne (en particulier le Nord et l'Écosse) est la région du monde la plus riche en Sorcières - sauf, peut-être, certaines régions d’Italie. L'Église « établie » a lancé une croisade pour exterminer la Wicca et malgré les persécutions depuis l’époque romaine, elle n’y est pas encore parvenue. Mais Avec l’afflux des invasions étrangères, les cultures se sont mélangées et vers le XIème siècle les enfants de la Wicca s’étaient dispersés ou avaient émigré. Le mouvement vers le nord avait débuté avec l’invasion romaine. Le mur d’Hadrien est un témoignage muet du fait que même les légions romaines, les conquérants du monde, ne voulaient pas se mêler avec les féroces habitants du Nord de la Grande-Bretagne. « Ne les laissez pas venir ici » semble avoir été la stratégie romaine. C’est autour de Perth que résidaient les Prytani survivants, c’était les ancêtres des sorcières contemporaines.


Cela peut ... expliquer la vieille croyance Sorcière voulant que le Nord soit la direction sacrée. Au Nord, les demeures des Pictes, c’est ainsi que les Romains nommaient les Prytani, étaient souvent de mystérieux forts vitrifiés dont les pierres des tours extérieures avaient été fusionnées grâce à des grands feux, les rendant inexpugnables à toute attaque ... Nous savons pertinemment que de tels châteaux de verre existaient à Craig Phadrick à Invernsness, Dun Fionn, Achterawe, et Dundbhairdghal.

Paul Huson, « Mastering Witchcraft » (Corgi, 1970) p. 14

Perth semble avoir été un point central, toute l'Écosse est encore aujourd’hui pleine de Sorcières et l’atmosphère de sorcellerie survit toujours parmi les descendants inconnus des Prytani. Le Pays de Galles est également une grande région sorcière et même une personne n’étant pas Sorcière qui voyage dans ces régions peut sentir les vibrations. Il serait impossible de se promener à pied dans cette région sans trouver les restes d’un tumulus rond de Sorcières ou les ruines d’un cercle de pierre druidique - les druides sont aussi les enfants des Prytani. Les Sorcières saluent le portail nord, dont Alex, Maxine et des milliers d’autres sorcières se servent pour disperser la force d’un cercle magique, en disant :

Toi Borée, Gardiens des Tours de Veille, Vous puissant Dieu et douce Déesse, Gardiens du Portail du Nord, nous vous remercions de… Et alors que vous retournez dans vos royaumes plaisants et nobles, nous vous disons : Salut et adieu. Les participants disent « Salut et adieu ».

Chaque fois que je trace ou banni un cercle, bien que les Seigneurs des Tours de Veilles de l’Est, du Sud et de l’Ouest soient les bienvenus et sont aimés comme je n’aime rien de plus au au monde, je ressens toujours une joie étrange, un sentiment d’être à la maison, quand j’arrive au point cardinal du Nord. Là où je vis, le nord est très près de Hampstead Heath, là où les Druides pratiquent leurs cérémonies (publiques). Je suis certain que de nombreuses autres Sorcières ont la même sensation lorsqu’ils se tournent vers le nord.

Mais revenons à l'antiquité.

Les Prytani eux-mêmes, appelés maintenant par leur adjectif saxon, Elvenfolk, ou simplement Ceux des Landes ou Païens, ont été considérés comme une légende. Le roi et la reine des elfes dans leur colline enchantée qui s’ouvraient lors des anciens festivals d’Halloween et de Beltane ont rapidement été oubliés de la majorité, seuls les sages, ou les Wicca comme on disait en vieil Anglais, s’en souvenaient.

Paul Huson, « Mastering Witchcraft » (Corgi, 1970) p. 14

A cause du matraquage des autorités chrétiennes, la religion indigène de Grande-Bretagne a été conduite à la clandestinité pendant des centaines d’années. De rares sorcières autochtones ont survécu et selon ce que sait Alex moins d’une douzaine de Sorcières héréditaires dont les familles remontent à cette période existent toujours aujourd’hui en Grande-Bretagne. Il est l’une de ces Sorcières.

Quand sa grand-mère lui a enseigné l’histoire et les traditions de la Sorcellerie, les peurs d’Alex ont disparu et il a commencé à développer d’incroyables pouvoirs de guérisons, de magnétisme et de clairvoyance qu’il maîtrise maintenant. Mme Bibby est décédée alors qu’Alex était encore très jeune et pendant un temps Alex pensait qu’il était le dernier de sa race. Quand il a commencé à voler de ses propres ailes, Alex était très pauvre et il s’est tourné vers la Magie Noire pour obtenir la richesse et - comme c’est arrivé - la notoriété. Il a eu les deux et en a payé le prix. (A cause de sa pratique de la Magie Noire, Joan, la sœur d’Alex est décédée d’une mort horrible à l'âge de trente et un ans.) Renonçant à la voie de la main gauche, il a abandonné sa position de leader de la jet set et vendu Riverside, sa maison de vingt-six pièces, à Whalley Range, pour acheter une maison de cinq pièces sur Oldham Road à Newton Heath. Dans le même temps il a renoncé à une fortune de près de 140 000 livres qu’il avait gagné grâce à un couple de personnes âgées fascinée par magie. Le compte existe toujours quelque part dans une banque dans les Midlands, mais il dit qu’il n’y touchera jamais. Il est géré en fiducie pour Maya et Victor, les enfants qu’il a eu avec Maxine et ce sera eux, quand ils en auront l’âge, de décider ce qu’ils en feront. Pour lui, c’est un souvenir de sa période sombre et de la douleur et la souffrance qu’il a causé à lui-même et à d’autres.

Quand Alex a rencontré Arline adolescente, il vivait une existence austère, vivotant en vendant les plantes qu’il cultivait dans son jardin. Il n’appréciait pas particulièrement d’être le clou – le magicien extraordinaire – des après-midi devant un thé de Dorsi, mais il n’y avait pas que du thé servi. Un steak énorme avec tous ses accompagnements, suivi d'un café, de cognac et de fraises même si ce n’était pas la saison, voila une perspective à laquelle il lui était difficile de résister. Il était, de par sa propre décision, passé d’une vie de luxe à survivre en ne vivant qu’avec trois fois rien. Ainsi, il a fait parti de tous ceux qui, de temps à autre, prenaient un repas complet, grâce à Dorsi.

Il y avait Victor le coiffeur et Brian, un artiste maquilleur dans un célèbre studio de cinéma. Ils ont surpris Arline en se présentant comme mari et femme et en se tenant la main à la table. Il y avait aussi la prostituée qui n’avait qu’un seul œil et qui estimait son gain hebdomadaire moyen à 250 Livres. C’était d’autant plus remarquable qu’elle refusait de demander plus d’une Livre à un client. Il y avait aussi la célèbre comédienne de télévision et son époux qui était toujours élégant avec son costume, sa chemise et sa cravate. La vierge de Manchester n’a pas compris quand elle a découvert que « l’époux » était aussi une femme. Il avait aussi celui qui était mannequin, il avait des mèches dans les cheveux et portait des chaussures en cuir verni à talons hauts, dix ans avant que ce soit la mode et sa ravissante petite amie dont le vocabulaire semble être limité à « Oh ouiiiiii» et « mmm noooon ». Il y avait encore un mauvais acteur, un vieux monsieur dont les petites faiblesses l’avaient obligé à se « retirer » avant l’heure. On peut imaginer à quel point ces personnes pouvaient surprendre les autres invités : des prêtres de toutes les religions, un adepte occasionnel de Subud et une véritable Sorcière héréditaire, qui était « l’attraction principale » lorsqu’on lui demandait de lire les Tarots.

Maxine se souvient qu’Alex avait dit à Dorsi : « Si j’avais su pourquoi vous m’avez demandé de venir ici, j’aurais mis mon costume de clown ». Au moins cette fois ce n’était pas un tutu.

Si l’incident de la pomme de terre n’avait rien fait pour qu’Alex et Dorsi sympathisent, cela a pourtant fait de lui un élément incontournable de la vie de Dorsi. Dorsi était convaincue qu’elle lui devait jusqu’à l’air qu’elle respirait. Il était rarement oublié dans la liste de ses invités. Alex a réalisé qu’à chaque fois on lui demandait de faire un peu de magie. A chaque fois il essayait de s’en tirer mais personne n’esquivait une demande de Dorsi. Arline - qui commençait à insister pour qu’on l’appelle Maxine – observait tout cela, mais de loin, en silence et avec un dégoût évident.

Mais elle avait changé. Un peu plus tard que la plupart des filles, elle s’intéressait maintenant activement aux choses du sexe. Ses cheveux avaient la couleur qu’elle voulait, son nom était aussi celui qu’elle voulait. Elle avait pris un emploi d’infirmière, elle n’avait pas aimé, et était devenu agent de sécurité dans un grand magasin. (« Je n’ai jamais vraiment arrêté qui que ce soit. Je leur faisais savoir que je savais. Ca suffisait.) Elle avait perdu un peu de sa timidité, timidité qui était surprenante pour une femme de sa beauté et sa stature, mais qui la laissait parfois sans voix lors de ses apparitions publiques.

« C’est quelque temps après que les visites d’Alex aient commencé que j’ai perdu un peu de ma timidité - quand il a commencé à venir régulièrement, je me sentais prête à mener à bien une conversation. J’ai commencé, à ma propre surprise, à oublier ce que j’avais appris : tu le sais bien, ne parle que quand on s’adresse à toi. »

Dans un premier temps elle n’a pas fait le lien avec Alex. Elle commençait à admettre à contrecœur qu’elle le respectait pour ses pouvoirs. Mais ce n’est pas avant l’incident de la dame chauve dans le jardin qu’elle a réalisé dans un flash d’absurdité et de pertinence, qu’il était l’homme qu’elle allait épouser.

« Alex, que pensez-vous des cheveux de Christine ? »

« Que dites-vous ? Arline »

« Mon nom est Maxine » a répondu la jeune femme, les yeux écarquillés, toute innocente. « Je dis, que pensez-vous des cheveux de Christine ? »

Dorsi a regardé les convives, un silence de mort avait remplacé la conversation animée sur la politique économique du gouvernement. Mabel, la mère de Christine était muette. Victor et Brian étaient figés. Jocelyn, une amie de la mère de Christine, regardait Arline-Maxine avec un regard assassin et gloussait. Christine elle-même était muette.

« Non, sérieusement, Alex. Qu’en pensez-vous ? »

Il a mis du temps à répondre. « Eh bien, je dirais que ses cheveux ne semblent un peu fins. »

Christine avait une perruque. (Comme le disait John Wayne en parlant de sa propre perruque, « Bien sûr que ce sont vrais cheveux. Ce ne sont pas mes cheveux, mais ce sont de vrais cheveux ») Il n’y avait qu’à les regarder pour s’en rendre compte, on avait fait une perruque avec des cheveux de sa mère mais on pouvait tout de même voir le crâne de Christine au travers. Embarrassée par l’évidence de la perruque et les ricanements qu’elle suscitait, Christine sortait rarement. Alex le savait bien sûr depuis longtemps - il avait lui aussi des problèmes de cheveux - mais étant un gentleman il essayait d’éviter de la blesser. « Maxine » quelque peu exaltée lui avait forcé la main. « Ne pensez-vous pas que c’est un drôle de genre, non ? » Maxine était impitoyable.

« Bien » a dit Alex en espérant que les tensions s’apaisent. Mais ce ne fut pas le cas. « On dirait qu’elle a été attrapée par le mauvais côté d’une tondeuse à gazon. »

Dorsi, dont la compassion pour les souffrances d’autrui ne semblait pas aller jusqu’à Christine, s’est esclaffée bruyamment. Jocelyn a eu un petit sourire. Le malaise de Mabel s’est transformé en un air renfrogné et sévère vis-à-vis de Maxine. La jeune Maxine était très heureuse de la consternation qu’elle avait causée. « Alex, Christine est chauve. Elle est chauve comme une boule de billard, Alex, tu ne l’as pas remarqué ? Elle s’est fait avorter deux fois lors trois dernières années et son médecin croit que ses cheveux sont tombés à cause de ce qu’elle a pris pour avorter et à cause de sa nervosité et du stress. Mabel meurt d’envie de vous demander de faire quelque chose pour elle, bien sûr je ne devais pas mais ma mère ne vous le demandera pas à cause de cette pomme de terre, et ... »

Alex a fait une grimace.

«... J’ai pris sur moi de vous demander. Oh, s’il vous plaît, Alex, faites un peu de magie pour que Christine ait quelques cheveux. »

Elle s’est rassise avec un petit sourire.

« Elle ne sort plus jamais » Dorsi l’observait froidement, « La pauvre est terrorisée à l’idée d’être ridiculisée en public. »

« S’il vous plaît essayez de faire quelque chose pour ma fille » a enfin dit Mabel. Alex a regardé de l’une et l’autre, il a réfléchi un instant puis il s’est levé et a marché sur la terrasse. Il est retourné vers la table. « Restez là » a-t-il dit et il a descendu les quelques marches qui menaient au jardin.

Il a fait une pause d’une seconde et a respiré profondément, en remplissant ses poumons avec l’air chaud d’été. Il a marché lentement, appréciant les roses plantées de chaque côté. Les fleurs, les arbustes, les arbres, les touffes de mauvaises herbes qui envahissaient tout ce qui était à leur portée. Les chardons, les pissenlits, les lentilles d’eau. Et une masse de gypsophiles, qui pour une raison connue d’elle seule, obsédaient Dorsi à tel point qu’une année elle en a planté plus de quatre vingt mètres. Quelque part sous terre il y avait peut-être un morceau de papier dans le reste d’une pomme de terre qui avait commencé à pourrir presque une année plus tôt.

A la fin du massif de fleurs et des mauvaises herbes, qui s’étendait sur une centaine de mètres de chaque côté du chemin, il y avait une zone en forme de croissant. Maxine l’appelait le Sucrier. Avec sa beauté sauvage et naturelle, c’était un lieu parfait pour une pratique sorcière. Alex a continué à marcher le long du chemin jusqu’au lac qui était entouré de chênes. Christine y nourrissait les cygnes dans le calme. « Christine est-ce que je me joindre à vous ? »

« Votre mère m’a demandé de jeter un sort pour tenter de faire repousser vos cheveux. Aimeriez vous que je fasse quelque chose pour vous ? »

Christine regardait l’eau. « Je ne crois pas en la Sorcellerie. » Puis elle dit: « j’avais un petit ami, mais il ne veut plus sortir avec moi parce qu’il pense que mes cheveux sont si affreux que ses amis se moquent de lui dans son dos.

Elle avait vingt-deux ans et à part sa calvitie elle était très attirante - de taille moyenne, avec un beau décolleté et des rondeurs là où il faut. Ils ont parlé pendant vingt minutes et finalement Christine a convenu qu’il n’y avait pas de mal à ce qu’Alex tente de lui venir en aide. Elle ne croyait pas en la sorcellerie, mais elle croyait que les miracles arrivent parfois si on en était digne et qu’on y « croyait vraiment ». Ils sont retournés ensemble jusqu’à la terrasse et Alex a informé le groupe que Christine acceptait qu’il travaille pour elle. Il allait faire une lotion magique, il lui faudra une semaine pour la préparer. Pendant ce temps Christine devait cueillir un petit bouquet de romarin. Tous les invités présents devaient se revoir le dimanche suivant.

A l’heure du thé, le dimanche suivant Dorsi bouillait d’impatience. Aucun de ses gouters précédents, aussi élaboré fut-il, n’avait été aussi important que celui qui allait venir. Maxine, Dorsi et leurs cinq invités étaient assis autour de la terrasse et attendaient le magicien.

Il est enfin apparu et, enlevant son manteau, on a pu voir son vêtement magique blanc et lumineux. Sa ceinture était en or.

« Elle en a ! Elle en a ! » lui a dit Dorsi lorsqu’il est arrivé dans la pièce.

« Qu’est-ce qu’elle a ? » a demandé Alex, avec un regard montrant qu’il était vraiment sincère. Maxine, qui pouvait entendre de la terrasse, a sourit intérieurement: « Il espère probablement que j’ai contracté une maladie rare et encore incurable. »

«L’herbe! »

«Qu’est-ce l'herbe ? »

Dorsi fut prise de panique. « Christine a apporté un bouquet de romarin ! »

« C’est très gentil de sa part. Mais est-ce que je peux demander ce qu’elle peut bien vouloir en faire ? »

C’en était trop. Les meilleurs steaks qu’elle ai pu trouver, des chapons, des champignons frais et des légumes peu commun et des accompagnements qui avaient coûté les yeux de la tête, des crêpes fourrées à la crème glacée, des fruits frais et des fromages, ses invités attendaient un miracle, et un magicien raté.

« Pourquoi ? Pourquoi ??? Tu ne te souviens plus de la magie et des cheveux de Christine ? »

« Oh, ça. Oh, oui, je me souviens. » Dorsi a soudainement réalisé qu’elle était en train d’admonester un Grand Prêtre en Sorcellerie qui lui avait été envoyé. Il ne voulait pas gâcher la fête, après tout. Que ça marche ou pas, il y aura une cérémonie magique.

Lorsqu’Alex a rejoint le groupe sur la terrasse tout le monde a remarqué une aura inexplicable, une aura d’une blancheur étrange qui l’entourait. Il était resté chez lui toute la semaine à se préparer pour le rituel. Il avait utilisé des méthodes de prière, de jeûne et la méditation profonde ce qui ne lui laissait plus que peu d’appétit pour la nourriture. Ce manque d’appétit s’est propagé. Le repas magnifique de Dorsi semblait perdu - seule Maxine, dont le gout naturel pour la nourriture n’a jamais été altéré par quoi que ce soit, si ce n’est par son médecin qui lui avait dit d’éviter les féculents. Elle se gavait pendant que tout le monde la regardait avec désapprobation. La dernière crêpe enfin terminée, Maxine ayant avalé les aliments destinés à tous les autres, ils ont pu se pencher sur le rituel.

Les femmes ont été envoyées dans le jardin pour cueillir quelques feuilles de la haie de troènes séparant la maison des Morris de celle de leurs voisins. Quand elles sont revenues, Alex a ordonné que les feuilles soient placées dans un bol qu’il avait placé au centre de la table sur la terrasse. Dorsi avait fourni une casserole qu’Alex avait à moitié remplie d’eau.

Pendant que les dames cueillaient des feuilles de troènes, Brian et Victor étaient allés chercher des branches et des brindilles sous les chênes au bord du lac à la lueur d’une petite torche. De temps en temps on entendait : « Bon dieu ! » et « Attention chéri, tu vas te brûler ! » qui venaient du Sucrier.

