L'Arbre de Mai

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L'Arbre de Mai

Véro


Ainsi que je le disais dans le texte sur les moissons, nous sommes de grands voyageurs, et, alors que nous voyions des carrés de blés non récoltés, nous voyions aussi, à d’autres périodes, des arbres de mai dans les cours et sur les places des villages en Allemagne.

Là bas on l’appelle Maibaum (arbre de mai) Maistange (poteau de mai) ou simplement Maie.

Il est composé d’un tronc généralement écorcé, qui peut atteindre 50 mètres, ceint à son sommet d’une couronne et d’un gros bouquet (parfois ce peut être un petit sapin qui fait office de bouquet).

Tel qu’on le connaît aujourd’hui il n’existe en fait que depuis le 16ème siècle et il a été surtout popularisé à la fin de la seconde guerre mondiale via la propagande nazi qui en avait fait un symbole du réveil de la nature. Il était tombé en désuétude et est revenu sur le devant de la scène dans les années 70

On l’appelle « arbre de mai » mais il peut aussi être érigé à la Pentecôte ou à la Saint Jean d’été. D’ailleurs en Suède c’est le mittsommerbaum : l’arbre du milieu de l’été.

En des temps plus anciens (13ème au 18ème siècles) il a connut bien des déboires : d’un côté les soldats voulaient que la tradition soit sauvegardée car qui disait érection d’arbre de mai disait bière gratuite, mais parallèlement à cela l’église voulait s’en défaire car il s’agissait bien d’une tradition païenne (on l’aurait rapproché des menhirs, mais aussi des poteaux centraux des yourtes, et de l’arbre qui permet aux chamans d’accéder au monde d’en haut), et les propriétaires des forêts auraient aimé que cela cesse, mais les jeunes hommes qui fabriquaient lesdits arbres voulaient que cela continue car ils étaient les héros de toute l’affaire.

Il y avait donc l’arbre du village, celui qu’on dressait en son centre. Le jeu consistait à aller voler celui du village voisin et à demander une rançon (payable en bière). Donc il y avait des groupes dévolus à la surveillance du mat. Si malgré toutes les précautions l’arbre était volé et que par le plus grand des hasards personne ne le réclamait, ceux qui l’avaient subtilisé le dressaient dans leur propre village, mais il devenait alors le « schandbaum » l’arbre de la honte ! L’arbre de honte, au lieu d’être couronné de verdure, l’était d’un balai. Il était toutefois interdit de s’en prendre physiquement aux gardiens du mat. Et l’arbre lui-même devait être volé sans être abîmé. Qu’un gardien posât la main sur le mat et il devenait aussitôt tabou.

Cet arbre devait rester en place pendant tout le mois. Avant d’être érigé il était promené triomphalement dans tout le village. Dans certains endroits on fabriquait tous les ans un nouveau mat, dans d’autres on réutilisait le même mat et durant le reste de l’année on l’immergeait ans un cours d’eau. Si durant la période d’érection le tronc avait des rejets, cela annonçait des « événements » à venir.

Il y avait donc ces arbres « communaux » et puis il y avait ceux qu’on plantait dans son jardin, ou dans celui du voisin. Si on le plantait chez le voisin c’était en général un arbre de honte qu’on lui dédiait. Or, comme personne n’aurait voulu être ainsi désigné, tout le monde se levait extrêmement tôt ce matin du 1er mai afin d’ôter éventuellement toute trace de honte devant chez soi, mais aussi de vérifier quel autre voisin aurait été concerné !

Et comme l’amour est également une valeur universelle, les jeunes hommes célibataires profitaient de cette nuit de Walpurgis pour fabriquer des cœurs en roses et en rubans qu’ils plaçaient sous la fenêtre de leur aimée. Il veillaient là durant toute la nuit afin d’éviter les vols. Dans d’autres régions ils fabriquaient un petit arbre de mai (en bouleau bien souvent) qu’ils plaçaient dans le jardin de l’aimée.

La nuit de Walpurgis vient de Sainte Walpurga (qui tombe fort à propos) sainte patronne des fermières et des employées de maison. Elle est aussi la protectrice des arts magiques. Durant cette nuit donc pendant que les sorcières étaient au sabbat, les jeunes hommes (du moins ceux qui ne veillaient pas leur cœur en roses et rubans) faisaient des farces : décrocher les volets des maisons et les portes des granges, déplacer les objets, les brouettes, les outils agricoles, barricader les portes des fermes avec des planches ou un tas de fumier, dérouter l’eau du puits pour qu’elle entre dans les maisons…. Aujourd’hui la tradition perdure, mais ils s’en prennent aux voitures, aux panneaux routiers, aux meubles de jardin !