Requiem (Les Farrar)
Requiem
Stewart et Janet Farrar
Traduit et adapté de l'anglais par Iridesce
Voici le Requiem que nous avons célébré la première fois que nous avons perdu un membre de notre coven. « Perdu » est un mot qui ne convient pas, évidemment ; sa contribution à la construction de l'esprit du groupe est restée, et dans nos incarnations à venir nous pourrions très bien être liés à nouveau. Mais la fin d'un chapitre doit être marquée et assimilée, et le besoin de dire au revoir avec amour et dignité est universel depuis que l'homme de Néanderthal coucha ses morts sur des lits de fleurs pour qu'ils y reposent.
Deux thèmes symboliques nous ont semblé exprimer ce que nous voulions dire. Le premier est la spirale, qui, depuis l'aube des temps rituels, a symbolisé les processus parallèles de Mort/renaissance et d'initiation/renaissance ; elle nous fait remonter le chemin jusqu'à la source, le ventre universel, la Grande Mère, les profondeurs de l'inconscient collectif ; nous y rencontrons la Sombre Mère, lui faisons face et comprenons qu'elle est aussi la Mère Brillante ; puis nous retraçons notre chemin vers l'extérieur après cette rencontre, régénérés et transformés. Cette spirale vers l'intérieur et l'extérieur prit naturellement la forme d'une danse ; et la spirale vers l'intérieur semblait exiger l'usage de ce rare mouvement widdershins, employé dans les rituels wiccans uniquement à des fins symboliques précises ( comme dans nos rituels d'Equinoxe d'Automne et de Samhain par exemple. ) Ce mouvement serait naturellement suivi par un autre deosil, pour la spirale vers l'extérieur.
Le second thème est celui de la corde d'argent. De façon récurrente, les gens qui ont expérimenté la projection astrale ont parlé de cette corde d'argent qu'ils ont vue onduler, infiniment extensible, entre le corps astral et le corps physique. A la mort physique, disent plusieurs traditions, la corde est coupée. C'est un processus naturel, la première étape dans le retrait de l'âme immortelle de l'astral physique, du bas astral et du haut astral, et des corps mentaux inférieurs qui l'ont accueillie pendant l'incarnation. Tout blocage ou interruption de ce retrait est anormal et résulte d'un dysfonctionnement ; ces blocages peuvent être causés par une obsession, ce qui pourrait expliquer beaucoup de cas de « hantises ». Dans la plupart des cas ( certainement dans celui de notre amie, en tout cas ), il n'y a pas de retard de ce type. Mais même si aucune aide n'est nécessaire pour adoucir et faciliter le passage, il convient qu'il soit symbolisé dans le rite.
Nous avons considéré que les très belles paroles de l'Ecclésiaste (XII, 6-7 dans la Bible), font référence à ce processus ; nous les avons donc utilisés dans notre Requiem, en remplaçant Dieu par Déesse, ce qui, nous l'espérons au vu de notre philosophie ouvertement affichée, n'offensera personne.
La seconde partie du rituel consiste en une représentation de la Légende de la Descente de la Déesse dans le monde d'en bas, qui apparaît dans le Livre des Ombres (NDT : gardnérien) comme une sorte d'épilogue au rituel d'initiation du second degré. Personne, pas même Doreen Valiente, n'est en mesure de dire où Gardner a obtenu cette légende. « Je n'ai absolument rien eu à voir avec la rédaction d'un seul mot de cela », nous dit elle. « J'ignore absolument si le vieux Gerald l'a écrite lui-même ou s'il en a hérité de quelqu'un. Je soupçonne que c'est un peu des deux, à savoir qu'il a dû hériter des grandes lignes du rituel et le réécrire avec ses propres mots. C'est, comme vous le dites, une version de l'histoire d'Ishtar et de légendes similaires ; et cela est relié de façon évidente au rituel d'initiation. »
L'initiation et la renaissance sont des processus étroitement parallèles, nous avons donc trouvé que la Légende enrichissait notre Requiem de la même façon qu'elle enrichit le rite du Second Degré. Nous avons donné les déclamations de la Légende dans « What Witches do » et elles se trouvent également (sous une forme légèrement plus courte) dans le livre de Gardner « Witchcraft Today », mais nous les répétons ici par souci d'exhaustivité, ainsi que des mouvements appropriés qui l'accompagnent et que le Livre des Ombres laisse à l'imagination du lecteur. Si la Légende est jouée fréquemment par le coven - et il n'y a absolument aucune raison de la réserver à l'initiation du Second Degré - il est plus simple d'apprendre ces déclamations. Pour tirer le maximum de la Légende, c'est mieux si les trois acteurs connaissent les dialogues par cœur et les récitent eux-mêmes, plutôt que de laisser le Narrateur le faire. Mais s'ils ne connaissent pas les dialogues par cœur, il vaut mieux laisser le Narrateur tout réciter, parce que voir les trois acteurs tenir des notes ou des livres en main gâche tout l'effet.