Les présents ont suivi Alex sur le chemin, les femmes portant le bol de feuilles et de plantes ainsi que la casserole d’eau. Un feu avait été allumé dans une partie dégagée du Sucrier non loin du lac. Quand ils furent arrivés, Alex a dit à Victor et Brian de retourner à la maison et de ne plus revenir avant que la cérémonie ne soit achevée. De toute évidence ils en furent soulagés. Maxine était maintenant un peu malade suite à son repas gargantuesque, elle aurait aimé partir avec eux. Mais elle avait un rôle important à jouer.

Alex avait un athamé, un inquiétant couteau à manche noir à la ceinture qui ceignait son long vêtement blanc. Il a ordonné à quatre des femmes de se placer aux points cardinaux du cercle magique : Nord, Sud, Est et Ouest. Maxine était au Nord. Christine attendait nerveusement à l’extérieur du cercle. L’homme, tout à son travail ne se souciant pas de ce qui se passait autour de lui, s’est mis à marcher près du cercle de femmes, armé d’un couteau qu’il dirigeait directement vers elles quant il a invoqué le Gardien des Tours de Guet.

O toi Cercle, sois un lieu de rencontre ... un bouclier contre toute malveillance et tromperie ... une barrière qui préservera et contiendra le pouvoir que je vais créer en toi. C’est pourquoi je te bénis et te consacre selon les noms les plus sacrés et les plus puissants, … et ….

Entre les points cardinaux du Nord et de l’Est, il a levé son athamé et a tracé un portail imaginaire, une porte par laquelle Christine, une non-initiée, pourra entrer. Il consacra le cercle une fois encore avec les éléments, Terre, Eau, Air et Feu. Puis Christine a été invitée à entrer dans le cercle. Elle fut saluée à la porte « avec parfait amour et parfaite confiance » avec un baiser sur les lèvres. Christine étant maintenant à l’intérieur du cercle, Alex a re-tracé le cercle et scellé le portail. Christine, terrifiée, s’est rapprochée du feu. Alex est allé à l’Est du cercle et a tracé le pentagramme d’invocation de Terre, là où se tenait Dorsi.

Je Vous convoque, vous éveille et Vous appelle pour observer mes rites et garder le cercle.

Il s’est rendu au portail Sud. « Je Vous convoque ...» Pareil à l’Ouest. Mais quand il est arrivé au portail Nord, il y a eu un problème. Maxine, qui avait été choisie par Alex pour tenir le rôle exalté de Borée et sa Reine, avait mangé plus que de raison après qu’Alex ai passé une semaine à purifier en secret son aura. Il a été pris d’un accès de colère, comme on sait que ça lui arrive lorsqu’il pratique dans un cercle avec des incompétents. Il a hurlé à ses oreilles. Il agitait son athamé devant elle en commandant aux éléments impurs qui étaient en elle de retourner d’où ils venaient. Il a envoyé un rayon purificatoire sur elle et le portail Nord a été assuré. Mabel semblait pétrifiée. Jocelyn gloussait.

Alex commença à marcher autour du cercle, lentement, marchant comme une panthère, récitant une incantation aussi ancienne que puissante. Elle se termine par :


Lamac Lamac Bachalyas

Cabahagy Sabalyas

Baryolas !

Lagoz atha Cabyolas

Samahac atha femyolas

Harrahya!


Le début du chant a été imprimé bien trop souvent, même dans les journaux.


Eko Eko Azarak

Eko Eko Zamalak

Eko Eko…

Eko Eko…


Maxine jure que ce qu’elle a entendu alors était «Eko Eko alley cat, Eko Eko gobble rat, Eko Eko Kardomah, Eko Eko car radio » (Eko Eko chat de gouttière, Eko Eko rat qui mange, Eko Eko Cardamone, Eko Eko autoradio ). En plus d’avoir dévoré un peu plus tôt la presque totalité des aliments sur la table, elle avait bu beaucoup de café à la cardamone. Ce qui est amusant c’est que même si elle n’a pas répété à Dorsi ce qu’elle avait entendu, Dorsi s’est mise en tête d’acheter un autoradio à Brian, ce qu’elle a fait, une semaine plus tard. Il n’avait pas de voiture.

Alex avait maintenant accéléré et il tournait autour du cercle, ce qui créait le cône de pouvoir, qu’un médium voie comme un feu bleu pâle tourbillonnant en spiral. La Rune des Sorcières a été imprimée ailleurs, je n’ai donc aucun scrupule à en donner le texte ici. Lorsqu’elle est chantée par treize personnes nues tournant dans un cercle, c’est une sorte d’aphrodisiaque spirituel.


Sombre nuit, Lune brillante,

Est, puis Sud, puis Ouest puis Nord,

Ecoutez la rune des sorcières,

Nous venons vous appeler.


Terre et Eau, Air et Feu,

Baguette et Pentacle et Épée,

Accomplissez mon souhait,

Ecoutez mes paroles.


Cordes et encensoir, escourge et couteau,

Pouvoirs de la lame de la Sorcière,

Eveillez-vous à la vie,

Venez lorsque la charge est dite.


Reine du ciel, reine de l’enfer,

Chasseur Cornu de la nuit,

Prêtez votre pouvoir à mon sort,

Et accomplissez ma volonté par rite magique.


Par tous les pouvoirs de la terre et la mer,

Par la force de la lune et du soleil

Comme je le veux, il sera !

Chante le sort, et il s’accomplit,


Eko, eko, Azarak,

Eko, eko Zamalak…


La dernière partie du sort est répétée.

Christine est restée à grelotter près du feu. Alex avait érigé un petit autel dans le cercle avec des pierres qu’il avait trouvées et il avait placé la casserole d’eau sur l’autel, sur le feu. Quand l’eau a commencé à frémir, il a dit à Christine de mettre les feuilles de troène et le bouquet de romarin dans la cocotte. Quand elle a commencé à bouillir, Maxine a prié la Vierge Marie. Dorsi se demandait si tout n’était pas en train d’échapper à tout contrôle et Jocelyn gloussait. Soudainement Alex a poussé un cri sauvage et a fait un bond en l’air.

Il a arraché la perruque de la tête de Christine et l’a jeté au feu où elle a brûlé immédiatement.

« Arrêtez ! » a crié Maxine. C’est elle qui avait commencé cette petite plaisanterie sadique, mais c’en était trop.

Alex a continué son travail. Puis il a banni les pouvoirs qu’il avait générés et les quatre femmes, aucune n’avait osé entrer dans le cercle, ont été autorisées à avancer. Christine sanglotait doucement. Alex a donné à Mabel la potion qu’il avait fabriquée : elle devait filtrer le liquide à travers un morceau de mousseline de soie et le mettre en bouteille quand il aura refroidi. Christine devait s’en frotter la tête tous les soirs et attendre le résultat. Christine devait maintenant affronter le monde sans son bouclier. Elle s’est mise à porter des foulards. Quelque temps plus tard, une vieille femme du village où elle vivait lui a dit que se frotter la tête avec un oignon était aussi bon pour la croissance des cheveux, mais elle a arrêté lorsque son nouveau petit ami lui a fait remarquer qu’elle sentait comme une usine de spaghettis. Mais elle a continué à poser la moitié d’un oignon en équilibre sur sa tête quand elle était seule chez elle et elle se promenait comme le mannequin de l’histoire avec un livre sur la tête. Une personne chargée de relever les compteurs a eu la surprise d’être accueillie à la porte par une femme chauve, mais assez sexy à part ça, avec un demi oignon sur la tête.

Christine vit maintenant en Amérique avec son mari et ses deux enfants adolescents. Dans les six mois qui ont suivi le travail qu’Alex a fait sur elle, elle avait des cheveux sains très noirs. Elle les a toujours. Mais Maxine voulait savoir pourquoi Alex avait dû se montrer aussi cruel avec elle ?

Elle devait se séparer de la perruque. Et ça Christine devait l’accepter, avec ça la moitié du chemin était parcouru. L’explication était si simple et semblait si psychologique que Maxine a décidé qu’après tout il y avait peut être quelque chose derrière cette histoire de Sorcellerie.


De Maxine à son coven

L’esprit principal du monde astral détermine la réincarnation de l’être humain de sa demeure dans le monde astral vers le monde physique. Le matériau astral de lumière est l’émanation la plus divine dans le monde astral. Pour les initiés qui voient le principe divin il apparaît comme la lumière du soleil ardent ou le soleil lui-même à condition qu’ils soient capables de contempler la divine providence dans le monde physique sans avoir à donner une forme humaine à leur déité ou à lui donner une forme particulière. La religion individuelle d'une personne a une répercussion dans le monde astral surtout si elle a attribué une forme et un nom particulier à sa déité selon ses idées religieuses dans le monde physique. Les athées ne ressentent nulle nécessité de Dieu, même dans le monde astral et sont en conséquence incapables d’y établir une idée de la déité. Mais ils ont besoin de quelque chose de plus élevé, un peu comme un homme assoiffé à besoin d’eau. Les gens qui ont cru en plusieurs religions ou déités au cours de leur existence sur la terre trouveront des conditions chaotiques, ils y auront des moments difficiles car ils ne seront pas capables de se décider quelle forme suivre. Mais au cours de leur développement dans le monde astral leur conception de Dieu se clarifiera et finalement ils croiront en la déité qui est la meilleure pour eux - cette conception de Dieu détermine d'habitude le lieu où se fera la réincarnation.

Un magicien ou une Sorcière, ayant expérimenté au cours de sa vie physique la sphère astrale de la zone entourant la terre, aura une connaissance personnelle de l’existence des esprits du monde astral et saura ce qu’il fait. Un être humain n’ayant pas atteint un très haut degré de perfection trouvera aussi ses guides spirituels dans le plan astral, tout comme un magicien ou une Sorcière trouvera ses guides spirituels dans le monde physique pour l'aider dans sa formation et ils lui donneront un enseignement par la communication passive ou l’écriture automatique. Ces guides l’éduqueront de temps en temps et l’assisteront lorsqu’il en aura réellement besoin. Les entités spirituelles hautement développées les commandent.

Un homme est comme il est au fond de son coeur. Chaque pensée est une petite graine dans le coeur.

Vous vous êtes développé jusqu’au point où vous avez le droit de montrer que vous êtes un initié. Mais plus vous rencontrerez de succès plus il vous sera difficile d'être humble. Votre développement magique et spirituel sur terre doit tendre à la perfection afin d’être préparé pour une vie dans la sphère la plus élevée.

Sachez ce que vous avez à faire. Quel est pour vous le pas le plus difficile à faire ? Que devez-vous faire pour vous aider et pour aider l’univers ? Qu’est ce qui vous semble le plus étrange dans ce que vous avez à faire pour rendre le monde meilleur pour ceux que vous laisserez derrière vous ?

Faites ce pas.


Le Début des Travaux

« Il faut trouver par soi-même, et en être absolument certain, qui est une personne, qu’est cette personne et pourquoi elle l’est. » - Aleister Crowley


« Pendant des années la théorie de la réincarnation a été un cauchemar pour moi et j’ai fait de mon mieux pour la réfuter et j’en ai même parlé avec mes patients en transe en disant qu’il s’agissait de bêtises. Mais au fil des années, en dépit de croyances différentes et variées, les patients les uns après les autres me racontaient la même histoire. Jusqu’à présent, plus d’un millier de tels cas ont été étudiés et je dois donc admettre qu’il existe quelque chose comme la réincarnation. - Dr Sir Alexander Cannon: « The Power Within »


Une des scènes les plus extraordinaires que j’aie pu voir s’est produite en 1975 à Notting Hill Gate, lorsque je pratiquais dans un cercle avec un coven dirigé par Maxine. Tout le monde était nu, sauf Maxine qui, en tant que Grande Prêtresse, portait une robe verte dont les replis étaient très révélateurs. Quatre hommes nus se tenaient autour du cercle, aux points cardinaux, dans la lumière des bougies. L’encens était si dense qu’il était presque palpable dans la pièce. D... était la Sorcière du portail Nord, il a maintenant atteint son Troisième Degré Wicca et c’est l’un de ses collaborateurs les plus compétents. Maxine lui ai demandé s’il voulait être admis dans le cercle. « Oui ».

Elle lui a alors donné une grosse gifle. Sa tête a volé en arrière vers la droite et il a fait une grimace de douleur. Ce n’était pas un petit coup de poing ni une claque de cinéma. Elle a crié, « Prouve que tu en es digne ! Prouve que tu as le droit d’être admis dans le cercle ! »

Selon moi il venait de le prouver, mais n’étant qu’un visiteur, je n’avais pas droit à la parole. D… n’a pas bougé, il est resté dans la position du Dieu qu’il avait prise. Il a entamé docilement les exercices de concentration que lui avait appris Maxine et qui fait partie de la formation de chaque Sorcière. Alors qu’il se concentrait, le reste du coven était trop surpris pour bouger. Puis, aussi prestement qu’elle l’avait giflé, elle l’a embrassé sur les lèvres et l’a invité à pénétrer dans le cercle. Leurs mains jointes en parfait amour et parfaite confiance. Saint François était, comme d'habitude, sur l’autel.

Maxine raconte un autre rituel, cette fois une initiation, pas Wiccane, qu’elle a vécue juste avant sa rencontre avec Alex.

Cela a toujours semblé incroyable pour les personnes qui avaient connaissance sur cet épisode de ma vie que ma mère et mon père, conscients des dangers courus, aient accepté que leur fille de quinze ans relève un tel défi, et en plus qu’ils l’encouragent et s’en félicitent. C’est incroyable. Je ne peux que rappeler qu’il s’agissait de personnes tout à fait incroyables.

« Maxine: The Witch Queen » Star Books, 1976, p. 21.

Victor semble penser que cet épisode était assez amusant, un peu comme s’il s’agissait d’un exercice physique pour sa fille qu’il avait l’habitude de traiter comme un fils. Maxine avait été entrainée pendant neuf mois avant d’être initiée, Victor se chargeait du chronomètre :

« Allons, tu peux faire mieux que ça ! Il savait qu’après tout cela il y allait y avoir une épreuve physique impressionnante et c’était tout un défi…en soi .... « Tu as intérêt à être en forme, je veux être fier de toi. »

« Maxine: The Witch Queen » Star Books, 1976, p. 21.

A l'époque il est peu probable qu’elle-même ait su ce qui l’attendait et en plus les détails précis sur le culte et ses membres ne doivent pas être révélés. Il s’agit d'un culte égyptien et l’initiation lui a pris neuf jours et tout le courage dont elle était capable. Elle a été emmenée un soir, par surprise, dans une limousine. On lui a bandé les yeux et on la conduit dans une grotte et on lui a dit d’attendre. Le bandeau a été retiré, on lui a donné un flambeau et on lui a dit de trouver sa propre voie dans un tunnel.

Quand je suis arrivé au bout du tunnel, j’ai vu une chaîne accrochée à une grosse stalactite. Je savais que tout le temps des yeux me regardaient, mais je ne pouvais faire confiance qu’à cette voix qui me disait maintenant, « Saute, puis baisse-toi. J’ai donc sauté pour attraper la chaîne, mais lorsque je l’ai attrapée elle est descendue, maintenant je suis presque certaine que c’est ce qui était prévu. Je me suis laissée descendre avec la chaîne, environ six ou sept mètres, je pense.

Elle était sur une corniche et dans une totale obscurité.

Puis j’ai vu une lumière en face de moi, mais la lumière semblait faible et quand je me suis approchée, j’ai vu qu’il y avait des flammes sur le sol ... et à nouveau je savais, de par ma formation, que je devais marcher à un certain rythme à travers ces flammes. En raison de la façon particulière de marcher, je suis parvenue sans problème de l’autre côté où l’on m’a dit d’enlever mon vêtement du dessus et, uniquement vêtue de la robe blanche du dessous, on m’a envoyé vers un autre tunnel où immédiatement j’ai senti qu’il y avait de l’eau autour de mes pieds. Plus je marchais plus je m’enfonçais dans l’eau et plus le plafond était bas au-dessus de moi, à un moment j’ai été contrainte de prendre une profonde respiration et de marcher sous l’eau. C’était ça ou revenir en arrière et je savais que si je le faisais, je n’aurais jamais retrouvé mon chemin .... Mais l’eau a baissé et une fois de plus je marchais vers la lumière et pour finir j’ai émergée, toute mouillée, dans une vaste grotte .... J’ai été éblouie de façon différente par les riches vêtements et les masques colorés de quarante-deux personnes assises sur des sortes de trônes sculptés dans la roche. Chaque masque était le masque d’un ancien dieu égyptien. C’était les évaluateurs de la loge occulte et c’était leur Hall du Jugement.

« Maxine: The Witch Queen » Star Books, 1976, p. 23-24

Ayant vécu tout cela, Maxine a continué à recevoir les sacrements catholiques. Mais je doute qu’elle en ai parlé au Père O'Callaghan.


Qu’est-ce qui fait une Sorcière? – se demandait Stewart Farrar, un Grand Prêtre initié par Maxine, « Peut-être un sens de l’émerveillement. » Je parlerais aussi d’un sentiment de l’étrangeté des choses, les dangers et les complexités de la nature et tout ce qui l’habite - le désir d’apprendre et le courage d’affronter l’inattendu. Peut-être que St Thomas d’Aquin avait raison et que Voltaire avait tord au sujet de ce qui était le meilleur des mondes possibles. Etant donnée la nature de l'évolution de l'homme, il s’agit peut-être du meilleur des mondes possibles. Et l’aspirant magicien, s’il souhaite devenir expert, cherche à expérimenter toutes choses. Tout d’abord, quelques observations de Paul Huson.

Dans le cercle de lumière de feu que nous aimons qualifier de civilisation scientifique éclairée, nous avons l’habitude de nous sentir en sécurité en sachant que la plupart de nos pires terreurs et cauchemars d’enfant n’étaient que simples fantaisie. Quant la lueur du feu faiblit, à ces moments où l’inconnu nous oppresse fortement, en présence de la mort, de la folie ou de calamités insurmontables, nous savons à nouveau instinctivement que la science n’a finalement aucune importance et nous expérimentons une fois de plus nos vieilles terreurs d’enfance. Cependant, à travers les âges, certains intrépides ont pensé que ce n’est qu’avec des armes forgées à partir des ténèbres elles-mêmes, et avec l’aide de ceux qui ont fait profession de commercer avec le monde invisible, tout homme peut peut-être espérer modifier par sa volonté un destin indifférent dont les racines semblent atteindre les régions externes de cette nuit.