A la fin du rituel la Grande Prêtresse annonce le banquet d'amour, avec un au revoir final à l'ami décédé.
Nous aimerions faire un commentaire sur le rite tel que nous l'avons vécu. Le moment où nous avons brisé le bol a eu un effet inattendu sur nous tous ; ce fut comme si l'écho de cette acte avait résonné sur tous les plans à la fois. Notre plus jeune membre a eu une exclamation de surprise, exprimant en cela le sentiment de tous. Un sceptique pourrait dire que le bruit de casse, chargé de symbolisme comme il l'était, a provoqué un choc psychologique ; mais même ce n'était que cela, ce serait toujours d'une grande validité : la concentration de la conscience du groupe sur la signification profonde de ce que nous faisions, dans un instant d'intense simultanéité.
Quand le rituel fut terminé, nous avons ressenti un bonheur calme qu'aucun de nous n'avait connu depuis que notre amie était tombée malade. Nous avons rarement eu l'occasion de constater à ce point la réussite d'un rituel, et sa réverbération bien au-delà des limites du Cercle.
dans le texte ci-dessous, nous avons utilise le pronom « elle » pour plus de simplicité. Si le requiem se tient pour un homme, il pourrait être approprié d'échanger les rôles du Grand Prêtre et de la Grande Prêtresse pour la première partie du rituel, jusqu'à la Légende ; comme toujours, nous laissons cela au jugement du Coven concerné.
La préparation
La décoration du cercle et de l'autel pour un Requiem sera une question de goûts individuels, dépendra des circonstances, de l'époque de l'année et du caractère et de la vie de la personne que l'on commémore.
Un petit bol en poterie (un mug ou une tasse peuvent aussi faire l'affaire) est posé à côté de l'autel, et une corde argentée y est attachée ; on posera à proximité un marteau pour briser le bol, et une étoffe pour contenir les morceaux.
Pour la légende de la Descente de la Déese, des bijoux et un voile sont posé sur l'autel pour la Déesse, et une couronne pur le Seigneur du Monde d'en-bas. Un collier est également placé sur l'autel.
Le rituel
Le rituel d'ouverture est fait comme dh'abitude, jusqu'à l'invocation du Grand Dieu Cernunnos. La Grande Prêtresse et le Grand Prêtre font ensuite face au Coven, le dos à l'autel.
La Grande Prêtresse dit :
« C'est dans la tristesse et la joie mêlées que nous nous rencontrons aujourd'hui. La tristesse parce qu'un chapitre est terminé ; et la joie aussi, parce que, par cette fin, un nouveau chapitre peut commencer.
Nous sommes assemblés pour marquer le passage de notre sœur bien-aimée, ********, dont l'incarnation est maintenant finie. Nous nous assemblons pour la recommander aux bons soins du Dieu et de la Déesse, pour qu'elle puisse reposer, libre de l'illusion ou du regret, jusqu'à ce que le temps soit venu pour elle de renaître à ce monde. Et, sachant qu'il doit en être ainsi, nous savons également que la tristesse n'est rien et que la joie est tout. »
Le Grand Prêtre reste à sa place, et la Grande Prêtresse mène le coven dans une danse de la spirale, doucement dirigée vers l'intérieur dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, mais sans faire de circonvolutions trop serrées.
Le Grand Prêtre dit :
« Nous t'appelons, Ama, Mère sombre et stérile ; toi à qui toute vie manifestée doit retourner, lorsque son heure vient ; sombre Mère de calme et de repos, devant qui tremblent les hommes parce qu'ils ne te comprennent pas. Nous t'appelons toi qui est aussi Hécate de la Lune décroissante, sombre Dame de Sagesse, que les hommes craignent parce que cette sagesse surpasse et surplombe la leur. Nous, les enfants cachés de la Déesse, nous savons qu'il y a rien à redouter dans ton étreinte, à laquelle nul n'échappe ; que, lorsque nous marchons dans ton obscurité, comme tous le doivent, ce n'est rien d'autre qu'entrer à nouveau dans la lumière. Voici pourquoi, dans l'amour et sans crainte, nous te recommandons l'âme de ********, notre soeur. Prends la, garde la, guide la ; admets la dans la paix du Pays d'été, qui se trouve entre la vie et la vie. Et sache, toi qui sais toute chose, que notre amour l'accompagne."
Le Grand Prêtre rassemble le bol, la corde, le marteau et l'étoffe. La danse cesse, et le coven se sépare pour permettre au Grand Prêtre de se placer au centre de la spirale, où il dépose l'étoffe au sol et le bol dessus. Il tend l'extrémité libre de la corde à la Jeune Fille.