Paul Huson, « Mastering Witchcraft » (Corgi, 1970) p. 5

La première des choses à dire au sujet de la Sorcellerie, Blanche ou Noire, c’est que ça marche. Si ce n’était pas le cas, ce que beaucoup de ceux qui l’ont utilisée et savent donc mieux, réfutent toujours, le sujet n’intéresserait que les anthropologues ou les étudiants de religion comparée. Dans son superbe livre « Supernature », le Dr Lyall Watson consacre un chapitre à la Sorcellerie Noire. Il y raconte comment les expériences ont prouvé que, « Sans doute ... quelqu’un qui croit qu’il a été ensorcelé peut se rendre malade et même mourir, mais ... il n’est pas nécessaire que vous imaginiez vos propres idées destructrices. Quelqu’un d’autre peut les imaginer et vous en parler. (« Supernature » Coronet Books. 1974, p. 281) Le Dr Watson fait référence à un travail qui a été mené par le Dr Milan Ryzl en Amérique :

Milan Ryzl ... raconte une série d’expériences de télépathie où l’expéditeur a essayé de transmettre des bribes d’émotions. Lorsque l’expéditeur s’est concentré sur l’anxiété et la suffocation et a conjuré des attaques de crises d’asthme, le receveur éloigné de plusieurs kilomètres a souffert d’une crise intense d’étouffement. Lorsque l’expéditeur s’est concentré sur les émotions sombres et a reçu un médicament anxiolytique, l’électroencéphalogramme du récepteur a eu la réponse appropriée et le récepteur a commencé à éprouver de fort maux de tête et une sensation de nausée qui a duré pendant des heures.

Dr Lyall Watson « Supernature » Coronet Books. 1974, p. 281

Je ne veux pas m’appesantir – en tout cas pas trop - sur l’aspect ensorcellement de la Sorcellerie, parce que les Sorcières Blanches, en théorie en tout cas, n’agissent que rarement à l’encontre de quelqu’un d’autre et si elles le font c’est plus pour éviter les problèmes que pour en créer. Il devrait être évident que si vous pouvez provoquer des maux de tête à une personne, vous pouvez aussi les faire partir, vous pouvez vouloir que votre sujet soit en bonne santé, qu’il ait de la chance, qu’il soit heureux en amour, etc. Mary Baker Eddy, la fondatrice de la Science Chrétienne, en était consciente, même si on a dit que ses adeptes ont réduit la Science Chrétienne à de l’optimisme insipide. (Elle savait aussi que l’on pouvait faire du mal par télépathie, elle a essayé de le dissimuler à ses élèves.)

Les travaux de guérison spirite fonctionnent sur le même principe, mais alors que les Sorcières utilisent des familiers pour mener à bien leur travail de guérison, les spirites parlent d’humains désincarnés, ou de ce qu’ils qualifient de « esprits guides ». Le premier principe de la Sorcellerie, c’est que la pensée est une force et qu’elle peut être dirigée. Le second c’est que l’être humain a, faute d’un meilleur adjectif, des pouvoirs cinétiques de pensée que l’on peut, de façon naturelle ou en s’y entraînant, utiliser pour obtenir des résultats dans ce que nous choisissons d’appeler le monde « réel ».

Mon oncle « Doc » est une Sorcière naturelle qui a découvert ses pouvoirs lorsqu’il était enfant quand il a été mordu par un chien. Il a voulu que le chien meure, ce que le chien a fait de façon fort aimable le lendemain, alors qu’il était en bonne santé. Les réflexes de Doc sont si vifs qu’il peut attraper des mouches en plein vol. Il affirme qu’il a renoncé à ce genre de souhaits qui ont abouti à la mort du chien, mais je ne me souviens surtout de ses côtés positifs.

Des chercheurs contemporains ont prouvé les deux principes dont je viens de parler. Les sorcières et les peuples primitifs les connaissent depuis des milliers d'années.

L’utilisation d’un anxiolytique dans les expériences du Dr Rizyl suggère une autre façon dont la science moderne est parvenue à d’anciennes pratiques : la potion séculaire des Sorcières. Tout comme Alex Sanders, Maxine est célèbre pour sa connaissance des plantes médicinales. En Suède, des expériences sur le gui (Dr A. Fyle « A Moon and a Plant » London, Society for Cancer Research, 1968) ont démontré que ce qui était autrefois considéré comme de la superstition, que l’on doit « ramasser telle ou une telle plante à minuit précise ou à telle ou telle une heure le matin » n’était pas si ridicule. Les expérimentateurs ont constaté que la plante est extrêmement sensible aux conditions de temps et de lieu, et même à des influences extra-terrestres telles que la pleine lune, les éclipses de lune et ce que les occultistes appellent les heures planétaires. Comme le dit Watson : « Rien n’est identique d’un moment à l’autre ». Pour capter et distiller l’essence nécessaire d’une plante spécifique, il faut la ramasser, au propre et au figuré, quand le moment est venu.

A ce sujet je me souviens du mépris qu’éprouvait un de mes amis pour les alchimistes qui ne faisaient leurs expériences que sous la pleine lune. Où d’autre, à cette époque, aurait-il pu se demander, pouvait-on trouver suffisamment de lumière polarisée ?

S’il est possible d’imprimer ses propres pensées sur un autre esprit humain, il est au moins possible que l’on puisse ainsi être en mesure d’imposer sa volonté à des objets inanimés. Je ne parle pas de psychokinèse, un phénomène qui a été bien étudié en laboratoire, mais de la façon dont une sorcière peut « charmer » des talismans, des potions ou des choses, pour qu’elles accomplissent sa volonté. Ainsi, on peut imprimer une opinion sur quelque chose qui peut ingérée, même de la nourriture ordinaire. Il s’agit de l’une des significations de « la bénédiction » de la nourriture lors des repas, ce qui est précisément ce que faisait un personnage historique au pain et au vin il y a quelque 2000 ans lors de ce qui était peut-être le repas le plus célèbre de l’histoire. Les talismans portés sur la personne peuvent avoir un effet bénéfique en plus de leur valeur psychologique. J’ai consacré de la nourriture pendant que je la faisais cuire, avec l’intention de remonter le moral d’une personne précise ou pour qu’elle soit dans telle ou telle disposition d’esprit et cela a fonctionné de façon spectaculaire. Maxine a une fois béni pour moi une magnifique croix en laiton et émail, et une fois, alors que je partais à Paris, elle m’a donné un peu d’huile de Vénus pour que je m’en frotte la peau. Excessif comme je le suis généralement, je l’ai utilisée pour tracer un pentagramme invisible à la tête de mon lit à l’hôtel. Le résultat a été l’une des catastrophes les plus cocasses que je n’aie jamais connue.

Avant d’aborder le côté surnaturel et religieux de la Sorcellerie, il faut envisager une troisième arme parmi celles de la Sorcière, souvent considérée à tort comme son unique arme. C’est le pouvoir de suggestion. « La Sorcellerie, mon cher » m’a dit Maxine lorsque je l’ai rencontrée pour la première fois, est environ à quatre-vingt-cinq pour cent « psychologique ». C’est une exagération mais l’idée n’est pas fausse. On peut utiliser le pouvoir de suggestion pour guérir ou porter chance à une personne. Mais il peut être plus intrigant, de façon macabre, de donner au lecteur quelques informations sur la façon dont une Sorcière de contes de fées utilise le pouvoir de suggestion pour ensorceler.

Faisons d’abord une petite expérience, ce que j’appelle le truc de citron. Ce n’est pas vraiment de la magie, mais il illustre la façon dont la suggestion peut jouer un rôle dans le véritable travail magique.

Chassez toutes les pensées de votre esprit - posez ce livre pendant une minute, si vous voulez. Visualisez maintenant un beau citron juteux. Le jus circule librement dans le citron, parce qu’il a été conservé au chaud et non au réfrigérateur.

Coupez maintenant le citron en deux. Le jus jaillit à la minute où vous plantez le couteau dans le citron. Prenez maintenant la moitié du citron et tirez la langue. Maintenant, frottez le côté coupé du citron sur et sous votre langue. Le jus coule et il est si acide que vos mâchoires peuvent le sentir. Le goût du citron passe dans toute votre tête. Votre bouche est pleine de jus de citron.

Maintenant, si vous vous êtes bien concentré pendant une minute, vous constaterez que votre bouche est pleine de salive. Rien ne vous a été fait physiquement mais votre corps a réagi à la simple suggestion. Et si la pensée dirigée sans stimulus physique – ce que je viens de faire en vous mettant l’eau à la bouche, et je suis probablement des centaines de kilomètres de vous – et si la télépathie est possible alors la Sorcellerie l’est aussi. Si vous êtes un de ces cas difficiles qui ne réagit pas aux expériences, alors j’attendrais que vous soyez endormi, sans défense et totalement réceptif, pour travailler sur votre esprit et vous envoyer des pensées.

L’utilisation d’une poupée de cire ou de pâte à modeler faite à l’image d’une personne devant être ensorcelée et remise à la victime (cela n’est nécessaire que pour le côté suggestion pas du point de vue magique), est un autre très bon exemple du pouvoir de suggestion. Idéalement, un peu de cheveux de la victime ou une rognure d’ongle aura été placé dans la poupée. Se les procurer peut être un peu compliqué. Si vous ramassez une rognure d’ongle au beau milieu d’une conversation, votre victime pourrait penser que vous êtes un peu bizarre. Si vous volez des cheveux dans le peigne de quelqu’un il vous faudra être tout à fait certain qu’il s’agit bien de ses cheveux. S’il ou elle est votre ami (qui sera bientôt un ex-ami) les cheveux pourraient bien être les vôtres. Ce serait une tuile comme on dit. Le sort, s’il marche, aura l’effet boomerang.

Une des meilleures - ou pires – poupées de cire que je n’ai jamais vues était une poupée dont les cheveux, comme la perruque de Christine, étaient composés uniquement de véritables cheveux tissés, cette fois ceux de la victime. La poupée était habillée comme la victime, ses yeux étaient fermés et elle avait été placée dans un cercueil miniature. Maxine était en train de neutraliser le charme lorsque je l’ai vue.

Ceux qui considèrent que les « adultes qui jouent à la poupée » sont ridicules auront de quoi réfléchir si un jour ils reçoivent une poupée de cire. Je les ai vues et ce n’est pas beau à voir.

Quoi qu’il en soit, imaginons que vous receviez un petit cadeau de ce genre par courrier, ou pire que vous le trouviez à la porte arrière de votre maison ou peut-être sous votre oreiller. (Déjà, le sorcier, qui est évidemment aussi un cambrioleur prometteur, a planté une pensée dans votre esprit: « Si celui qui a posé cela à pu venir si près...») Votre première réaction sera la peur. Ensuite, étant une personne moderne, rationnelle et non superstitieuse, vous allez vous forcer à rire. Essayer de faire peur à des adultes avec des poupées ...

Voilà l’objectif du sorcier. Le rire est une forme d’hystérie et il vous a rendu hystérique. Afin de vous convaincre que ce ne sont que des sornettes, vous brisez la chose en morceaux et la jetez à la poubelle. Mais inconsciemment, sachant que la poupée est faites à votre image, vous vous êtes détruit, vous avez joué son jeu. En détruisant la poupée vous avez aussi montré que vous avez un peu peur de lui. En fait, vous avez agi de façon très irrationnelle : les lois contre la sorcellerie ont été abrogées, mais l’intimidation psychologique c’est autre chose et cette poupée en aurait été la preuve. La peur engendre l’erreur et la personne qui vous ensorcelle peut désormais compter sur votre totale coopération, même si c’est de façon inconsciente. Cela m’a été raconté par des sorciers qui ont lancé des sorts avec succès à des personnes intelligentes. « Après je lui fais savoir que je m’occupe de lui » m’a-t-on dit « le reste fut facile. Il a tout fait lui-même. J’aurais tout aussi bien pu lui faire un paquet et aller au pub. » Le Dr Lyall Watson cite le cas d’un chasseur d’Afrique Occidentale Française qui « maltraitait et assassinait ses propriétaires locaux jusqu’à ce que, en une forme de justice privée, ils se sont arrangés pour qu’un sorcier lui envoie un sort de mort ».

Dans une clairière dans la jungle les sorciers avaient plaçaient le corps d’un homme récupéré dans un village voisin, il était vêtu de l’une des chemises du Belge, on avait placé des cheveux du Belges sur les siens et fixé des rognures d’ongles du Belge sur les doigts du corps et on avait rebaptisé le corps ... dans le même temps … ils chantaient et tambourinaient en concentrant leur haine colérique sur l’homme blanc à des kilomètres de là. Un certain nombre de ses employés, en faisant semblant d’éprouver de la sympathie pour lui, ont fait en sorte que le Belge sache que tout cela avait lieu et se poursuivrait jusqu’à sa mort. Rapidement il est tombé malade et est décédé.

Dr Lyall Watson « Supernature » Coronet Books. 1974, p. 282

Le Dr Lyall Watson pense, tout comme moi, n’en sachant pas plus sur ce cas, que la cause du décès fut probablement l’autosuggestion. Mais il pense qu’il ne s’agit pas des seules causes du décès.

La découverte de ce qui semble être une maladie transmise par télépathie suggère que la cérémonie elle-même peut être importante. La frénésie de haine autour du cadavre dans la jungle a certainement eu un effet hypnotique sur les participants et a dû produire exactement les conditions nécessaires pour créer un état de télépathie, la… poupée dans ce cas ... a été un point focal pour les émotions qui ont elles-mêmes causé des dégâts à distance.

Il est possible qu’ici une véritable magie sympathique et le pouvoir de suggestion aient été utilisés dans ce qu’on pourrait appeler un mouvement de tenailles sorcière.

Je pense que la meilleure description du pouvoir de la Sorcellerie appliqué à des fins personnelles a été donnée par Louise Huebner, une petite sorcière énergique qui pratique sur la côte Ouest des Etats Unis. Elle dit : « si vous voulez que votre amant vous appelle, c’est une pensée pleine d’attente, si le téléphone sonne deux minutes plus tard, c’est de la Sorcellerie. »

Par ailleurs, en parlant de Louise Huebner, elle nie l’existence d’homme Sorcière. Là, elle témoigne d’une ignorance courante de la Sorcellerie, les anglo-saxons comme les latins utilisent le même mot qu’il s’agisse d’homme ou de femme. Le mot « Warlock », que certains utilisent pour désigner l’homme Sorcière, vient d’un verbe, une pratique sorcière que je ne peux pas révéler.

Le charme et le pouvoir de la langue anglaise viennent de ses particularités et maintenant, avec le temps, il y a de nombreux Warlocks en Angleterre. Ce sont eux qui se qualifient de la sorte, cela n’affecte pas leur magie. Ce qui compte c’est si une personne obtient des résultats ou n’en obtient pas.

La télépathie, la force de la pensée et le pouvoir de suggestion, ainsi que les herbes médicinales, les potions, les huiles et plus rarement utilisées, les médecines naturelles homéopathiques, les pierres curatives et la thérapie par les couleurs, sont autant de sources naturelles d’énergie pour les pouvoirs de la sorcière. Un très grand professeur a enseigné ces sujets à Maxine Morris et elle est devenue experte dans la plupart de ces domaines. Mais la Sorcellerie est une religion ainsi qu’une science populaire et elle a aussi suivi un apprentissage sur cet aspect.

Quelqu’un a fait remarquer que les Sorcières Blanches, en tant que communauté religieuse, sont profondément et sincèrement pieuses. Beaucoup de ceux qui finissent par quitter la Sorcellerie - « des Sorcières périmées », comme les appelle Alex - deviennent bouddhistes. On parle de l’Art des Sorcières avec amour et respect ou pas du tout, bien qu’un peu d’humour sur les aspects inessentiel de la Wicca n’est non seulement permis, mais parfois encouragé, en particulier si l’un des nouveaux initiés se comporte comme s’il croyait être le Saint-Esprit. La sorcellerie, en tant que religion, n’est rien si elle n’est pas joyeuse. Si un couple ne peut pas rire lorsqu’ils sont ensembles au lit, ils ne sont pas vraiment amoureux, si une sorcière ne peut pas rire de ses propres faiblesses et de l’amour qu’elle partage - avec difficulté, parfois - avec ses amies sorcières, alors il manque quelque chose. Et la nature véritable et sacrée de sa religion devient, en raison de la facilité qu’éprouve la sorcière, d’autant plus évidente pour elle.

Accorde à nos amis au sein de l’Art et en dehors de l’Art, votre amour, de bonnes paroles et de la gaieté. Ne les trahissez pas, mais que tes mains ne leur donnent que bonté.

Le Bréviaire du Diable

La Wicca est l’une des religions la plus idéaliste, parce que chacun de ses membres est un prêtre ou une prêtresse - comme dans l’idée protestante où « chacun est son propre prêtre ». Il ou elle est entièrement responsable de l’utilisation du Pouvoir et lors de l’initiation l’on est fait un serment voulant que celui qui abuse des pouvoirs verra « mes armes se retourner contre moi ». Le Livre des Ombres interdit absolument à toute Sorcière de menacer une autre personne par Sorcellerie.

Ne cherchez pas querelles et conflits, quelle qu’en soit la raison. Ces raisons de conflits sont issues de fantasmes et de peurs. Cherchez plutôt des raisons de respect mutuel et savourez ensemble les multiples possibilités de la vie.

Le Bréviaire du Diable

Malheureusement, cette règle est souvent violée. Mais ce n’est pas le sujet. Si un méthodiste commet un vol ou un assassinat, cela ne retombera pas sur toute l’église méthodiste. En plus de la Loi du Karma, on enseigne aux Sorcières que le bien ou le mal qu’elles font leur revient au triple. Si cela vous semble être de la propagande religieuse, ce n’est pas vrai : nombreuses sont les Sorcières, dont votre serviteur, qui se sont brûlées les doigts brûlés, car, en colère, elles ont ignoré cette loi. Les Sorcières ne sont pas des dieux, elles font des erreurs comme tout le monde et, comme tout le monde, ils en paient les conséquences. La Sorcière bien formée transforme « Fais aux autres ce que tu voudrais qu’on te fasse » en « Fais aux autres ce que tu voudrais qu’on te fasse parce que c’est exactement ce qui va se passer ». L’essentiel est de garder purs ses buts, ses motivations et ses idéaux.

Conservez intact vos idéaux et respectez l’idéal des autres, car nombreux sont ceux qui se battent pour la grandeur d’autres personnes et leurs vies sont aussi touchées par la gloire.

Le Bréviaire du Diable

J’aimerai que plus de chrétiens se souviennent que les principales divinités des Sorcières sont le Dieu Cornu et sa Conjointe – ou si vous considérez la chose d’un point de vu féministe, la Déesse et son Conjoint. Ces créatures, Jung parlerait d’archétypes, symbolisent et personnifient les principes masculin et féminin actifs partout dans l’univers. Ce sont des personnifications autochtones Britannique du yin et du yang. Ils ont de nombreux noms, mais pour les initiés Alexandriens, ils sont appelés Karnayna et Aradia. On les appelle aussi Cernunnos et Habondia. Shakespeare en a parlé dans Songe d’une Nuit d’Eté. Il les a appelé Oberon et Titania. Pour les Sorcières, ces sont les divinités suprêmes, l’être humain ne peut pas aller plus loin vers l’inconcevable Source de vie Unique tout en restant dans son univers physique, Source de vie Unique très proche de ce que le Dr Watson appelle supernature. La théologie des Sorcières envisage la divinité comme composée du masculin et du féminin, parce que les principes masculins et féminins sont évidents dans tout ce qui existe dans le monde physique - et du monde physique, la Sorcière tire ses premiers indices.

Comme l’a écrit l’occultiste Dion Fortune, une religion sans déesse est un premier pas vers l’athéisme.

La Sorcellerie est, comme je viens de le laisser entendre, une religion de la nature, elle est née de la terre et ses festivals saisonniers célèbrent les mouvements du cycle de l’année. Ce sont les « fameux » Sabbats, ils n’ont rien à voir avec les Messes Noires pas plus qu’ils ne sont une parodie des messes chrétiennes. Au contraire, les fêtes et les rites chrétiens sont souvent de scandaleux plagiats des cérémonies Wiccanes qui sont bien plus anciennes, et de nombreuses églises chrétiennes ont été construites sur les sites de culte des Prytani. Il y a d’anciens monuments de l’Ancienne Religion partout en Grande-Bretagne, Stonehenge en est l’exemple classique. Les Sorcières contemporaines adorent visiter des tels lieux et elles y ont des activités sorcières lorsque c’est possible. Je connais un très grand double cercle dans la région de Lake District. Il est inconcevable qu’il puisse s’agir d’autre chose que d’un cercle de Sorcières. Les archéologues le datent d’environ 1800 avant notre ère.

En adorant le dieu et la déesse, certains covens ont tendance à mettre l’accent sur l’aspect masculin et certain, en particulier les Alexandriens, sur l’aspect féminin. (Une sorcière m’a fait remarquer : « Quand Maxine est dans un cercle et qu’elle assume le rôle de la déesse, vous n’avez pas besoin d’imaginer qu’elle incarne la déesse. Elle ressemble à la déesse. ») Dans les rituels de sorcellerie le Grand Prêtre tient le rôle de Karnayna, alors que la Grande Prêtresse tient celui d’Aradia. Lors d’une bonne nuit si le rituel est correctement pratiqué les caractéristiques de la Grande Prêtresse peuvent réellement changer et elle peut devenir le dieu lui-même. J’ai vu cela se produire. Dans la forme de Sorcellerie que sa grand-mère a enseignée à Alex et qu’il a propagée plus tard, la Grande Prêtresse est reine de la ruche. Elle est stricte, mais aussi aimante et source de vie :


Reine de la Lune, Reine du Soleil,

Reine des Cieux, Reine des Etoiles,

Reine des Eaux, Reine de la Terre,

Apportes-nous l’enfant de la Promesse.


En tant que représentante de la Déesse dans le cercle magique, la Grande Prêtresse révèle ses secrets aux enfants de la Wicca.

Sois doux avec ton corps et non pas sévère, car je t’ai donné ton corps comme un don et tu es mon enfant. Et ne cherche pas à mutiler le corps de ton ennemi car je l’ai aussi créé.


Ne crains pas le passage des années, car la sagesse n’est pas sur mon visage de jeunesse, mais elle se trouve sur mon sombre visage. Ne crains pas la vie et rappelles-toi qu’à la fin, le cycle de mort et renaissance marquera toutes les choses.

Ne crains pas la mort car, comme tu es mon propre véritable serviteur, je t’envelopperais dans mon manteau et tu dormiras jusqu’à une nouvelle aurore.


Car saches que je suis celle qui a filé ce monde. Je suis la déesse immuable et en perpétuelle évolution ... Reine du Ciel, je suis celle qui est couronnée d’étoiles. Mon manteau couvre tous les hommes et ma voix est le murmure des vents à minuit.

O mon serviteur bien-aimé, viens à moi secrètement. Adore-moi dans le silence et je te donnerai une multitude de bienfaits ... Je te promets l’extase, dans un aboutissement de tout désir.

Le Bréviaire du Diable

Peu de temps après l’incident de la perruque, Alex, qui même s’il est bisexuel n’en est pas moins un homme vigoureux - comme ceux qui ont assisté à un match de boxe en sa compagnie vous le diront – est tombé amoureux d’un jeune homme de Stockport, Cheshire. Il se trouvait en permanence à faire la navette entre l’appartement de Paul et sa propre demeure à Oldham Road, et parfois lors de ses déplacements il était accompagné de la fille turbulente de son amie Dorsie, qui avait pataugé dans l’eau et vu la lumière. Elle avait développé un intérêt certain pour la Sorcellerie. Elle était une élève vorace et difficile à satisfaire. Un soir, à l’appartement de Paul, par une froide nuit de novembre alors que Maxine, Alex et Paul venaient de boire deux bouteilles de vin et que Maxine était proche de somnoler dans le grand fauteuil Windsor à côté du feu, Alex, qui était assis par terre dans la position du Buddha, a soudain bondit sur ses pieds. Il avait pris sa décision.

Il est allé chercher une valise rangée sous le buffet.

Il a sorti la plus belle chasuble que je n’ai jamais vue de cette valise toute cabossée. Le vêtement était rehaussé de fils argentés. L’argent reflétait la lumière du feu. Il était couvert de ce qui ressemblait à des milliers de petites perles, cousues à la main. Alex m’a dit - il ne m’a pas demandé mon avis - que le moment de mon initiation était arrivé, que je devais recevoir mon premier degré.

« Je ne sais pas - il a été si impératif que je ne pouvais pas avoir d’objection. Mais le plus étrange est que je ne voulais pas. J’ai été envoyée prendre un bain pour me purifier avant la cérémonie et j’ai dû lui obéir avec la douceur d’un agneau sur le point d’être envoyé à l’abattoir. Quand je suis revenu, nue - je n’avais jamais été nue devant un homme auparavant, et encore moins deux – J’ai mis la robe et j’ai laissé tombé mes cheveux sur mes épaules. » Pendant ce temps, Alex et Paul avaient mis en place des objets pour le cercle. Les épées et les couteaux, mais surtout l’escourge, m’ont rendu si nerveuse que j’ai dû aller aux toilettes cinq fois en quinze minutes. Enfin, tout était prêt. Alex était le Grand Prêtre, Paul et moi, nus l’un contre l’autre avec le couteau à manche noir entre nos poitrines, nous avons consacré un athamé. » Comme l’athamé va au calice,

... L’homme va … à la femme ... ...

Cette nuit-là, elle a reçu les trois degrés en Sorcellerie.

« Ma timidité oubliée, nue dans le cercle avec Paul, les Chérubins d’Autrefois et les Porteurs de Sandales d’Or m’ont transportée dans l’Egypte antique où j’avais vécu avant dans le pays de Khem dans un autre corps, plus sage que celui où j’habitent maintenant, quand je portais les Plumes de Vérité. "


Une Sorcière à Temps Partiel

Ce n’est que quelques mois après mon initiation que j’ai commencé à réaliser combien Alex pouvait être sournois. Il savait que ma mère rejetait l’idée que la publicité pouvait être bénéfique pour un groupe occulte, en particulier pour la sorcellerie. Comme mon intérêt pour la Sorcellerie augmentait, ma mère a commencé à regretter de m’avoir présenté Alex. Mon statut de vierge, aussi, était manifestement en danger. Je pense qu’Alex avait senti la forte relation que j’avais avec ma mère et je pense honnêtement qu’il s’est mis à me discréditer à ses yeux. »

Pendant des mois, Maxine encore adolescente avait été une Sorcière. Elle n’a jamais osé le dire à Dorsi, mais sa mère n’était pas aveugle. Les réunions et les nuits où elle découchait, lorsque les luxueux tissus rouges d’Autel servaient de draps dans l’appartement de Paul, étaient fréquents. Paul allait bientôt déménager et le coven de trois personnes se réunirait ensuite à Oldham Road.

A Stockport l’appartement de Paul se trouvait dans un immeuble appartenant à un prêtre qui avait été forcé de se retirer parce que sa citation préférée de saint Paul était : « Un peu de vin est bon pour l’estomac ». Un dimanche matin, il est tombé à la renverse en chaire, car il avait oublié le côté « un peu ». Il vivait dans un appartement en rez de jardin. Le premier étage était occupé par deux vieilles dames. Si le prêtre avait su que deux Sorcières faisaient des expériences de matérialisation d’OVNI au deuxième étage, son dévouement à St Paul aurait été encore plus grand. (C’est aussi à cette époque qu’est né Michael, un enfant esprit créé par Alex et Paul lors d’un rite de masturbation mutuelle. Michael est toujours là.) Les travaux liés aux OVNI ont abouti à une étrange fumée verte qui s’est installée définitivement dans l’appartement de Paul et filtrait dans le couloir. Il y avait aussi des ronflements bizarres. Mais le pire, en ce qui concerne l’appartement de Paul, est arrivé lorsque les deux vieilles dames ont martelé à sa porte.

Les dames n’aimaient pas Alex. Elles étaient toujours à la porte, invariablement vêtues de chemises de nuit en dentelles victoriennes et bonnets de nuit, l’une armée d’une bougie allumée et d’un pot de chambre, généralement elles lui refusaient l’entrée dans les lieux. Alex avait pris l’habitude de passer devant elles sans un mot. Elles se plaignaient continuellement au prêtre de la fumée verte et des bruits bizarres. Mais le pire est arrivé alors que Paul, tranquillement assis sur les toilettes à l’étage, a entendu des voix dans la cabine voisine.


« Quel beau garçon aux cheveux d’or ! »

« Oui ».


Il s’est levé pour partir.


« Et quelle belle feuille de papier moelleux rose ! »

Il était temps, il le savait, de s’en aller. Le prêtre, dont les soupçons avaient été éveillés lorsqu’on a commencé à signaler des observations d’OVNI autour de Stockport, était du même avis. Paul a donné un mois de préavis, il a emménagé avec Alex, qui avait déjà vendu sa maison et acheté un appartement.

Alex, Maxine et Paul ont continué à pratiquer la Sorcellerie à Oldham Road. Alex, à la demande de Dorsi, avait fait quelques prédictions concernant sa fille. A cette époque elles semblaient peu probables. Maxine Morris était censée porter prochainement des robes de soirée élégantes et devenir un centre d’intérêt pour le public. Et elle devait aussi fréquenter des personnes riches et de célèbres et parler d’égale à égale avec ses stars de cinéma préférées. Elle était encore un peu nerveuse en public, Alex l’avait surnommée « Crécelle ». Mais il a assuré à Dorsi que les prévisions étaient exactes.

Une chose qu’il n’a pas dire à Maxine, ou en tout cas pas à cette époque, c’est que Dorsi allait mourir dans l’année.

Mais avant cela un coup de publicité a été organisé. Il devait rendre Maxine célèbre et créer un fossé entre les deux femmes, brouille qui dura jusqu’à la mort de Dorsi.

Il y a un endroit dans le Cheshire, près Alderley Edge, que les Sorcières connaissent bien. Des Sabbats y sont fréquemment célébrés. Quelques jours avant la date prévue pour une initiation, Maxine a été présenté à deux hommes qui, lui avait dit Alex, étaient des Sorcières. « Je pensais qu’il y avait quelque chose d’étrange dans leurs manières. Pour moi, ils n’avaient pas l’air de ce que j’imaginais être des Sorcières ou de parler comme des Sorcières. » Néanmoins, les deux personnes ont accompagné les Sorcières sur le site. Le feu a été allumé, et un autel de fortune en pierre a été dressé. Maxine a tracé un cercle et a commencé les rites nécessaires avant que les candidats puissent être introduits dans le cercle. L’initiation a commencé, un homme et une femme ont été conduits dans le cercle, les yeux bandés et nus, les mains liées derrière le dos avec des cordes qui liaient aussi leurs cous.

Maxine était entré dans une transe profonde, tout en restant vaguement consciente de ce qui se passait autour d’elle, ainsi quelques minutes plus tard elle a remarqué des flashs de lumière blanche à l’extérieur du cercle. Au début, elle a pensait qu’il s’agissait d’une sorte de phénomène psychique, mais elle a réalisé que les lumières étaient des flashes d’appareil photo.

Alex et Maxine sont de grands collectionneurs de photos, elle a pensé qu’à la demande d’Alex des Sorcières faisaient des photos de la cérémonie. Elle a oublié les flashes et a continué ce qu’elle faisait.

Une semaine plus tard, elle a ouvert la porte à deux hommes qui venaient de sonner à sa porte. L’un d’eux avait une caméra. « Morris Maxine ? La Sorcière ? »

« Je suis désolée, je ne donne pas d’interview. » Elle a refermé la porte poliment mais fermement. Elle a appuyé son dos contre la porte et fut prise de panique.

Comment avaient-ils pu la trouver ici ? Les journalistes étaient venus de Londres, d’après le nom du journal pour lequel ils affirmaient écrire, et avaient retrouvé le petit appartement qu’elle avait loué en raison de l’accroissement du nombre de querelles avec Dorsi. Confuse et effrayée, elle est restée chez elle pendant une heure. Pensant aller voir Alex, elle a mis son manteau et est sortie de son appartement. Immédiatement elle fut entourée de photographes et de journalistes avec des bloc-notes. Elle a fendu la foule et, comme ses jambes étaient plus longues que les leurs, elle a distancé ses poursuivants.

Reprenant son souffle, elle a cogné à la porte d’Alex. Paul a ouvert, il était radieux.

Demandant à savoir ce qui se passait, elle a répondu avec un large sourire. Enfin, las de l’interrogatoire de Crécelle, ils lui ont dit qu’ils avaient de grandes nouvelles aujourd’hui. Des journaux de tout le pays publiaient des articles parlant de la pauvre, Maxine éduquée dans un couvent, qui s’était laissée entraîner dans des orgies sataniques et dominée par le fameux magicien noir Alex Sanders. La fin amusait énormément Alex.

Alex et Paul ont commencé par éclater de rire. Maxine a rugi, mais pas de rire. Enfin, ils ont réussi à la calmer et lui ont promis de ne plus jamais se livrer à ces « coups de publicité dégénérés ». Mais la boîte de Pandore avait été ouverte. La semaine suivante, elle a vu le gros titre d’un journal local.

SORCELLERIE – NOUS REVELONS LA VERITE NUE

La vérité nue, ce fut Maxine. Les prédictions d' Alex au sujet de gloire et de fortune étaient proches de se réaliser. Mais le prix à payer était élevé.

Heureusement Dorsi ne l’a pas appris, pas plus que ses voisins. Mais le lendemain on a vu des affiches, un peu partout à Manchester, où l’on pouvait lire : NOUS DENONCONS DES SORCIERES A CHORLTON. Maxine est allée au travail en ayant peur de le perdre (elle était secrétaire dans un garage). « Plus jamais » s’est-elle promis. Mais malgré les promesses d’Alex, il lui a dit cette nuit qu’ils allaient être présents lors d’une conférence à Willesden.


« Tu vas porter une robe du soir » lui a-t-il dit.

« Alex, je gagne six livres par semaine. Mon loyer est de deux livres quinze. Et il y a aussi les factures et les cigarettes. La nourriture est tout en bas de la liste. Comment vais-je me procurer une robe de soirée ? » « Ne t’inquiètes pas. Je m’en occupe. »

Ce week-end le coven a agit, cela a abouti à la somme inattendue de seize livres. Deux jours plus tard, Alex a accompagnée Maxine à Oxford Street et lui a dit de faire quelques achats. Elle a trouvé une petite boutique de haute-couture où il y avait une robe de soirée bleu-émeraude. Elle devait couter au bas mot quarante livres. Réunissant tout son courage, elle est entrée dans le magasin et a demandé le prix de la robe. Son prix avait presque été divisé par trois lui a dit la vendeuse. Elle a regardé l’étiquette : 16 Livres Sterling.

Elle devait encore se faire coiffer et maquiller, Alex s’en est aussi occupé. Jean, une de leurs amies qui n’était pas Sorcière, était une jolie femme de quarante ans qui travaillait dans un salon de beauté. Elle avait eu trois maris parce qu’elle pensait que la variété était le piment de l’amour, et maintenant elle voulait jeter son dévolu sur le propriétaire du salon qui, à son grand dépit, ne faisait pas attention à elle. Elle a harcelé Alex pour qu’il l’aide grâce à la Sorcellerie à faire venir l’homme dans son lit. Un soir, il lui a téléphoné et lui a demandé de venir boire un verre. Le marché était conclu.

Deux jours plus tard, Maxine a été coiffée, a reçu un massage du visage et une manucure, tout cela gratuitement. Ils ont été pratiqués par Jean, une cliente satisfaite du côté gris de la Sorcellerie. Son nouvel amant n’était pas en mesure de s’y opposer parce que sa femme était une visiteuse assidue du salon. Lorsque le soir de la conférence est arrivé, la Reine Sorcière était resplendissante.

Mais elle avait aussi le trac. Crécelle a été à la hauteur de son surnom. Elle n’avait pas dormi la nuit précédente, son estomac était tout retourné et ses longs doigts tremblaient lorsqu’elle allumait une cigarette après l’autre. Lorsque la limousine avec chauffeur est arrivée Alex et Paul l’ont aidée à s’y hisser. Pendant tout le voyage elle a dit à Alex qu’il lui sera impossible de trouver le courage de répondre à deux douzaines d’étrangers. Les choses ne se sont pas arrangées quand, en arrivant à la salle, elle vu qu’elle était remplie de plus de cinq cents étudiants. Elle était terrorisée.

« Tu lui prends un bras » a dit Alex à Paul. Elle a été menée dans le couloir du théâtre par ses deux partenaires, belle mais à peine capable de bouger les jambes, cela lui donnait en quelque sorte un air d’insouciance hautaine. D’autres Sorcières les attendaient sur le podium, où elles étaient assises derrière une longue table en bois. Alex a commencé à déballer le paquet d’outils de Sorcière sur la table devant lui.

Il a tendu une épée à Maxine. « C’est bien », lui a-t-il dit. « Tiens-la et fais comme si tu étais Elizabeth 1ère. »

Paul a ouvert le débat en expliquant les différentes activités des Sorcières, en montrant les outils et en expliquant à quoi ils servaient. Une autre sorcière a fait un bref discours comparant la Sorcellerie à des religions plus orthodoxes. Alex a ensuite répondu à plusieurs questions, pendant que Maxine tenait la poignée de l'épée, regardait droit devant elle et essayait de faire comme si elle était Elizabeth Ière.