La Grande Prêtresse dit :
" Que la corde d'argent soit défaite, que le bol soit brisé, que le pichet se casse à la fontaine, que la roue se brise à la citerne ; ainsi, la poussière doit retourner à la terre d'où elle est venue ; et l'esprit doit retourner à la Déesse dont il est issu".
Le Grand Prêtre détache la corde d'argent, et la Jeune Fille la rassemble dans ses mains. Le Grand Prêtre enroule ensuite l'étoffe autour du bol, et le brise avec le marteau. Il replace le tissu enroulé contenant les morceaux du bol, et le marteau, près de l'autel. Le coven se referme.
La Jeune Fille porte la corde d'argent et, pendant l'invocation qui suit, en amrchant deosil autour du cercle, l'offre en premier aux Seigneurs de la Tour de garde d l'Ouest ( les Seigneurs de la Mort et de l'Initiation ), et ensuite au Seigneurs de la Tour de garde de l'Est ( les Seigneurs de la Renaissance ). Elle dépose ensuite la corde sur le sol devant la bougie de l'Est et rejoint le Grand Prêtre à l'autel ( toujours deosil, dans le sens des aiguilles d'une montre ).
Pendant ce temps, la Grande Prêtresse mène de nouveau la danse, mais cette fois deosil pour défaire la spirale, jusqu'à ce que le cercle de base soit reformé. Le cercle continue de tourner dans le sens des aiguilles d'une montre après cela.
Aussitôt qu'il a replacé l'étoffe et le marteau près de l'autel, le Grand Prêtre fait face au coven, et dit :
"Nous t'appelons, Aima, Mère brillante et fertile ; toi qui est le ventre de la renaissance, et de qui toute vie manifestée procède, et aux seins de qui tout est nourri. Nous t'appelons, toi qui est aussi Perséphone de la Lune croissante, Dame du Printemps et de toutes choses nouvelles. Nous te recommandons l'âme de ********, notre soeur. Prends la, garde la, guide la ; porte la dans la plénitude du temps vers une nouvelle naissance et une nouvelle vie. Et fais en sorte que dans cette nouvelle vie elle puisse être aimée à nouveau, comme nous, ses frères et soeurs, nous l'avons aimée."
Le Grand Prêtre et la Jeune Fille rejoigne le coven en cercle, et la Grande Prêtresse commence la Rune Sorcière, à laquelle tous se joignent. Lorsque c'est terminé, la Grande Prêtresse ordonne "A terr", et le coven s'assoit en cercle, tourné vers l'intérieur.
Elle distribue alors les rôles pour la légende de la descente de la Déesse dans le monde d'en bas : le Narrateur, la Déesse, le Seigneur du monde d'en bas et le Gardien des Portes. La Déesse est ornée de bijoux et voilée, et se tient au bord du cercle au Sud Est. Le Seigneur du monde d'en bas met sa couronne, prend l'épée et se tient dos à l'autel. Le Gardien des portes prend son athamé et la corde rouge, et se tient face à la Déesse.
Le Narrateur dit :
"Dans les temps anciens, notre Seigneur, le Cornu, était le Consolateur, le Réconforteur ; et il l'est toujours. Mais les hommes le connaissaient comme le terrifiant Seigneur des Ombres, solitaire, sévère et juste. Mais notre Dame, la Déesse, voulait résoudre tous les mystères, même le mystère de la mort ; elle voyagea alors jusqu'au monde du dessous. Le Gardien des Portes la défia :
( Le Gardien pointe son athamé vers la Déesse )
" Enlève tes vêtement, pose à terre tes bijoux ; car tu ne dois rien apporter avec toi dans ce pays."
La Déesse ôte son voile et ses bijoux ; il ne doit rien rester sur elle si le rituel est skyclad ; sinon, elle peut garder uniquement sa robe, aucun ornement. Il l'attache alors avec la corde rouge comme dans le premier degré d'initiation.
« Elle déposa alors ses vêtements et ses bijoux, et fut attachée, comme toutes choses vivantes doivent l'être qui entrent dans les royaumes de Mort, le Très Puissant. »
Le Gardien des Portes conduit la Déesse afin qu'elle se tienne devant le Seigneur du monde d'en bas. Puis il s'écarte.
« Sa beauté était si grande que la Mort elle-même s'agenouilla, et déposa à ses pieds sa couronne et son épée… »
Le Seigneur du monde d'en bas s'agenouille devant la Déesse, dépose l'épée et la couronne sur le sol de chaque côté d'elle, puis embrasse son pied droit et son pied gauche. « Et il embrassa ses pieds, en disant : Bénis soient tes pieds, qui t'ont emmenée en ces lieux. Reste à mes côtés ; mais laisse moi placer mes mains froides sur ton cœur. » Le Seigneur du monde d'en bas élève ses mains, les paumes en avant, et les tient à quelques centimètres du cœur de la Déesse.