« Pourquoi ne parle-t-elle pas ? » s’est élevée une voix au fond de la salle, manifestement pas un étudiant.

« Pourquoi pas ? » le cri a été repris dans toute la salle, Maxine s’est étranglée. Sa voix, habituellement rauque, n’était plus qu’un mince filet. (« Je ne savais pas si je devais quitter la scène ou tenir l’épée et courir jusqu’à la personne qui m’avait interpelée. ») Paul a sauvé la soirée.

« Mesdames et messieurs, s’il vous plaît. » Le silence est retombé sur la salle. « Vous avez demandé pourquoi notre Reine ne parle pas. Je vais vous dire. C’est parce qu’elle ne le veut pas. Même au sein de notre coven il y a des moments où aucun d’entre nous n’ose lui parler à moins qu’elle nous le demande, pour nous elle est l’objet de la plus haute vénération. Pourquoi devrait-elle avoir des chiens et être obligée d’aboyer ? Nous le faisons pour elle. Maxine a expiré, pour la première fois depuis trente secondes selon elle.

Alex a changé complètement de sujet en montrant une malédiction qu’il avait reçu d’un groupe de Sorcières Ecossaises. Elle était arrivée quelques jours après que la publicité aie commencé et il ne doutait pas qu’il s’agissait d’une véritable malédiction. Ecrit dans une langue ancienne avec du sang animal sur un parchemin, c’était la même malédiction qui avait été utilisée, de manière trop efficace, sur l’un des grands magiciens allemands de ce siècle.

Il a expliqué que toute la fraternité avait travaillé six jours et six nuits pour mettre en place des barrières de réplique contre la malédiction, qui proposait de lui infliger le cancer de la gorge, de la langue et des lèvres, provoquant ainsi une mort lente et douloureuse. Les Sorcières proches d’Alex – que l’on allait plus tard qualifier d’Alexandriens - ont mis en place des forces réflextives, des miroirs mentaux, pour renvoyer la malédiction à ses instigateurs. Alex a fait passer le parchemin dans le public. Au contact de celui-ci, une personne s’est évanouie.

Alex et Paul avaient emmené Maxine à la conférence, ce fut un grand succès. Mais cette soirée ne faisait que commencer.

Alors que les sorcières avançaient dans la foule, Maxine marchant seule maintenant, Alex a été approché par une jeune femme qui a dit qu’elle travaillait pour Granada Television. Plus tard dans la soirée Mike Scott devait présenter une émission évoquant des nouvelles régionales. Aimeraient-ils être interviewé ? Alex a dit que oui.

Alors qu’ils étaient conduits vers une autre limousine, Maxine et Alex faisaient leurs premiers pas vers une reconnaissance internationale. Quand ils sont arrivés au studio, ils se sont trouvés être des objets de curiosité, le genre de divertissement qu’on appréhende toujours avec un peu de crainte. M. H. est devenu sa propre victime lorsque des membres de l’équipe de télévision se sont mis à glousser derrière Alex. Alex s’est retourné, très lentement. Il a fixé H dans les yeux, ce qui peut être très effrayant.

Soudainement il a crié, « BOU !!! » L’homme avait faillit tomber alors que tout le monde riait.

Les répétitions ont commencé. Alex a dit à Scott qu’il ne devait pas interroger Maxine, parce qu’elle n’était que « une nouvelle initiée ». Maintenant la tension montait, l’air devenait plus lourd. Alex s’est vu proposer du brandy. Il en a bu deux. Il lui a dit : « contente-toi d’être belle ». Les téléspectateurs ont été unanimes, elle avait rempli son rôle.

Les journalistes ont commencé à harceler les deux Sorcières. Ils étaient inondés d’invitations à donner des conférences. Maxine a rapidement eu une garde-robe de deux douzaines robes de soirée juste pour ses apparitions publiques. Ils passaient régulièrement à la radio et la télé. Un contrat cinématographique avait été signé. Ils ont été invités à être conseillers techniques sur un autre film, « The Eye of the Devil », avec Sharon Tate et David Niven. Au cours de ce contrat ils vivaient dans une suite au Claridge qui était généralement réservé à des rois et des reines et une limousine était mise à leur disposition.

Il a avait, ou pouvait avoir, un problème. Personne ne leur avait dit d’économiser leur argent.

Lorsque vous êtes sous l’œil du public, il est naturel que tout le monde pense que vous gagnez beaucoup d’argent. Ce n’est pas toujours le cas, ou vous pouvez aussi dépenser autant que vous gagnez. En raison de ses engagements publics, Maxine a dû quitter son travail. Ni Alex ni Maxine n’avaient touché un centime des centaines de journaux qui avaient publiés leurs interviews et l’argent des radios et télévisions avait été utilisé pour acquérir des robes et des vêtements magiques. Lorsqu’elle a cessé d’être sous les projecteurs des média, Maxine a réalisée qu’elle était complètement fauchée.

Elle risquait aussi d’être rapidement sans domicile. Sa logeuse a fini par apprendre que la timide locataire de sa chambre du bas était la fameuse sorcière qui faisait voir son pelvis à toute l’Europe. Quand un journal national a publié l’histoire illustrée racontant comment Maxine était sans abri en raison de ses croyances religieuses (« Montre un peu plus ta cuisse, c’est parfait chérie »), elle a commencé à recevoir chaque jour deux sacs de courriers lui proposant un autre logement.

Une lettre a proposé un ménage à trois. Une autre disait : « J’ai une belle maison dans le Yorkshire, une maison de campagne, mais malheureusement elle n’a pas encore été modernisée. J’ai une baignoire en étain, mais il faut généralement que je fasse d’abord sortir mes cinq oies. Je n’ai pas de toilettes modernes et il faudrait faire avec des latrines portables que j’ai achetées pour pas cher. Elles sont vidées une fois par semaine. Veuillez agréer ... ». Une autre lettre demandait si elle aimait les chiens. Elle ne savait pas pourquoi. Un modèle nue proposait son appartement à Londres, car elle travaillait sur le continent la plus grande partie de l’année. Une lesbienne lui a proposé de l’héberger. Elle travaillait comme installatrice de conduite de gaz. Plusieurs offres sont arrivées de messieurs qui lui proposaient de l’installer à Londres en échange de « faveurs ». Un agriculteur a déclaré qu’il avait besoin de quelqu’un pour traire ses vaches. Un couple de personnes aisées ayant dans les soixante-dix ans ont proposé de l’adopter à la condition qu’elle abandonne la Sorcellerie, elle leur a répondu et a poliment refusé leur proposition.

Des cadeaux ont aussi commencé à arriver. Quelqu’un a envoyé une douzaine de roses rouges chaque semaine jusqu’à ce qu’elle déménage. Des boîtes de chocolats et des bouteilles de champagne arrivaient également, de sorte que Maxine ne s’est nourrie que de chocolats et de champagne jusqu’à ce que quelqu’un aie la présence d’esprit de lui envoyer un panier de nourriture.

La veille du jour où elle devait quitter son appartement, plus déprimée que jamais, elle s’est levée de son fauteuil, elle a mis son manteau et s’est dirigée vers le fond d’Ellesmere Road. Une promenade lui fera du bien. Elle a tourné à gauche dans Chorlton Road et s’est arrêté pour regarder la vitrine d’un agent immobilier. Il y avait des appartements partout et elle ne pouvait même pas se permettre un placard à balais. Elle s’apprêtait à s’en aller quand un homme est sorti de l’agence.

C’était une Sorcière qui avait abandonné la Sorcellerie, un vieil ami qu’elle avait oublié. Il était aussi le propriétaire de l’agence et il lui a proposé un petit appartement. Ce n’était pas le Claridge, mais c’était un abri alors qu’elle ne s’y attendait plus, et le loyer, payable chaque fois qu’elle pouvait, était d’une livre par semaine.

Elle y est restée trois mois. Avec l’aide d’Alex, elle a trouvé un emploi de bibliothécaire et un hébergement plus confortable à côté de chez Alex et Paul. Elle se souvient que ces trois mois, furent les plus misérables de sa vie – elle avait même envisageait de se prostituer - et la dernière nuit qu’elle y a passé, sa vie a changé une fois encore.

Elle était retournée à l’appartement après une réunion Sorcière. Un sentiment d’appréhension qu’elle ne pouvait expliquer lui vrillait l’estomac. Elle était rentrée à pied avec juste un shilling en poche et pas de nourriture dans le garde-manger, mais elle en avait l’habitude. Elle est entrée dans le froid qui régnait dans la pièce et elle a mis sa dernière pièce dans le compteur. Elle s’est installée sur le canapé devant la chaleur du feu, elle avait un sentiment étouffant de découragement. Elle a essayé de s’endormir.

De vagues images mentales semblaient vouloir se clarifier. Au début, elles étaient floues dans son esprit, mais alors que ses pensées personnelles disparaissaient, sa vision devenait plus précise. L’image dominante était une épée à manche d’or sur un fond noir. L’épée était dirigée vers le bas : un symbole de mort.

Maxine était perplexe. Mis à part Alex, la seule personne dont elle se sent vraiment proche c’était sa mère, et Dorsi avait à peine eu un rhume ces dernières années.

Le lendemain matin, un télégramme pour Maxine est arrivé chez Alex. Il s’est précipité chez elle. On pouvait y lire, « VIENS AU CHRISTIS HOSPITAL MERE EST TRES MALADE. » Le Christis Hospital était réservé aux patients atteints de cancer en phase terminale.

Maxine a fait sa valise, laissant ses accessoires magiques chez Alex, et a couru chez Blackley Bryan, un de ses vieux amis qui avait envoyé le télégramme, il l’attendait chez lui. Ils sont allés à l'hôpital. Dorsi était mourante. Elle avait une sorte de minerve qui empêchait sa tête de tomber et elle ne pouvait pas aligner deux mots cohérents. Maxine est allée la voir tous les jours, mais la fin était proche, Dorsi fut sanglée sur un lit de camp et installée dans une chambre privée. Tout le monde savait ce que cela signifiait.

La dernière fois que Maxine a vu Dorsi en vie c’était un vendredi. L’infirmière, une religieuse, avait dit à Maxine qu’elle devrait rester cette nuit, sa mère était au plus mal et ne serait probablement plus là le lendemain. Maxine en a convenu. Aussi silencieusement que possible, elle s’est rendue sur la pointe des pieds dans la chambre de Dorsi et s’est assise au bord du lit. Elle pensait à sa vie, à sa mère et aux moments extraordinaires qu’elles avaient vécus ensemble, quand elle a vu un ectoplasme bleu sortir du sommet du crâne de Dorsi. Elle a senti la présence de la mort. Maxine a embrassé sa mère sur le front et lui a longuement dit adieu en silence. Puis elle est sortie de la chambre.

L’infirmière lui a pris le bras alors qu’elle s’en allait et lui a demandé pourquoi elle ne restait pas avec sa mère mourante.

« Ça ne sert à rien », a dit tristement Maxine. Physiquement - en termes médicaux - Dorsi était encore en vie, mais son esprit était sur le point de quitter son corps physique. L’infirmière est partie en marmonnant au sujet de la jeune génération qui n’était plus bonne à rien, qui était égoïste, inconsidérée ....

Maxine est allée lentement vers la maison de sa mère. A 6H30 le matin, le téléphone a sonné. C’était la même infirmière qui s’excusait, sa mère était morte. Sans surprise, Maxine a commencé s’occuper des funérailles.

Dorsi avait dit à Maxine qu’elle voulait être enterrée dans une robe de soie noire avec une bordure blanche en hermine. Maxine avait essayé de la convaincre de s’en séparer et a décidé que, maintenant que Dorsi était morte, il allait ignorer son souhait. Mais chaque nuit où elle dormait dans la chambre de sa mère « les foutus trucs », comme Maxine les appelle maintenant, ne la laissait pas dormir. La garde-robe s’ouvrait et les robes se répandaient par terre. Lorsqu’enfin Maxine a téléphoné aux pompes funèbres de venir récupérer la robe les problèmes ont cessé.

Des putes, des proxénètes, des prêtres, des couples homosexuels des deux sexes, des vilains, des adeptes de Subud, accoururent pour la cérémonie. Un des porteurs est arrivé en portant des chaussures de danse. Tous se pressaient dans la petite église catholique au grand damne des parents de Dorsi, choqués et conservateurs. Lorsque Maxine est arrivé, en retard, en manteau de fourrure blanc avec un chapeau assorti et des accessoires noirs, elle a senti tous les regards se tourner vers elle. Devant elle, il y avait le cercueil de sa mère avec des bougies allumées à chaque coin. La messe a commencé.


Introibo ad altare Dei.

Ad Deum qui laetificat juventutum meum.


Tout alla bien jusqu’à la consécration, lorsque le vin et l’hostie ont été bénis. Tout le monde regardait Maxine pour voir si elle allait communier. Elle est restée là où elle était. Des regards obliques et des murmures désapprobateurs se firent entendre pendant que les parents consciencieux s’approchaient de l’autel pour recevoir le corps de leur Dieu sous la forme de pain sans levain.

Le prêtre a regardé vers l’arrière de l’église avec horreur soudaine. L’assemblée toute entière s’est retournée pour voir Alex, en grand apparat de Sorcière, à la tête d’une troupe de Sorcières vêtues de la même façon venue dans l’Eglise pour rendre un dernier hommage. Le prêtre a grimacé en voyant les forces du mal entrer dans son église. Mais les sorcières ne sont-elles pas censé être incapable d’entrer dans une église ?

Mais il a continué avec sa messe et après la bénédiction finale,


Ite Missa est

Deo gratias.


Les sorcières sont sorties de l’église solennellement et en silence. Elles n’ont pas assisté à l’enterrement.

Après les funérailles, Maxine a décidé de rester seule dans la maison jusqu’à ce que les formalités de successions soient terminées. Elle s’est trouvée soumise à des formes bizarres de harcèlement. Un soir, elle est revenue de la réunion du coven et a constaté que toutes les fenêtres de la maison avaient été brisées. Des enfants lui jetaient des pierres dans la rue. Enfin, la maison a été vendue et l’argent a été mis en fiducie pour Maxine et sa sœur. Ayant nulle part où habiter et à nouveau sans argent, elle s’est tournée vers Alex pour obtenir de l’aide. Il l'a lui apporté. Depuis quelque temps il avait appris par les Tarots que Maxine serait sa femme.

Maintenant les projets de mariage étaient fixés. Une petite maison avait été arrangée et Paul et Alex devaient se séparer. Mais avant que tout cela se mette en place Maxine a redécouvert son talent pour la projection astrale. Toute personne vivante a trois corps : le corps physique, qui est le seul dont nous sommes normalement conscients dans notre état de veille, le corps astral, une contrepartie du corps physique que nous habitons quand nous rêvons, et le double éthérique, qui est une sorte du corps hors du corps qui peut exister indépendamment du corps physique. Ce dernier peut être envoyé au loin alors que le corps physique est au repos à des centaines de kilomètres de là. (Je n’y ai jamais cru jusqu’à ce que, sous la direction de mon enseignant, j’ai été vu me promener à Londres alors que je dormais dans le Yorkshire.) Pour la plupart des personnes, les corps physique, astral et éthérique restent ensemble tout au long de leur vie. Mais il est possible, grâce à un entrainement, de développer la technique de transfert de la conscience du corps physique au corps astral ou éthérique en restant éveillé. C’est ce qu’on appelle généralement la projection astrale, mais cela ne s’applique qu’à la projection du double éthérique, qui est à mi-chemin entre le corps physique et astral. Maya, la fille de Maxine, peut se projeter astralement pendant son sommeil. Enfant, Maxine se projetait pratiquement chaque nuit, elle ne savait pas que ce n’était pas normal. Elle a perdu cette capacité à l'âge de quatorze ans, quand elle a commencé à avoir ses règles. Elle a retrouvé cette capacité suite aux conseils que lui avait donnés Alex, ce fut spectaculaire et plutôt comique. Enfin, cela semble rétrospectivement.

lex était en train de parler à groupe d’adeptes, de plus en plus nombreux, de la projection et il recommandait une technique simple. L’étudiant devait se placer en face d’un miroir, avec des bougies allumées de chaque côté et se concentrer sur son reflet dans le miroir en voulant se projeter dans le miroir. Mais il ne fallait en aucun cas tenter cette expérience tout seul, il y avait un risque de rester coincé, comme Alice, dans le miroir. Maxine, bien sûr, n’a pas tenu compte du dernier conseil. Il y avait une coiffeuse avec un grand miroir dans son appartement, et un soir après que la bibliothèque aie fermé, elle fait ses préparatifs. Elle a suivi les directives d’Alex - et bientôt, elle regardait du miroir et a vu à sa grande horreur, son propre corps couché par terre.

Effrayée en corps et en esprit, elle a essayé de crier. Elle n’avait pas de voix. (Maxine croit qu’il y a des cas où des personnes se sont projetées involontairement et, comme leurs corps a été déplacés, elles ne peuvent plus trouver le chemin du retour. C’est une explication possible à certains phénomènes de fantômes.) Conjurant toute sa volonté, Maxine a réussi à sortir du miroir et à retourner dans son corps et à se relever. Sa projection suivante fut dictée non pas par la curiosité mais la faim.

Maxine peut ouvrir les serrures sans clé. En mettant sa main sur une poignée de porte et en voulant qu’elle s’ouvre, elle obtient généralement le résultat escompté. Elle a découvert cela par hasard un soir où elle était allée chez Alex et Paul pour mendier un repas. Ils n’étaient pas là et elle avait assez faim pour briser la porte, mais quand elle a baissé la poignée une seconde fois, la porte s’est ouverte. Elle s’est précipitée à l’intérieur et s’est attaquée au garde-manger.

Deux boîtes de haricots blancs cuisinés, une demi-miche de pain, trois œufs (frits) et une boîte de fraises avait disparu lorsqu’Alex est rentré chez lui. Il a fait irruption dans l’appartement de Maxine et l’a accusée d’avoir un passe-partout. Après avoir fouillé l’appartement avec sa rigueur habituelle, il s’est excusé et est rentré chez lui. Généreusement, Maxine a accepté les excuses. Elle se mise au lit et pendant qu’elle s’endormait elle a émit un petit rôt féminin de contentement.

Certaines habitudes ont la vie dure et manger en est une. Maxine avait constaté qu’à n’importe quel moment après trois heures du matin, elle était tranquille pour faire un raid dans le frigo d’Alex. Quand Alex constatait qu’il manquait de la nourriture, il le reprochait à Paul. Lorsque Paul constatait qu’il manquait de la nourriture, il le reprochait à Alex. La serrure a été changée. Cela n’a rien changé. Paul a posé des pièges à souris tout en se demandant comment une souris pouvait ouvrir une boîte de haricots. Enfin, une nuit, le mystère a été résolu. Convaincue que ses victimes étaient sorties pour la soirée, Maxine a essayé d’ouvrir la serrure par la force de sa volonté. Cela n’a pas marché. Elle a pensé que finalement ils étaient peut être là et que la porte était verrouillée de l’intérieur. Elle a frappé à la porte et a crié. A cette époque son propre garde-manger, se composait d’une boîte de poudre de curry, une boîte de petits pois préparés et un assortiment de condiments et d’épices.

« Comment ose-t-elle me déranger ! » a-t-elle entendu, c’est Alex qui se plaignait au bas de l’escalier.

« Alex, puis-je entrer ? Je meurs de faim et je n’ai rien à manger. »

« Non, tu ne peux pas entrer, vraiment pas. »

« Peux-tu au moins me donner quelque chose à manger ? »

« Nous n’avons rien à la maison » a-t-il dit froidement, il mentait. « Paul a oublié de faire des courses aujourd'hui. »

« Je vois » a-t-elle dit , elle avait compris. Elle a tourné les talons et s’est éloignée.

Au moment où elle a atteint Ellesmere Road, elle était d’une humeur incontrôlable. Toutes les sorcières n’ont-elles pas prêté serment de s’aider les uns les autres ? N'était-elle pas une Reine Sorcière, leader de vingt covens? N’était-ce pas Alex Sanders qui l’avait mené là ? Elle fulminait dans son appartement assise dans une chaise recouverte de velours vert, en forme de trône. Ce soir là ce trône était devant le miroir.

Soudainement, avec un grand bruit elle fut hors de son corps. Maintenant elle pouvait se déplacer à travers les murs et se visualiser partout où elle le voulait.

Si Alex n’avait pas été préoccupée à engloutir son thé, son œil clairvoyant aurait vu double éthérique de Maxine dans la pièce. Mais comme il était assis face à Paul qui était dans la même situation, il n’a même pas levé les yeux de son assiette. Le double de Maxine était retourné en trombe dans son appartement où il s’est reconnecté à son corps physique. Sans attendre de récupérer, elle a couru jusqu’à l’appartement d’Alex. Il faisait très froid, mais elle n’a pas pris la peine de mettre son manteau.

« Bâtards ! » Criait-elle en frappant à la porte. « Laissez-moi entrer, sales menteurs ! Vous avez des tomates là-haut ! Vous avez du corned beef et de la salade ! Laissez-moi entrer, espèce de foutus menteurs ! » Les occupants des autres appartements écoutaient maintenant les cris. Une fenêtre s’est ouverte plus haut d’où a émergé une tête. Une femme est descendue et a ouvert la porte, elle tenait une passoire de carottes et Maxine en a pris une et a commencé à la dévorer comme un lapin affamé. Elle s’est précipitée dans l’escalier.

Paul était dans l’escalier. « Bâtard ! » Maxine l’a martelé de coups de poings, puis elle l’a fait tomber dans l’escalier. Paul est un expert en judo – une personne singulièrement polie avec les femmes hystériques qui le rouaient de coups - et il a atterri sans se faire mal.

Maxine s’est précipité dans la cuisine.

« Que diable veux-tu ? »

« Foutus bâtards ! Je me moque de vos pouvoirs, ne me mentez plus jamais parce qu’à chaque fois je saurais la vérité. Si vous aviez été dans un foutu désert en train d’ouvrir une boite de haricots avec les doigts, je vous aurais vu parce que je peux voyager où je veux. »

« Tu t’es projeté ici ? » Alex est maintenant presque souriant.

« Tu as foutrement raison, c’est ce que j’ai fait. Grâce à toi j’ai droit à une foutue couronne et regarde-moi. Vas-y – tu pourrais jouer du xylophone sur mes côtes ! Mais ... » La voix de Maxine est passée de la colère à la douceur, « tu devrais me traiter mieux ... Je me contenterai de corned beef, de tomate et de salade verte. »

Paul est entré dans la cuisine en se frottant le bas du dos. Les trois personnes se sont regardées et se sont mises à rire.

C’est peut-être là que le mariage d’Alex et Maxine Sanders a réellement commencé. A la fin des années 1960 le tapage qu’ils provoquaient avait fait d’eux les Richard Burton et Elizabeth Taylor de la Sorcellerie moderne.


Accidents Magiques

Le téléphone a sonné, trop tôt le matin, il faisait encore sombre.

« Nigel matérialise des saucisses » a dit la voix.

« Qu’est-ce que tu dis ? » Alex était fatigué. Il était fatigué parce qu’il avait eu une longue journée suivie d’une longue nuit et la seule mention de Nigel suffisait à fatiguer encore plus.

« J’ai dit qu’il matérialise des saucisses. Elles volent par les fenêtres. Le petit bâtard a vraiment un problème. Peux-tu... »

« Ecoute Ken, je suis vraiment très fatigué. Si c’est une de blague alors... »

« Non, Alex écoutes-moi. Nigel est couché là dans cette maison et des paquets de saucisses volent autour de lui, elles sortent de nulle part. Les voisins deviennent fous. Tu dois l’aider. »

« Bonjour. Non bonne nuit, Ken. »

Alex a parlé à Maxine, dont le nom est désormais Sanders, de Ken, aucun des deux ne pensaient qu’il était spécialement farceur et ils se sont tous les deux rendormi.

Deux jours plus tard : « Alex, c’est à nouveau Ken. Ne raccroche pas s’il te plaît. Ce petit fils de pute matérialise maintenant des pièces de trois pence. Alex, tu dois me croire. L’endroit est dévasté. Nigel est couché nu au milieu dans ce désordre de saucisses et de pièces de trois pence. Les saucisses commencent à sentir mauvais. Quelqu’un va appeler la police et ils vont l’emmener à coup sûr. S’il te plaît, Alex. Tu dois y aller. »

Quand Alex a parlé à Maxine des dernières prouesses de Nigel, ils ont décidé qu’ils devaient aller voir. Ce n’était pas le début de l’histoire de Nigel Farnsworth, ni, malheureusement pour eux, la fin.

Ça a commencé lorsque Nigel a été présenté à Alex comme initié du premier degré. Il avait lui-même invité, Alex, Paul et une autre Sorcière dans un restaurant indien pour un repas et un « petit verre ». Il mesurait environ 1M60, il était chauve sur le dessus, mais il avait les cheveux gras et plaqués sur les côtés et derrière la tête. Son obésité et ses dents jaunes dégoûtaient Maxine. Il avait aussi un problème avec l’alcool.

Au restaurant indien, il a commandé six bouteilles de riesling hongrois, dont deux qu’il a bu tout seul. Après être sorti des toilettes des hommes où il s’était enfermé et où il s’était endormi, il avait été libéré par un serveur qui avait grimpé par la fenêtre en passant par l’extérieur, Alex, Paul et l’autre Sorcière - qui étaient déjà bien gais eux aussi – se sont entassés dans la voiture de Nigel. Nigel avait encore son pantalon aux genoux.

Presque immédiatement ils ont ouvert les fenêtres arrière de la voiture. Du homard tandoori, du curry de bœuf, des légumes au curry, du riz, de la crème caramel et deux litres de vin doux se sont retrouvés sur les côtés de la voiture la décorant d’un motif abstrait.

Alex, qui tenait bien l’alcool et avait généralement bon caractère, n’était pas très heureux. Nigel Farnsworth n’était toléré que pour sa vivacité intellectuelle et ses talents artistiques, les deux étant immenses. Il tournait autour du coven, comme font certaines sorcières, il n’avait aucune quête spirituelle, mais il recherchait l’amitié, l’amour parfois, dans des intérêts communs. Il n’y avait aucun véritable problème juste de petits soucis, jusqu’à ce qu’il décide qu’il était prêt pour son second degré.

« Alex, le moment est venu » a annoncé Nigel, une mauvaise imitation de Tony Hancock décidant de devenir l’Homme Sauvage des Bois. « Je veux être un Grand Prêtre. » C’était une de ces visites de courtoisie dont Nigel profitait toujours pour demander une faveur, il était venu armé de pâtisseries turques, des baklavas et divers autres sucreries que, il le savait, Alex trouvait irrésistible.

« Je veux que tu me le donnes. »

« Attends une minute. » a dit Alex. Il a expliqué à Nigel, qui le savait déjà, qu’en Wicca le second degré ne peut être donné que de l’homme à la femme et vice versa. Il se traduit parfois par l’union sexuelle. La cérémonie implique un transfert du pouvoir : du positif au négatif, de l’homme à la femme. Ceci peut être pratiqué symboliquement, mais il ne savait pas trop si Nigel avait pensé ou non à cet aspect symbolique.

« Maxine, » a demandé Alex, « donnerais-tu à Nigel son second degré ? »

« Alex, je ne pense pas en être digne. » Elle a baissé la tête en souriant.

« Mais je veux que ce soit Alex qui m’initie. » A cause de son propre comportement Nigel n’avait jamais réussi à trouver de partenaire stable pour le Cercle, ce qui est essentiel pour la pratique durable de la Sorcellerie. Ni Alex ni Maxine n’avaient envisagé que Nigel ai pu être une reine Sorcière cachée.

« Je vais devoir y réfléchir » a dit Alex et la question a été laissée de côté pour quelque temps. La demande était un peu bizarre, mais en se plongeant dans ses livres Alex a découvert qu’il n’y avait rien de particulier dans Le Livre de la Loi qui rendrait cela impossible. Les pratiques homosexuelles sont communes dans la magie, même si elles n’étaient arrivées que récemment dans la Sorcellerie. Mais la cérémonie sera purement symbolique. Alex a accepté de pratiquer le rituel, mais pas dans son propre Temple.

Bien qu’Alex vivait comme un pauvre homme, son Temple était un trésor d’objets magiques qu’avec Paul, ils avaient rassemblés au fil des ans. Des Baguettes en divers bois et métaux, des couteaux à manche d’ivoire et d’ébène, des épées, des dessins mystiques et les aquarelles exquises de Paul décoraient la pièce qui sentait toujours l’encens et la myrrhe. Il y avait des effigies de marbre et, maintenant qu’Alex Sanders devenait célèbre (ou infâme dans certains cercles) dans le monde occulte, les dons arrivaient de tous les coins du monde. Il y avait une épée dont on disait qu’elle datait des Croisades, une idole d’un monastère Tibétain, et un cadeau plutôt exceptionnel et coûteux venant d’un Américain qui a été reconnu plus tard coupable d’avoir pratiqué un assassinat rituel de masse. Il y avait des parchemins en peau humaine avec des inscriptions en sang (j’en ai vu un), d’anciens parchemins égyptiens et des carrés magiques d’AbraMelin datant du dix-septième siècle. Son Temple était et est toujours situé en un lieu que je ne peux pas désigner, un musée magique, et les objets qu’il contient sont inestimables. Si Alex avait eu l’idée de vendre l’un de ces objets, ses soucis financiers auraient été réglés pour de bon, mais l’équipement du Temple, en fait les outils de travail de chaque Sorcière, ne doivent pas être évalués en termes monétaires. Ils occupent une partie de sa vie qui ne peut être concernée par l’argent ou même la mort. Il est difficile pour un esprit moderne et matérialiste vivant dans une société de consommation de comprendre cela, mais même quand il avait vraiment faim, l’estime qu’avait Alex pour ses outils magiques était si grande qu’il n’a jamais envisagé de s’en séparer. Une seule autre personne y avait accès : sa femme Maxine dont il s’est séparé maintenant.

Il n’était pas question de pratiquer un rituel qui pourrait être considéré comme une entorse, même légère, à la Loi dans un tel environnement. Le rituel devait être pratiqué dans l’appartement de Nigel, à 20 h, un samedi. Toute cette semaine, quand Maxine nourrissait le chat, elle récitait un poème qu’elle avait composé pour elle-même et qui faisait mourir de rire Alex : « Petit chat, petit chat, où as-tu été ? » « C’est à Nigel d’initier une reine ! »

Alex est arrivé avec les outils et les vêtements nécessaires. L’appartement, qui était au premier étage d’une grande maison qui dominait le quartier, se composait de deux chambres qui avaient été rassemblées en une seule, elle était énorme. Une très grosse poutre en chêne traversait le plafond. Nigel avait construit son autel directement sous la poutre. A part sa propre peinture du dieu Pan et une table à côté de l’autel, tous les meubles et les tapis avaient été rangés dans un coin éloigné. Sur la table il y avait des pâtisseries orientales, des babas au rhum, des gâteaux et de nombreuses bouteilles de vin ouvertes.

Nigel et Alex se sont détendus et ont bu pendant un certain temps alors qu’Alex expliquait la forme que prendrait le rituel. Au grand dam de Nigel, Alex refusait de manger, la fête aurait lieu plus tard. Il a demandé à Nigel quelle divinité il s’était choisi comme patron.

« Pan ! »

« Nigel, tu es une Sorcière responsable. Tu sais aussi bien que moi que c’est très dangereux. Le dieu Pan peut apporter le chaos, la « panique ». Crowley a pratiqué un rite à Pan à Paris et cela l’a presque tué.

Nigel a été catégorique. A contrecœur, Alex a déplié les vêtements et a commencé à tracer le pentacle cérémoniel autour de l’autel. Deux cercles ont été tracés, l’un de 2M70 et l’autre de 3M de diamètre. Entre les deux cercles des symboles kabbalistiques avaient été tracés. Les quatre points cardinaux ont été marqués par des bougies.

En faisant les préparatifs, Alex a chanté une ancienne prière chaldéenne pour sa propre sécurité. Si quelque chose devait mal tourner, pensait-il, ça serait cette nuit.

Lorsque le cercle a été consacré et les Gardiens convoqués, Alex a fait entrer Nigel dans le cercle. Il lui a enlevé ses vêtements et l’a purifié, l’a flagellé avec un petit fouet en cuir puis il l’a mené autour du cercle.

« Écoutez, vous O Puissances de l’Est, une Sorcière dûment consacrée est maintenant proprement préparée à être fait Grand Prêtre et Mage. »

« Écoutez, vous O Puissances du Sud ... »

Puis Alex a fait trois fois le tour du cercle en dansant et scandant les incantations appropriées. Nigel suivait juste derrière lui, puis il s’est agenouillé nu devant l’autel pendant qu’Alex lui attachait les mains et les pieds. « Pour atteindre le degré sublime, il est nécessaire de souffrir et d’être purifié. Es-tu prêt à souffrir et à apprendre ? »

« Je le suis et je le ferai. »

« Alors je te purifie pour que tu puisses prêter ce grand serment comme il se doit. »

Alex a fait teinter trois fois la cloche cérémonielle. Puis il a à nouveau flagellé Nigel : sept fois, neuf fois et vingt et une fois en succession rapide. Nigel a maintenant pris son nouveau nom qui ne peut être révélé sans réel danger. Il a prêté le serment secret du second degré et Alex lui a posé sa main gauche sous le genou et sa main droite sur la tête.

« Je veux que tu ... pouvoir », lui a dit Alex et c’est là que les choses ont commencé à aller de travers.

D’une façon ou d’une autre Nigel a réussi à rompre les cordes qui l’attachaient. Il s’est mis à rire de façon hystérique et à faire des danses aborigènes autour du cercle. Il a pris une des lances magiques et a commencé à l’agiter en menaçant Alex. Pendant tout cela Alex a essayé, avec courage malgré les circonstances, de poursuivre le rituel. Le dieu Pan avait été convoqué et il s’est vengé. Nigel fut enfin épuisé et il s’est effondré devant l’autel. Alex a commencé à décrire l’usage des outils de la Sorcière.

« Voilà l’épée magique pour former le cercle, voici l’athamé, et voici le couteau à manche blanc, voici la baguette, voici l’encensoir et l’on s’en sert pour... »

Nigel est brusquement revenu à la vie. Il a bondi, a poussé un cri et il s’est précipité vers la table aux victuailles. Il a pris quelques pâtisseries et les a examinées avec curiosité. Puis il a commencé à s’en enduire tout le corps : le visage, la tête, les bras et les jambes. Satisfait de son propre maquillage, il a recommencé sur Alex. Il a essayé de lui arracher son vêtement, mais Alex l’a repoussé. Puis, avec une lueur de panique dans les yeux, Nigel s’est précipité hors du cercle jusqu’à un coin au loin et est revu avec une grande paire de ciseaux. Il l’a brandi triomphalement sous le nez d’Alex. Comme Alex, toujours téméraire, essayait d’achever le rituel aussi vite que possible, Nigel a réduit son vêtement en lambeaux avec ses ciseaux. Finalement le Grand Prêtre, solennel, était debout tout nu, à l'exception de quelques morceaux de tissus qui pendaient toujours au niveau de ses épaules, au milieu du cercle magique. Nigel a alors recommencé à tourbillonner autour du cercle.

Il a cessé un instant pour voir ce qui allait suivre. Comme Alex se préparait à bannir le cercle, considérant que le rituel était terminé, Nigel s’est placé furtivement derrière lui, les mains chargées de nourriture. Il en a couvert la tête, la poitrine, le bassin et les jambes d’Alex. Puis, arrachant le couteau à manche blanc de l’autel, il s’est précipité une fois de plus hors du cercle et est revenu avec deux grands coussins en plumes d’oie. Il a déchiré un des coussins et s’est barbouillé de plumes. L’autre coussin a été pour Alex, qui se trouvait debout devant l’autel ressemblant à un canard abandonné à moitié plumé. Nigel avait dû remarquer la ressemblance car il s’est mis à quatre pattes en criant. Puis, toujours à quatre pattes, il a chanté le refrain d’un chant d’église.

Alex a réussi à bannir le cercle, se rhabiller et à s’en aller sans se soucier de se nettoyer. Rentrant chez lui dans l’air froid, sa colère s’est transformée en amusement. Maxine a ouvert la porte pour accueillir son époux qui avait le visage recouvert de pâtisseries et de plumes. Maintenant son amusement s’était transformé en véritable préoccupation au sujet de Nigel.

Comme Maxine et Alex ouvraient la porte en fer forgé et marchait avec appréhension dans le jardin circulaire, Nigel les regardait par la fenêtre avec des yeux glacés. Un socle de statue au centre du jardin, pesant facilement un quintal, lévitant dangereusement devant eux. Ils ont plongé dans les buissons pour éviter d’être renversés et le socle à soudainement changé de direction et percuté le mur de la maison juste au coin droit de la fenêtre. De gros morceaux de béton sont tombés, un peu comme une petite avalanche et Nigel a crié de sa voix haut perchée et est tombé par terre. Quand ils sont entrés dans l’appartement, Alex et Maxine ont trouvé un soi-disant Grand Prêtre, bouffi et nu, au milieu d’une multitude de plats grecs, de pièce de monnaies, de plumes et de paquets saucisses de porc à moitié pourries. Il était dans cet état depuis trois jours. Maxine a téléphoné à l’hôpital psychiatrique de Springfield et Nigel a été emmené. Ils ont entendu dire que Nigel s’était bien adapté à la vie de l’hôpital et amassait une somme rondelette grâce à la vente de ses peintures aux médecins et aux internes. Ils espéraient ne plus entendre parler de lui.