« Et elle répondit : Je ne t'aime point. Pourquoi es tu cause que toutes les choses que j'aime et auxquelles je prends plaisir, se flétrissent et meurent ? »
Le Seigneur du monde d'en bas écarte les bras vers le bas, les paumes en avant.
« Dame, répondit la Mort, c'est l'âge et le destin, contre lesquels je suis impuissant. L'âge fane toute chose ; mais quand les hommes meurent à la fin de leur temps, je leur donne le repos et la paix, et la force, afin qu'ils puissent revenir. Mais toi, tu es belle ; ne t'en retournes pas, demeure avec moi. Mais elle répondit : Je ne t'aime point. » Le Seigneur du monde d'en bas se lève, va à l'autel et prend le fouet. Il se retourne pour faire face à la Déesse.
« Alors, la Mort dit : Puisque tu n'as pas voulu de mes mains sur ton cœur, tu ploieras sous le fouet de la Mort. » « C'est le destin - C'est mieux ainsi, répondit-elle, et elle s'agenouilla. Et la Mort la fouetta avec douceur. »
La Déesse se met à genoux, face à l'autel, le Seigneur du monde d'en bas lui donne trois, sept, neuf et vingt-et-un coups de fouet très doux.
« Et elle s'écria : je connais les douleurs de l'amour. »
Le Seigneur du monde d'en bas repose le fouet sur l'autel, l'aide à se relever et s'agenouille devant elle.
« Et la Mort la releva, et dit : Sois bénie. Et il lui donna le Quintuple Baiser, en disant : C'est seulement de cette façon que tu pouvais atteindre la joie et la connaissance. » Le Seigneur du monde d'en bas donne à la Déesse le Quintuple Baiser ( sans les déclamations habituels ). Puis il dénoue les liens de ses poignets, et dépose la corde sur le sol. « Et il lui apprit tous ses mystères et lui donna le collier, qui est le cercle de la renaissance. »
Le Seigneur du monde d'en bas prend le collier sur l'autel et le place au cou de la Déesse. Puis elle prend la couronne et la replace sur la tête du Seigneur.
« Et elle lui enseigna les mystères de la coupe sacrée, qui est le chaudron de renaissance. »
Le Seigneur du monde d'en bas se déplace de devant l'autel jusqu'à l'Est de cercle, et la Déesse se déplace vers l'Ouest. Elle prend le calice dans ses deux mains, ils se font face, et il place ses mains autour des siennes.
« Ils s'aimèrent, et furent Un ; car il y a trois grands mystères dans la vie de l'homme, et la magie les contrôle tous les trois. Pour que l'amour soit vécu dans la plénitude, vous devez revenir au même moment et au même endroit que ceux que vous aimez ; et vous devez vous rencontrer, et savoir, et vous souvenir, et les aimer à nouveau. » Le Seigneur du monde d'en bas lâche les mains de la Déesse, et elle repose le calice sur l'autel. Il prend le fouet dans sa main gauche et l'épée dans la droite et se tient dans la Posture du Dieu, les avants-bras croisés sur sa poitrine et le fouet et l'épée pointés vers le haut, le dos à l'autel. Elle se tient à ses cotes dans la position de la Déesse, les pieds écartés et les bras tendus pour former le Pentagramme.
« Mais pour renaître, vous devez mourir, et être prêts à recevoir un nouveau corps Et pour mourir, vous devez être nés ; et sans l'amour, vous ne pourriez pas naître. Et notre Déesse est toujours favorable à l'amour, à la gaieté, et au bonheur ; ainsi garde-t-elle et chérit-elle ses enfants cachés pendant leur vie, et dans la mort, elle leur enseigne les voies de la communion avec elle ; et dans ce monde même, elle leur apprit les mystères du Cercle Magique, qui est placé entre le monde des hommes et le monde des Dieux. »
Le Seigneur du Monde d'en bas replace le fouet l'épée et la couronne sur l'autel. Ceci termine la Légende, et les acteurs reprennent place dans le coven.
La Grande Prêtresse dit :
« A présent, comme la Déesse nous l'a enseigné, partageons le festin d'amour, le vin et les gâteaux ; et ce faisant, souvenons-nous de notre sœur *****, avec qui nous avons si souvent partagé ces moments. Et par cette communion, nous plaçons tendrement notre sœur dans les mains de la Déesse.
Tous répondent :
« Ainsi soit fait. »
Le vin et les gâteaux sont consacrés et circulent dans le coven.
Aussitôt que possible après le Requiem, les morceaux du bol sont rituellement jetés dans une eau courante, rivière ou fleuve, avec le commandement traditionnel : « Retourne aux éléments dont tu es issue. »