C’était ce qu’ils espéraient.

Lorsque Nigel est sorti à sa demande de l’hôpital, il a commencé à répandre des rumeurs diffamatoires sur Alex et le coven Manchester. L’histoire changeait à chaque fois que Nigel la racontait, mais un détail était constant : Alex avait construit une poupée grandeur nature à l’image de Nigel et avait l’intention de l’assassiner. L’effigie était cachée quelque part dans la région de Manchester. Personnes ne croyait trop à cette histoire ou ces histoires, mais la nuit, plus d’une fois Alex a été abordé dans son pub par des connaissances lui demandant ce qu’il avait bien pu faire à Nigel. Nigel était convaincu que jusqu’à ce qu’il trouve la poupée et la neutralise son pouvoir, sa vie ne serait plus jamais sienne.

Une nuit, Alex, Maxine et d’autres membres du coven ont été invités à un feu de joie par des sorcières de Salford. Cynthia, la Grande Prêtresse, une amie proche d’Alex, avait ordonné à son coven de construire le plus grand feu de joie qu’on n’ait jamais vu. Son appartement était dans une zone en plein réaménagement et aux alentours de nombreuses maisons étaient à l’abandon. Il y avait donc de nombreuses planches, des caisses en bois, des branches d’arbres morts et un grand espace pour faire feu de joie de 9 mètres de haut. Dans leurs célébrations, les Sorcières sont souvent des plus excessives.

L’incendie potentiel est venu à l’attention des pompiers qui n’avaient pas l’intention de l’interdire mais ils sont allés voir Cynthia pour lui prodiguer des conseils quant aux précautions nécessaires. Le bûcher a été photographié par la presse locale, avec plusieurs sorcières de Cynthia posant devant. Ils avaient aussi préparé un mannequin à l’apparence humaine grandeur nature. Des sandwiches, du gâteau, différentes viandes et des pommes de terre à rôtir ainsi que des litres de vin de Sorcières avaient été préparés pour l'événement.

Mais Nigel avait lui aussi lu les journaux.

Le fête battait son plein depuis plus d’une heure, éclairée par des torches trempées dans la poix, quand Cynthia, au milieu des bavardages, a dit : « Alex, n’est-ce pas Nigel Farnsworth là-bas ? »

« Ne sois donc pas stupide. Il n’osera plus jamais se montrer et de toute façon, comment aurait-il su que nous sommes ici ? »

Pendant ce temps, le mannequin qui était vraiment réaliste, avait été attaché au sommet du bûcher par quelques Sorcière intrépides. L’une d’elles était l’époux de Cynthia, il a failli tomber lorsqu’il a reconnu Nigel.

« Et merde ! Le petit bâtard est ici et il a une bombe ! »

Le feu avait déjà été allumé. Les Sorcières sont descendues des échelles et se sont précipitées dans tous les sens.

Une silhouette chauve blottie dans l’ombre s’est avancée. Il portait un manteau brun foncé parsemé d’étoiles argentées, il s’est rué, comme le bossu de Notre-Dame, vers le feu avec un paquet en mains. En agitant les bras, il a crié : « Vous n’allez pas oser essayer de me brûler sur le bûcher ! » Il a jeté le paquet, qui était une boîte à biscuits où avaient été placés des feux d’artifice et a disparu dans l’obscurité.

Des fusées et des feux de bengale jaillissaient dans tous les coins, des pétards et des chandelles romaines envoyaient des étincelles menaçantes dans toutes les directions. Une malheureuse Sorcières trop lente à évaluer le problème a perdu la moitié de sa barbe qui a brûlé. Le feu ressemblait à ce qu’avait dû être la Tour Infernale et le mannequin a été propulsé dans les airs et a atterri, après avoir perdu toute dignité, il ne restait plus que quelques lambeaux de chiffons brûlés.

Alex a chassé Nigel qui s’est perdu dans l’obscurité. On n’a plus entendu parler de lui depuis.

Les Sorcières sérieuses courent toujours le risque de se heurter à des déviants. Maxine a eu une fois à traiter avec une personne qui maintenant est connue dans les covens sous le sobriquet de Masturbateur Fou.

C’était une sorcière gardnerienne, mais cela ne veut pas dire qu’il représentait la Sorcellerie gardnerienne, nommée d’après feu le Dr Gerald Gardner, le fondateur du mouvement. La Sorcellerie Gardnerienne est plus conservatrice que la Sorcellerie Alexandrienne, ainsi à posteriori, il n’est pas surprenant que Leslie s’ennuyait avec le coven qu’il avait rejoint et qu’il ait demandé à Maxine et Alex s’il pouvait pratiquer avec eux. Une sorcière, à condition qu’elle puisse prouver qu’elle a été initiée dans l’un des trois principaux cultes de la Sorcellerie en Grande-Bretagne - Alexandrienne, Gardnerienne et Traditionnelle - est toujours la bienvenue dans un cercle de Sorcières Alexandriennes.

Au début, Leslie s’est comporté comme un parfait gentleman, même s’il était nu. Mais quand la danse en cercle s’est achevée et que toutes les sorcières, hommes et femmes, sont tombées par terre, son enthousiasme est devenu évident. Le cercle a été reformé et les travaux ont débuté pour toutes les sorcières, sauf Leslie qui s’est éloigné dans un coin sombre en dehors du cercle où il a commencé, caché dans l’ombre, à se caresser les tétons.

Cela n’a pas du tout fait rire Maxine.

Généralement, pour des raisons de sécurité, un cercle magique doit être tracé et banni selon les anciens rites. Mais j’ai vu Maxine bannir un cercle et clarifier l’atmosphère laborieusement préparée par l’un de ses élèves d’un simple claquement de mains, c’est exactement ce qu’elle a fait dans ce cas.

« Vous deux, faites-le sortir d’ici. » Deux Sorcières hommes ont escorté Leslie au vestiaire, puis à la porte d’entrée et en dehors de l’'appartement.

Leslie est revenu repentant quelques jours plus tard. Pourrait-on lui donner une autre chance ?

Alex a dit que, comme Maxine était la Grande Prêtresse c’est à elle que revenait dans ce cas la décision. Elle a invité Leslie à participer au cercle suivant.

La pièce était pleine de sorcières nues qui tournaient dans le sens des aiguilles d’une montre, puis les hommes ont tourné dans le sens des aiguilles d’une montre et les femmes dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Leslie s’est retiré dans son coin préféré. Il a commencé à se masturber avec fureur, en s’adressant à lui-même des obscénités.

Une fois de plus Maxine a frappé dans ses mains, a remercié les Gardiens pour leur participation, les a renvoyés puis s’est adressée au coven. Elle avait préparé le discours à l’avance, juste au cas où.

« Faites venir ici devant moi ce petit bâtard. » Leslie se tenait devant elle. Il avait presque éjaculé et un suintement gênant couleur perle s’était formé sur son gland.

« Mesdames et Messieurs de la Wicca », a commencé Maxine. « En tant que Grande Prêtresse j’enseigne qu’il faut avoir de la compassion et de l’humilité et que le Pouvoir est accordé à la Prêtresse grâce à la fécondité de l’homme, je me plie toujours à sa supériorité en parfait amour et parfaite confiance. Mais je ne vais pas tolérer qu’un homme gaspille ce Pouvoir dont il a la chance de disposer. Il est particulièrement répréhensible de le voir le gâcher en en abusant seul. Je n’ai pas d’autre alternative, Leslie, que de te bannir de la Wicca. Tu vas te rhabiller, quitter ce coven et ne plus jamais revenir. »

Les mésaventures sexuelles existent dans les covens qui pratiquent la formation. Il est rare qu’une Sorcière homme ait une érection lors des travaux, je ne l’ai vu que deux fois. Les orgies sexuelles, délibérément provoquées par le Grand Prêtre ou la Grande Prêtresse, sont une tout autre chose. Mais Maxine a la réputation de faire rapidement face aux soulèvements imprévus.

A une occasion, quand elle donnait un candidat le quintuple baiser, touchant son pénis avec ses lèvres en disant : « Béni soit ton phallus, sans lequel nous ne serions pas », l’initié, qui ne s’attendait pas à un accueil aussi généreux dans la Wicca, est devenu très raide. Maxine a été surprise quand elle a failli se prendre la raideur dans l’oeil. Elle s’est levé, est allé à l’'autel et a pris l’une des baguettes. Elle a poussé de côté le membre fautif et a embrassé son aine et a achevé la bénédiction, puis elle a murmuré une vieille plaisanterie irlandaise assez fort pour que tout le coven entende. « Je vais me la mettre sur l’oreille et je la fumerai plus tard. » L’initiation a continué, malgré ce premier souci, sans accroc.

Une fois, j’ai participé à un Sabbat où il n’y avait pas que des couples, loin de là. Il n’y avait qu’une seule prêtresse et une douzaine d'hommes. D., une charmante jeune fille dans une robe noire et or et Maxine, dans une robe vert pâle d’inspiration chinoise, fendue jusqu’aux cuisses, étaient encerclées lors du rituel par des hommes nus. Après la cérémonie, comme nous faisions passer aux présents du vin, des gâteaux et des fruits, Maxine a dit D. : « Comme tu es la Demoiselle, et la seule ici, tu va devoir t’occuper des hommes. »

Nous l’avons prise au sérieux. D. était très nerveuse. « Tous les hommes ? »

« Tous » a répondu Maxime. Puis elle lui a fait un clin d’œil. » Et je veux un rapport complet demain matin.

Elle n’était pas sérieuse. Dommage.


Londres, et la Séparation

Alex et Maxine ont déménagé à Londres, où ils ont établi ce qui était pratiquement un hôpital de jour pour toxicomanes à Clanricarde Gardens. Leurs succès dans ce domaine furent étonnants. Alex est un guérisseur naturel et affirme qu’il peut guérir le cancer. A un moment, lorsque je suis allé le voir dans sa retraite magique actuelle, il a remarqué l’épuisement de l’énergie dans mon aura et généreusement il s’est mis à œuvrer à sa reconstitution. J’étais en état de transe pendant plusieurs heures, mais il me semblait que cela n’avait duré que cinq minutes, j’ai aussi vu Maxine pratiquer de tels travaux magiques.

Ils sont maintenant séparés, les raisons et les circonstances de leur séparation ont été étalées dans la presse populaire et je n’ai pas l’intention de leur causer à nouveau du chagrin. Les potins ont cessés, mais il peut être utile de rétablir certaines vérités.

Oui, il est vrai qu’Alex a eu une liaison avec la star de rock qui est peut-être la plus célèbre de toute l’histoire. Il n’a jamais eu de malice ou de secret à ce sujet au sein du coven. L’amour profond, le respect, l’honnêteté sexuelle, ont toujours été l’un des points forts des relations de Sanders. Ils le sont toujours. Pour ceux qui les connaissaient il était pénible d’assister à leurs différents publics, mais la loyauté est toujours là. Et maintenant en ce qui concerne l’affaire de la starlette d’Hollywood. Il était une fois un groupe occulte pratiquant à Londres qui avait contacté Alex et lui a demandé de donner quelques conférences. Maxine en a parlé dans ses propres livres car elle considérait qu’ils étaient manifestement obsédés par le sang.

Les hommes portaient des capes noires et étaient presque tous barbus et les femmes portaient généralement des pantalons et des chasubles noires. Ils arrêtaient les gens dans la rue et leur parlaient. S’ils étaient des adeptes ce n’étaient que des adeptes psychologiques....

C’était de la suggestion. A Londres, ils avaient une grande maison tout à fait charmante. On faisait sentir aux invités qu’il n’avait aucune obligation à adhérer à l’ordre, mais la suggestion était là tout le temps.... Une partie de l’atmosphère était due aux membres du groupe qui semblait se réjouir du fait qu’ils avaient « renoncé à tout » pour rejoindre l’ordre.

Ce qu’il voulait dire c’est qu’ils avaient donné tout ce qu’ils possédaient à l’ordre.

« Maxine: The Witch Queen » Star Books, 1976, p. 122-3.)

C’est, ou en tout cas cela devrait être, une règle capitale que lorsqu’on est confronté à un représentant d’un groupe religieux ou occulte qui commence par demander de l’argent, dans ce cas il faut partir en courant. Il y a un groupe de démarcheurs qui opèrent maintenant à Londres, ce sont surtout des agresseurs spirituels, au moins dans la rue. Si vous êtes approché par l’un d’entre eux et qu’il refuse de vous laisser en paix, vous êtes en droit de l’accuser de voies de fait. Tout récemment, j’ai été agressé spirituellement par une évangéliste chrétienne, qui avait repéré mon ankh de Sorcière qu’elle avait pris pour une croix du Christ. Elle m’a glissé une brochure en main et a fait un signe pour demander de l’argent. J’ai essayé de lui expliquer que je ne voulais pas de sa brochure ou lui donner de l’argent, mais, comme elle ne parlait que l’allemand, il était difficile de communiquer. Alex avait prêté à ce groupe des objets ayant appartenu à Aleister Crowley et il ne semblait pas vouloir les rendre.

Quand il les a récupérés nous avons constaté que certaines parties des rituels avaient été soulignées. La phrase « tue les porcs » avait été tout particulièrement soulignée.

« Maxine: The Witch Queen » Star Books, 1976)

Il était encore une fois une célèbre starlette d’Hollywood qui avait été initiée par Alex. Elle était aussi liée avec le groupe occulte dont il a été question plus haut qui, en plus d’autre pratiques douteuses dont certaines étaient sexuelles, utilisait des drogues. Ces personnes sont liées à des trafics internationaux de drogues. Si on vous donnait des noms, vous n’y croiriez pas - je vais donc éviter les poursuites judiciaires en les taisant. Il y a par exemple une célèbre star de cinéma notoirement irascible. Il y a aussi un diplômé de la Royal Shakespeare Company, qu’on appelait à l’époque the Old Vic. Lui aussi est maintenant une star de cinéma. Ces personnes ont fait l’erreur de flouer un certain Charles Manson, qui avait des liens avec le groupe de Londres. La drogue était fortement coupée avec du speed, le paiement n’a pas été convenable. Cela a conduit à des représailles. Un meurtre rituel a été organisé. A la fin du rituel préparatoire, où « Tue les porcs » avait été scandé en permanence, Charles Manson a envoyé plusieurs de ses proches pour être vengé. Le coven des Sanders n’avait rien à voir avec cela, en tous cas pas directement, mais la CIA est remonté jusqu’à eux.

Sharon est morte rituellement lors de ce massacre horrible à son domicile et je suis convaincue que les sources de ce meurtre se trouvaient à Londres .... Le document (contenant le rituel avec « Tue les porcs » que le groupe de Londres avait copié de l’un des livres que leur avait prêté Alex) a disparu et n’a toujours pas été retrouvés pas plus que deux membres du groupe, un homme et une femme .... Il se dit qu’on ne les retrouvera jamais – vivant et qu’ils ont tués par leur propre groupe pour avoir trahi les secrets les plus intimes.

« Maxine: The Witch Queen » Star Books, 1976, p. 124-6.)

Il est absolument faux de dire que Maxine est bisexuelle.

Alex et Maxine Sanders sont leurs noms véritables, même si Sanders n’est pas le nom de naissance d’Alex. Il s’occupe maintenant de leurs deux enfants dans une maison de campagne où Maxine et certains membres de son coven passent les voir régulièrement.

« Si quelqu’un attaque Alex » a dit un jour Maxine, « je serais là à ses côtés avec mon épée dans les deux mains. » Je n’ai jamais vu un tel malaise dans un couple, mais je n’ai jamais eu la chance de faire l’expérience d’une telle loyauté.

Alex et Maxine sont deux personnes ayant des facultés extraordinaires et qui en plus se trouvent être des sorcières. J’ai l’impression qu’ils seront amoureux pour toujours. Si quelque chose est vraie c’est bien cela.


Travailler avec le Coven de Maxine

On m’a dit de préciser une fois de plus que je ne suis pas membre d’un coven Alexandrien, je n’ai jamais demandé à en être membre. J’ai eu l’honneur d’être invité à pratiquer de temps à autre avec le coven de Maxine ainsi que pour célébrer les festivals. Même si j’écris en tant que Sorcière, je suis extérieur au groupe de Maxine, mais j’aime bien ce groupe. Si ce livre vous a donné l’envie de prendre contact avec certaines Sorcières - nous ne sommes pas de méchantes sorcières, si vous tombez sur nous un soir de pleine lune, vous serez peut être intéressés par quelques notes d’un journal que j’ai tenu lors d’un séjour d’une semaine avec les Sorcières de Clanricarde Gardens. Pour nous la semaine a débuté le lundi et a culminé par une initiation le samedi soir. Pour protéger les personnes impliquées je ne vous les décrirais pas. Les lois contre la Sorcellerie ont été abrogées il y a à peu près vingt-cinq ans, mais certains employeurs n’apprécient pas les sorcières et un auteur ne sait jamais quelle belle-mère va lire son livre. Une sorcière prend les vœux de secret plus au sérieux que certains chrétiens prennent leurs vœux de mariage. La Sorcellerie est une religion qui imprègne chaque instant de la vie d’une Sorcière, de l’aube aux pensée qu’elle a avant d’aller dormir (du moins c’est comme ça que cela devrait être). La vie est à la fois amusante et grave, et c’est ainsi qu’est la vie dans un coven.


Lundi

Soirée de conférence, c’est ouvert au public. Vie normale au cours de l'après-midi. Un homme de l’immeuble résidant dans un appartement au-dessus a besoin d’une aide médicale, qu’il a reçue, mais il refuse de prendre son traitement. Maxine toque à sa porte.


Qui est-ce ?

C’est Maxine. Ouvrez maintenant.

Qui est-ce ?


Ce coup ci elle n’a rien répondu.

Il a ouvert la porte. Elle a glissé son pied dans l’entrebâillement et l’a grondé. « Que faites-vous hors du lit ? » Il n’a pas saisi l’illogisme du propos. « Retournez au lit ! »

Docilement il est retourné dans son lit et a demandé ses médicaments. Il ne réalisera jamais à quel point elle se faisait du souci pour lui et elle le sait très bien.

Pendant ce temps, en bas, le téléphone sonne pour ne pas changer. Il a sonné toute la matinée. Habituellement, on n’entre dans le Temple consacré que lorsque la Grande Prêtresse ou un de ses collaborateurs l’autorise. (Quand les enfants sont à la maison, en raison du manque de place, il devient une sorte de salle de jeux. Vous risquez tout autant de tomber sur une épée rituelle que sur un petit canard en caoutchouc.) Deux Sorcières hommes sont en train de peindre la chambre à coucher, ainsi je rentre dans le temple de ma propre initiative et je réponds au téléphone.


      Hello, où est-elle ?
      Maxine est en haut si c’est elle que vous voulez. Puis-je prendre un message ?
      Etes-vous son amant ?
      Ecoutez mon ami...
      OK, je sais que je suis paranoïaque, mais où elle est ?
      Elle n’est pas là. Mais qui êtes-vous et que voulez-vous ?
      Je veux lui donner ma vie, voilà ce que je veux. Bon, quand puis-je lui parler ?


Ne sachant pas de quoi il retournait et ne voulant pas en savoir plus, je me suis dit qu’il faudrait acheter une ou deux bouteilles de vin d’orge en puisant dans la cagnotte commune - dès que je serai parvenu à me débarrasser de ce gars. Les fonds sont conservés dans le hall dans un grand bol en cuivre. Tout membre ou un ami peut s’en servir. Tout le monde y contribue aussi et rembourse ce qu’il a emprunté.

« Qui que vous soyez, sachez qu’elle est en haut et qu’elle est très occupée pour le moment. Voulez-vous venir ? Si elle vous connait je suis sûr qu’elle sera d’accord. »

Je suis resté très froid, mais il est évident que ce type avait vraiment besoin de discuter – si on peut parler de conversation dans ce cas - et qu’on l’aide à se calmer. J’ai parlé avec lui pendant une demi-heure et tout à coup il a raccroché, je ne sais pas ce qui s’est passé ensuite, mais je m’attendais à ce qu’il vienne tôt ou tard. Il y aura du thé, des biscuits et il sera protégé à moins qu’il se comporte très mal. Il y aura toujours quelqu’un pour aider. 15H00. J’ai répondu au téléphone et copié quelques rituels allongé sur le sol du Temple et dans le hall. Une belle Sorcière écossaise est arrivée avec son conjoint et s’est occupé du thé de tout le monde alors que ça sentait toujours la peinture dans la pièce. La plupart buvait du thé ou du café, mais j’ai pris du xérès. Les spiritueux ne sont pas autorisés dans la maison, mais le vin et la bière ne posent aucun problème. Comme on peut s’y attendre de Sorcières, le vin et la bière fait maison sont la norme et ils sont bon et capiteux.

L’odeur de l’encens qui persiste dans le Temple est délicieuse et alors que l’après-midi se transforme en soirée, la fatigue se fait sentir. J’ai juste copié quelques paroles de l’exorcisme :


Créature de feu,

Ce principe je pose,

Nul fantôme ne restera en ta présence.

Écoute mes paroles, qui te sont adressées :

Comme je veux, qu’il en soit ainsi!


Je remarque que le livre que je copie est de la main de Paul.

Maxine est sortie voir un autre patient, à l'hôpital cette fois, en ville. Ce soir une pièce sera pleine d’étrangers, c’est comme ça chaque semaine, ils viennent pour interroger la reine Sorcière sur ses croyances – ils la testent toujours en espérant qu’il y aura quelque chose de spécial dans ce qu’elle va dire tout en le craignant un peu. Toutes les croyances qu’ils ont sur la nature de la réalité, qu’ils ont acceptées comme des « faits avérés », sont remises en question. C’est grisant pour eux, mais tout de même un peu effrayant.

20 heures 30, dans le temple, il n’y a qu’une seule bougie allumée. L’obscurité soudaine est étrange. Des bâtons d’encens fument au Nord de la pièce. Vous n’avez jamais à vous interroger sur les directions dans le Temple, les murs ont été peints selon les couleurs élémentaires appropriées attribué aux points cardinaux. Est, air - bleu; Sud, feu – rouge ; Ouest, eau - vert; Nord, terre - jaune foncé. (Le décor est fait avec tant de goût qu’il faut un certain temps avant de le réaliser.) Maxine est assise dans son fauteuil en cuir et son audience est positionnée dans toute la pièce, certains sont sur les quelques chaises disponibles mais la plupart sont assis par terre. La bougie vacille. L’atmosphère est cordiale. La reine des Sorcières, comme d’habitude, contrôle tout.

En allant dans cette pièce que j’ai pris un verre de vin rouge pour elle. Elle avait l’air un peu fatiguée. C’est son premier verre d’une journée qui a commencé très tôt. S’il y a un travail important à faire ensuite, ce sera son dernier verre de la journée.

« Mesdames et messieurs, je vous présente Richard, qui a déjà été formé. »

Je ne sais pas trop ce qu’elle voulait dire exactement. Un Grand Prêtre – quelqu’un qui devrait savoir de quoi il parle - vient de me dire qu’à cause de mon livre sur l’exorcisme, un coven est en train me jeter un sort. Parfait. Vraiment parfait. (Comme je suis en ce moment en train de taper ce texte, je suppose qu’ils n’ont pas du parvenir à leurs fins.)

Maintenant, les questions.

Est-ce que les gens sont excité lorsque vous enlevez vos vêtements?

Normalement non, non.

Les hommes n’ont pas d’érections? » Cette personne se renseigne sur la Sorcellerie pour des raisons de plus assez flagrante.

Non - il se passe tant de choses en même temps… »

Il persiste. Les érections pendant les rituels sont rares, comme je l’ai dit. Maxine le regarde fixement. « Voyez » a-t-elle dit lorsqu’il a terminé « J’aime le sexe et j’aime la Sorcellerie. Mais je n’ai pas pour habitude de mélanger les deux.

Adorez-vous Satan ?

Pouvez-vous réellement voir l’avenir? » a demandé une autre personne.

Certains n’ont pas ouvert la bouche. Ils sont venus pour renifler l’atmosphère. Certaines des personnes présentes vont demander à être initiés. Ils le seront peut être dans un mois, ils le seront peut être dans la semaine, ils ne le seront peut être jamais.

La réunion a cessé et tout le monde a remercié. Maintenant Maxine ne peut plus cacher sa fatigue - mais le téléphone peut sonner à tout instant. Heureusement il n’a pas sonné. Une amie à moi est arrivée - pas une sorcière, une voyante - et elle a apporté du Beaujolais. Nous nous sommes assis et nous avons bu jusqu’à 2 h du matin en écoutant Maxine et D. parler de magie égyptienne. Le sujet est le pouvoir de jeter des sorts des momies, leur pouvoir de maudire ou de re-vivifier après des milliers d'années. Ce n’est pas une fiction et le British Museum sait tout cela.


Mardi

Une lettre m’avait été transmise suite à une « Ligne Ouverte » à la radio où j’avais parlé d’exorcisme avec le chanoine Henry Cooper. Henry Cooper est la personne qui conseille l’archevêque de Canterbury sur le sujet. L'écriture était hardie et précise, mais pas artistique. C’était un Poissons, d’après le contenu de la lettre, mais la personne avait vraiment l’écriture d’un Taureau. En fait, c’était un Taureau.

La femme subissait depuis quelque temps ce qui semblait être une attaque psychique. C’était une antillaise qui vivait dans le sud de Londres. Elle était agressée sexuellement par une force invisible, presque chaque nuit depuis des années. Lorsqu’elle a demandé à ses sœurs de rester avec elle, elles ont eu la même expérience. Elle a décidé de quitter sa demeure. Les attaques ont continué. Elle a dit avoir consulté plusieurs médecins qui ont été incapables de l’aider. (Plus tard, il s’est avéré qu'elle n’avait pas été entièrement franche avec eux.) Elle avait été exorcisée par le Révérend Christopher Neil-Smith, les attaques ont diminué pendant quelque temps mais sont revenues comme avant. Elle a essayé le Vaudou, ça a échoué. Un prêtre catholique a dit une messe dans la maison. Cela n’a pas eu d’effet. Elle a écrit qu’à la radio j’avais l’air plutôt normal, mais elle avait l’impression que j’étais quelqu’un qui comprenait la nature et la réalité des attaques psychique. Pourrais-je l’aider ?

J’ai téléphoné et accepté de rencontrer la femme, que nous appellerons Lucille, et ce soir-là je suis arrivé avec mes outils de travail à sa maison. Nous avons parlé pendant un certain temps de la météo, du voisinage, puis enfin de son problème. Il est bien connu que de nombreux cas de viol physiques ne sont jamais signalés parce que la victime a honte et qu’elle craint d’être humiliée par la police. De nombreuses personnes font l'objet d’attaques psychiques et gardent le silence pour les mêmes raisons - ils ont peur qu’on se moque d’eux. En fait, les attaques psychiques et les possessions ne sont pas aussi rares qu’on pourrait le croire. La plupart des prêtres chrétiens répugnent à s’en mêler par peur du ridicule et de la censure officielle. Ces phénomènes psychiques sont généralement assimilés à une maladie mentale. Parfois, une personne mentalement dérangée peut aussi souffrir d’attaques psychiques. Dans le cas présent la femme est brillante, sincère, intelligente, et de toute évidence elle a un problème.

Elle refuse cependant d’envisager que son problème puisse être de nature sexuelle plutôt que psychique. Elle est célibataire, n’a eu qu’un seul amant et se rapproche de la ménopause. Elle a maintenant peur d’aller vers quelque chose ressemblant à une vie sociale normale.

Les phénomènes des poltergeists peuvent se produire dans un tel climat : je pratique un rituel dans la maison. Dans les premières heures de la mâtiné, après qu’elle soit allée au lit, j’ai banni le cercle et je suis parti. Elle n’a au aucun problème de la nuit.


Mercredi

Un coup de téléphone de Lucille. La force invisible est de retour, plus excitée que jamais. « Il » l’a attaqué en plein jour, à son bureau.

J’ai emmené Lucille voir Maxine au Temple. Longue discussion. Il a été décidé que D. lui fera un talisman de Mars, visant non seulement à la défendre mais aussi à attaquer la source de la perturbation. Il l’a fait ce soir-là, Lucille l’a pris et a passé la nuit chez moi. Il n’y a pas d’attaque.


Jeudi

Une lettre est arrivée. Elle a été écrite par un homme en Espagne, il demande à Maxine d’aider sa femme qui se meurt du cancer. Il faut trouver un traducteur espagnol. Ce geste va lui faire sentir que Maxine s’implique vraiment.


Vendredi

3h du matin. Un appel de Lucille. Ce foutu fantôme l’ennuie à nouveau.

Une journée bien remplie avec le coven. Les sorcières qui vont et viennent de leur travail, les enfants courent partout, le téléphone sonne toutes les cinq minutes et je prépare le déjeuner à la cuisine qui se trouve au niveau de la porte d’entrée de l’appartement.

Au moment où je suis en train d’ouvrir un très grand paquet de purée instantanée, ça sonne à la porte. Une caméra de la BBC est braquée vers moi et il y a une équipe de tournage derrière elle. Ils n’ont pas pris la peine de nous rappeler qu’ils allaient venir.

Pendant ce temps dans un coin de la cuisine, Maya, la fille Maxine qui avait alors sept ans, regarde la bouteille de vin ouverte sur la table de la cuisine.

L’eau commence à bouillir derrière moi pendant que je parle à un caméraman, c’est la confusion totale.


    C’est ici que vit la Sorcière ?
    Oui, juste une minute, je vais… 


Maya voit qu’elle a une chance et se dirige vers la bouteille, je vais vers Maya et en chemin je renverse un demi-paquet de purée instantanée sur la table et par terre.

Maya passe en courant entre les jambes des gens de la BBC, elle grimpe les escaliers et se retrouve dans la rue. Son timing est parfait et elle court vite. Les gens de la télévision se montrent séducteurs et essayent d’entrer dans le logement. J’essaie à la fois de balayer la purée et d’empêcher l’accès à l’appartement pendant que sur la gazinière, la casserole menace de déborder.

D. vient à la rescousse et tient les gens de la télévision à distance pendant que je continue à nettoyer le gâchis, en espérant que Maxine ne sortira pas du Temple pour voir quel andouille je suis. D. va demander à Maxine: tout va bien, ils peuvent entrer. Nous allons tous aller dans le Temple et leur parler pendant un certain temps, le déjeuner devra attendre. Ce n’est ni la première ni la dernière fois.

Tout le monde a oublié Maya.

Une petite fille de sept ans, complètement saoul discute avec ses amis sur le trottoir devant l’appartement, elle est généralement assez bruyante, mais là elle est encore plus expansive que d’habitude.

    Est-ce que ton papa est vraiment un magicien ? » demande un petit garçon.
    Ouaich » a répondu Maya. Elle voit deux fois le petit garçon, mais ce n’est pas de la clairvoyance.
    Qu’est-ce que fait ton papa ?
    Il jette des sorts aux monstres.

L’après midi est bien engagée, nous sommes dans le Temple. L’équipe de la BBC installe l’éclairage et discutent avec Maxine et nous. Un des hommes qui fixe un projecteur demande : « Y a-t-il du pouvoir ici ? » (NDT : il veut savoir s’il y a de l’électricité). Je ne peux résister, je souris et je réponds : « Tout à fait ».

Maintenant Maya, avec plus d’esprit que la plupart des ivrognes de son âge, a descendu les marche comme elle a pu et s’est affalée dans l’un des lits superposés. C’est là que Maxine la découvre. Au lieu de sa poupée, elle s’accroche à une bouteille de vin vide.

Maxine est furieuse envers Richard.

Une heure plus tard. Maya dort toujours, le reste d’entre nous est assis à côté et on regarde « Star Trek » à la télévision en couleur dans la chambre à coucher. Il y a une rediffusion de « Ma sorcière bien aimée » sur une autre chaîne, mais tout le monde est d’accord « Ma sorcière bien aimée » c’est vraiment n’importe quoi. Maxine en veut toujours à Richard. Richard tente de l’ignorer, il essaye de se focaliser sur les oreilles de M. Spock. Il échoue. Je pourrai entrer dans l’histoire Sorcière, je réalise que je risque d’être banni d’un coven dont je ne suis même pas membre.

Pendant les moments les plus calmes de la journée - tous les dix - je me suis interrogé sur le cas de Lucille. Qu’est-ce qui est allé de travers ? Jusqu’à présent je n’avais jamais raté un exorcisme, mais cela devait arriver tôt ou tard. Ce n’était pas ça qui m’avait surpris.

Mais un avis médical n’a rien donné. Christopher Neil-Smith, peut-être l’exorciste le plus recherché en Europe, n’avait réussi que temporairement. Le prêtre catholicisme avait échoué, le vaudou, sa religion natale, a échoué, mon rituel n’a pas été efficace pendant plus de quarante-huit heures, idem - à ma grande surprise particulière – pour le travail du coven.

Je rentre chez moi le soir tard, je mange quelque chose et je suis allé au lit. Melville a dit que les heures à l’aube, quand on se réveille, mais qu’on n’est pas encore préoccupé par quoi que ce soit de plus grave que le petit déjeuner, sont les plus saines de notre vie. Je commence à rassembler mes idées.

Il me semble qu’il n’y a aucune perturbation lorsque Lucille est en présence d’un homme. Lorsque ses sœurs étaient restées avec elle, elles sont toutes devenues la proie de ce paillard psychique et il n’y avait pas d’hommes avec elle lors de l’incident à son bureau. Mais après avoir vu Christopher et reçu le talisman que D. avait fait pour elle, le phénomène s’était arrêté pendant quelque temps. Seul le prêtre catholique, un célibataire, n’a pas réussi à s’intégrer dans ce schéma.

« Elle se rapproche de la ménopause, voilà qui est intéressant » a dit Maxine. « Si elle n’est pas vierge, elle mériterait de l’être. »

Lentement j’ai tout compris - je crois toujours qu’il s’agit là de la vérité. Si on ne peut pas l’empêcher de venir c’est parce que rien n’essaye de venir.


Samedi

Je téléphone à Lucille ce matin et je lui demande si elle avait déjà parlé à un de mes amis. Il est dans le social et c’est un expert en matière de problèmes sexuels – mais je ne le lui ai pas dit. Elle s’arrange pour le rencontrer cet après-midi.

Les phénomènes de poltergeist, cela a souvent été constaté, se produisent fréquemment chez les adolescents pré-pubère. On dit moins, parce que certains psychologues veulent réfuter toutes les occurrences psychiques qui seraient purement subjectives et causées par des pouvoirs inconnus de l’esprit humain et rien d’autre, que de tels phénomènes se produisent aussi quand aucun adolescent n’est présent et apparemment sans aucune raison.

Mais attendez un peu – est ce que la ménopause chez une vieille fille peut produire un effet similaire ? Je le pensais déjà mais je n’en n’étais pas certain. Maxine pensait que c’était tout à fait possible. Elle m’a dit que ce n’était tout simplement pas mes affaires.

17 heures. Mon ami, celui qui est travailleur social, est d’accord. Quand il a suggéré à Lucille que son problème était essentiellement sexuel, elle a été horrifiée et a refusé d’aller plus loin dans le traitement thérapeutique ou psychiatrique. Ce seul fait peut indiquer qu’il avait raison.

Je n’oublierai pas Lucille, mais sur les conseils d’une Sorcière je resterai loin d’elle, tout en espérant qu’un jour elle discutera avec mon ami travailleur social ou qu’elle me téléphonera pour me demander le nom d’un psychiatre. Elle m’a fait confiance, mais elle n’a pas pu affronter le fait que l’on ne peut exorciser ce qui n’est pas là. Joan Grant fait remarquer qu’il est aussi stupide d’essayer de retirer une balle avec l’hypnotisme que d’essayer de guérir un trouble psychique avec de l’aspirine.

Mais qui vivra verra. Parfois, la chose la plus difficile à faire c’est de se souvenir que la Wicca n’est pas une question d’ego. Ensuite la chose la plus difficile à faire, n’est plus vraiment un problème.

20 heures. On se prépare pour l’initiation. Il y aura une fête avant et après. Je rencontre une vieille amie, une énorme sorcière rousse qui m’avait demandé de travailler pour elle il y a quelques mois. On s’est retrouvé au centre de la piste de danse où elle rebondissait comme une montagne de gelée. Je l’aime vraiment beaucoup. Son oncle n’avait plus de travail, il battait les enfants et dépensait tout leur argent en alcool. Maintenant, il a retrouvé un emploi dans un domaine assez spécialisé et semble aller beaucoup mieux.

Je ne suis peut-être pas une sorcière raté, après tout ....

Minuit : Initiation. Une nouvelle Sorcière est née.

Soyez Béni, et il est l’heure d’aller au lit.